Avec Parole de Mamans, Reworld teste la fin du modèle display

Avec Parole de Mamans, Reworld teste la fin du modèle display Cette toute première expérience devrait à terme toucher l'ensemble des sites affinitaires de Reworld Media, soit 60% de ses audiences. Un moyen de compenser la chute tendancielle des audiences des éditeurs.

Le postulat de Reworld Media est pour le moins radical : les plateformes sociales et l'IA, notamment l'IA générative incorporée aux moteurs de recherche, sont de très sérieux obstacles à la survie à terme du modèle économique classique des sites web, adossé au financement publicitaire à 100% et au volume d'audience. "La baisse des audiences digitales est généralisée sur l'ensemble des acteurs du marché, de l'ordre de 10% à 12% ces deux dernières années, selon Médiamétrie sur les plus importants groupes de publishers premium. Sur la même période, les audiences des plateformes sociales ont bondi de 30%. La tendance est claire : les audiences vont devenir une denrée de plus en plus rare pour les médias en ligne sur le long terme et la baisse des investissements publicitaires va sans doute perdurer par-delà les seuls effets de la crise économique actuelle", déclare Jérémy Parola, directeur des activités numériques du groupe Reworld Media.

Partant de ce postulat, Reworld Media s'est fixé plusieurs objectifs parmi lesquels se développer fortement sur les plateformes sociales, se renforcer sur le marché de l'influence et tester très sérieusement la suppression des formats publicitaires classiques sur les sites les plus affinitaires du groupe, pour s'appuyer sur un modèle basé sur des services et des contenus facturés à la performance, beaucoup plus rémunérateurs. "Les formats display ne répondent plus aux attentes des annonceurs, c'est un fait. L'annonceur qui souhaite sensibiliser les consommateurs à sa marque fait appel aux réseaux sociaux, à l'influence et à la TV plutôt que de payer des bannières noyées dans une page où la pression publicitaire est maximale. Si son objectif c'est la performance, il fera appel aux Gafam, à l'affiliation et au content commerce", poursuit l'expert.

Le dispositif

Acté et mis en route en février dernier, un premier test grandeur nature de ce changement de modèle a été appliqué à Parole de Mamans, actif digital intégré à l'automne dernier à la suite du rachat par Reworld Media des titres du Groupe Unify à TF1. "Parole de Mamans est un cas d'école de média bas de tunnel : sa segmentation éditoriale est très marquée tout comme la valeur ajoutée de ses contenus, très fortement nourris de conseils donnés aux lecteurs permettant à ces derniers de prendre des décisions", justifie Jérémy Parola. Soit un contexte particulièrement favorable pour les annonceurs pour conseiller des produits, réaliser des enquêtes, proposer des services ou fournir des renseignements permettant de transformer un message en clic ou en lead, le tout sans pression publicitaire.

"Le content to commerce et l'affiliation nous permettent de proposer un nouveau deal à la fois aux annonceurs, en leur offrant un modèle à la performance comme le font les Gafam, aux lecteurs, dont l'expérience est beaucoup plus préservée sans pression publicitaire, et aux moteurs de recherche, qui référencent beaucoup mieux un site qui n'a pas de problème de latence de chargement de ses pages", résume Jérémy Parola.

A la suite de trois mois de travaux de refonte, le nouveau site, live depuis le 3 mai, n'affiche plus aucune pub display. Les bannières ont été remplacées par des formats incorporés à la maquette du site portant des call to action intégrés : des modules conversationnels, des formulaires de collecte de lead, des carrousels e-commerce et des box shopping, le tout facturé aux annonceurs exclusivement à la performance, au CPC ou au CPA.

Le lecteur n'est donc plus exposé à des bannières facturées au coût par mille mais à des contenus et à des expériences relevant des codes du marketing d'affiliation selon un modèle où l'annonceur ne paye que si un clic est opéré sur la créa ou un lead généré, comme le remplissage d'un formulaire.

Résultats et perspectives

Avant son changement de modèle, 40% des recettes de Parole de Mamans étaient assurés par la publicité display et programmatique, ce qui équivalait à quelques dizaines de milliers d'euros par mois. Les autres 60% étaient générés par les opérations de brand content, qui elles ont été maintenues dans le nouveau modèle. Depuis la suppression du display et l'intégration des modules de content to commerce et d'affiliation, le revenu par milles visites (RPM) ramené à chaque visiteur du site a augmenté de 35%. Le temps de chargement de pages, lui, a été  divisé par trois, ce qui aurait eu un impact direct sur les audiences, qui au mois de mai ont augmenté de 65% comparé à la moyenne des douze mois précédents. "La baisse du temps de chargement a énormément favorisé notre référencement naturel dans les moteurs de recherche", assure Jérémy Parola. Ces performances ont représenté une hausse des revenus globaux du site de l'ordre de 49% en un mois, comparé au modèle d'avant.

Si ces chiffres ne sont pour l'instant que le reflet d'un mois d'opérations, il est important de noter que les campagnes à la performance ont toutes été renouvelées avec les annonceurs pour les prochains mois, selon Reworld, le brand content étant quant à lui stable. Et ce n'est pas tout : "Le look and feel du site étant beaucoup plus accueillant, je ne serais pas du tout surpris si nos opérations de brand content venaient à se renforcer", ajoute Jérémy Parola.

Cerise sur le gâteau, toute cette évolution n'a coûté pratiquement rien au groupe en technologie et en savoir-faire puisque ce dernier dispose d'une plateforme d'affiliation, Tradedoubler, et d'un média, Les Numériques, dont le modèle est fortement axé sur le content commerce et l'affiliation. 

L'objectif à terme pour le groupe est de faire évoluer ce modèle pour plus de la moitié de ses audiences. Deux voire trois autres sites des univers santé, maison et automobile sont à l'étude pour un changement de modèle dès le deuxième semestre si ces bons résultats se maintiennent. Concernant les marques plutôt généralistes, traitant des univers comme le people, la TV ou le féminin, l'éditeur compte maintenir leur monétisation selon le modèle publicitaire classique tout en mettant le paquet sur le développement de leurs pages sociales. "Ces marques ont toujours de la puissance et les annonceurs le recherchent encore même si nous sommes persuadés que ce ne seront plus des leviers de croissance à l'avenir."