Chimie et pharmacie, les secteurs oubliés de la reprise

La fragile reprise du premier semestre 2011 profite à tous les secteurs sauf à cex deux-là, révèle David Cousquer, gérant de Trendeo.

Trendeo vient de publier un point sur la conjoncture du premier semestre 2011. Il en ressort que la conjoncture générale de l'économie est sur une pente de reprise fragile. En retard sur cette tendance générale, les secteurs de la chimie et de la pharmacie sont dans une situation plus difficile. Au premier semestre 2011, ces secteurs ont encore supprimé près de 1 500 emplois, alors que l'industrie manufacturière, dont ils font partie, en crée près de 2 500. Des restructurations au sein des grands groupes expliquent en bonne partie cette situation. Autre caractéristique, les groupes étrangers sont plus présents dans ces deux secteurs. Le secteur cosmétique est, enfin, dans une position plus favorable.

Une conjoncture générale en reprise

Depuis le lancement de l'Observatoire de l'investissement, en janvier 2009, la reprise est fragile mais marquée, comme l'indique le premier graphique ci-dessous. Les secteurs de la chimie et pharmacie s'inscrivent également dans ce mouvement de reprise mais continuent à supprimer des emplois.

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Solde net trimestriel des annonces de créations et de suppressions d'emplois en France, tous secteurs confondus. © Trendeo
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Solde net trimestriel des annonces de créations et de suppressions d'emplois en France, secteurs chimie et pharmacie. © Trendeo

Sur la période du premier janvier 2009 au 30 juin 2011, nous avons recensé dans la chimie et la pharmacie 7 000 créations d'emplois et 20 000 suppressions, soit près de 13 000 suppressions nettes d'emplois. C'est la moitié de ce qui a été perdu dans l'automobile. Parmi les secteurs de l'industrie manufacturière, la chimie et la pharmacie sont les quatrième et cinquième secteurs pour les suppressions nettes, comme l'indique le tableau ci-dessous.

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Les cinq secteurs qui suppriment le plus d'emplois dans l'industrie manufacturière depuis le 1er janvier 2009. © Trendeo

Des restructurations internes aux grands groupes

La première explication de ce phénomène réside dans les restructurations des grands groupes. Sanofi est le premier groupe, pour les suppressions d'emplois, dans les secteurs de la chimie et de la pharmacie, comme l'indique le tableau 2 ci-dessous. Du premier janvier 2009 au 30 juin 2011, le groupe a supprimé 4 300 emplois en France, dans le cadre d'un plan global de restructuration qui a touché également ses filiales à l'étranger. Les suppressions opérées par Glaxo et Merck en France, pour s'en tenir aux trois premiers groupes du tableau suivant, font également partie de plans de restructuration globaux. Pour justifier son plan, Glaxo a mis en avant la concurrence des fabricants de génériques, alors que Merck a supprimé des postes suite à la fusion avec Schering-Plough.

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Les dix premiers groupes ayant supprimé des emplois en France dans les secteurs chimie et pharmacie. © Trendeo

Le secteur des cosmétiques en meilleure santé

Parmi les groupes qui créent des emplois, L'Oréal est en première position, avec notamment l'extension de son centre de recherche de Chevilly-Larue, qui se traduira par la création annoncée de 400 emplois supplémentaires. En décembre 2008, c'était LVMH qui annonçait 280 créations d'emplois pour son centre de recherche Hélios, consacré au domaine des parfums, à Orléans. Le centre ouvrira à la mi-2012 (cette opération n'est pas comptabilisée dans les chiffres de cette note, qui reprend les annonces depuis le premier janvier 2009). L'Occitane est également dans le secteur des cosmétiques, tout comme les laboratoires Pierre Fabre, dont l'activité est partagée entre cosmétique et pharmaceutique.

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Les dix premiers groupes ayant créé des emplois en France dans les secteurs chimie et pharmacie. © Trendeo

Une forte présence des groupes étrangers

Les groupes français ont supprimé près de 4 700 emplois, les groupes américains près de 3 900, et les groupes britanniques plus de 1 300 emplois. Dans l'ensemble chimie/pharmacie, les groupes étrangers sont ainsi responsables de 63 % des suppressions nettes d'emplois, alors que, dans l'industrie manufacturière, ils ne représentent qu'environ 42% des suppressions. C'est une caractéristique forte du secteur.

Un taux de délocalisations moins élevé que dans l'ensemble de l'industrie manufacturière

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David Cousquer. © Trendeo

Dans l'industrie manufacturière, les délocalisations représentent un minimum de 9% des suppressions d'emplois. Pour les secteurs de la chimie et de la pharmacie, les délocalisations ne représentent que 5,6% des suppressions. La faiblesse de ce taux est d'autant plus étonnante que les groupes étrangers sont fortement présents et délocalisent habituellement plus que les groupes français : dans les suppressions d'emplois du secteur de l'industrie manufacturière, près de 15% sont des délocalisations, contre moins de 4% pour les groupes français.

La plus importante délocalisation identifiée de janvier 2009 à juin 2011 est la fermeture du site d'Ethicon, filiale de Johnson & Johnson. La production de ce site qui occupait 365 personnes et fabriquait des sutures chirurgicales à Auneau, sera assurée par des sites en Amérique du Sud (Mexique et Porto Rico). Autre exemple, PPG (peinture) a supprimé 200 emplois à Saultain, dans le Nord, réaffectés à d'autres sites de production du groupe en Europe.

Lille en tête

En termes géographiques, la zone d'emplois de Lille est en première position (près de 300 créations nettes), grâce notamment à l'installation de Bayer sur le pôle Eurasanté. Paris puis Nanterre, en sens inverse, sont les zones où les suppressions nettes ont été les plus fortes (près de 6 000 emplois nets supprimés).

A propos de l'Observatoire de l'investissement
L'Observatoire de l'investissement a été créé, par Trendeo, en janvier 2009 et mis en service en juillet 2009. L'objectif de cette base de données, accessible par abonnement, est de recenser et structurer, en temps réel, à travers plus de 4 500 sources d'informations[1], toute l'information sur les investissements et désinvestissements en France. Ceci, dès lors que ces investissements et désinvestissements entraînent des recrutements ou, en sens inverse, des suppressions d'emplois.

Ce choix correspond à une volonté de recenser des événements économiquement significatifs, couverts par les médias. Cette méthodologie nous a permis, depuis janvier 2009, d'enregistrer plus de 17 000 opérations : 10 659 investissements correspondant à 451 879 emplois créés, et 6 589 désinvestissements correspondant à 526 171 emplois supprimés.

L'Observatoire est utilisé par des organismes de développement économique et des administrations nationales à des fins d'étude et de marketing territorial, ainsi que par des groupes industriel ou du secteur du conseil, à des fins de veille commerciale.