Sept Français qui ont créé leur entreprise au Brésil Philippe Watel fait découvrir la gastronomie française

"Lorsque j'ai perdu mon job de directeur dans une agence web à Milan en 2001, je pensais que tous les chasseurs de tête allaient m'appeler", se souvient Philippe Watel. "Mais en plein éclatement de la bulle Internet, c'était la débandade". Il songe à partir à l'étranger, d'autant plus qu'il rencontre alors sa future femme, qui est brésilienne.

philippe watel a créé au bon vivant en 2013.
Philippe Watel a créé Au Bon vivant en 2013. © Philippe Watel

En 2004, il achète un terrain sur une île au sud de Salvador de Bahia, puis construit un hôtel de toutes pièces au cœur de la forêt face à une plage déserte. Un succès énorme : Anima Hôtel attire rapidement les voyageurs du monde entier. "Mais lorsque notre fille a atteint l'âge de 3 ans s'est posé le problème de l'école", explique le Français de 48 ans. "L'hôtel est à cinq heures de route et de bateau de la première grande ville". En 2010, il revend donc son hôtel à un Marseillais "très riche". Car l'affaire a pris de la valeur : "avec la valorisation du real, j'ai multiplié ma mise par cinq", avoue-t-il.

Il s'installe alors avec sa femme dans la campagne non loin de Belo Horizonte, la troisième agglomération du pays, et crée en mai 2013 une société d'importation de vin français. Et comme "on ne boit pas du vin seul", il ouvre un bistrot français attenant à sa boutique, baptisé "Au Bon Vivant".

Au menu : de la terrine de pâté de campagne, de la soupe à l'oignon, du magret de canard à l'orange et de la tarte tatin. Le tout dans une ambiance bistrot parisien pittoresque. Tous les menus sont écrits en français.

Le challenge : convertir les Brésiliens au vin français, alors qu'ils sont plutôt habitués au vin argentin ou chilien. Il offre donc des prix attractifs en supprimant les intermédiaires. "Chez moi, on trouve une bouteille de vin français à peine plus cher qu'au supermarché", assure-t-il. Mais au lieu de séduire la classe moyenne, il attire en fait la riche clientèle "qui a l'impression de faire une bonne affaire en venant chez moi", s'amuse-t-il. En un an, Philippe Watel a déjà vendu 6 000 bouteilles et son bistrot sert 310 couverts par semaine en moyenne.

"C'est un pays avec des opportunités formidables... à condition d'avoir un bon avocat et un bon comptable"

Sa vision du business au Brésil ? "C'est un pays avec des opportunités formidables... à condition d'avoir deux béquilles : un bon avocat et un bon comptable". Car Philippe Watel décrit un système administratif "complètement dingue". "Chaque facture doit être enregistrée en temps réel sur le système informatique du ministère des Finances. La moindre erreur dans un code ou le moindre champ vide, et il est impossible d'éditer la moindre facture".

Les normes sanitaires sont aussi encore plus drastiques qu'en France. "Je n'ai pas le droit de servir le poivre et le sel dans un poivrier et une salière. Ils doivent être dans des petits sachets fermés". Cerise sur le gâteau : l'approche de la Coupe du monde de football a créé une véritable tension sur le marché du travail dans l'hôtellerie/restauration.

Tout cela n'empêche pas notre entrepreneur de nourrir d'ambitieux projets : "Je compte investir dans une petite cuisine industrielle qui fournira des produits à un réseau de bistrots/épiceries françaises à l'enseigne Au Bon vivant", escompte-t-il.