Santé : les innovations n'auront de sens qu'en remettant l'humain au centre des décisions

Il est de la responsabilité des dirigeants, experts et chercheurs, de tirer parti des avancées en intelligence artificielle pour par exemple créer des solutions qui libèrent les professionnels de santé de leurs charges administratives.

Le secteur de l'e-santé (ou santé numérique) est florissant, avec des investissements croissants dans l'innovation technologique. Les développeurs IT cherchent à capitaliser sur ce marché qui devrait excéder 390 milliards de dollars d'ici à 2024. Le secteur fourmille d'opportunités technologiques prometteuses pour les organisations de santé, qui doivent sans cesse en " faire plus avec moins".

Cependant, "l’innovation pour l’innovation" ne permettra pas d’améliorer réellement la qualité des soins si elle ne parvient pas à offrir plus de ressources pour épauler les médecins et à accroître la qualité et la durée de vie des patients. Pour cette raison, il est essentiel que ceux qui développent les applications de santé placent toujours l’humain au centre de leur travail. Cela passe par la création de solutions qui s’intègrent parfaitement et en toute sécurité à notre vie quotidienne, qui améliorent la relation soignants-patients, augmentent les capacités cliniques et renforcent les interactions humaines.

L’humain, un facteur déterminant dans la qualité du soin prodigué et reçu

Prioriser l’expérience patient implique de trouver de nouvelles façons d’interagir tout au long du parcours de soins, et de donner aux médecins les moyens nécessaires à leur pratique. Alors que ce concept peut sembler évident, les complexités inhérentes aux régulations et aux charges administratives du secteur viennent trop souvent déséquilibrer l’équation. Pensons à tous ces éléments qui contribuent à créer une barrière physique, émotionnelle ou mentale entre les patients et leurs médecins : l’attention fixée sur l’ordinateur, le clavier, des centaines de clics, des conversations qui peuvent devenir des monologues et laisser place à des silences gênants pendant que le praticien navigue dans des logiciels médicaux pour remplir des documents obligatoires… L’expérience patient en devient impersonnelle, les médecins de leur côté sont nombreux à connaître un burn-out, et le lien de confiance, à la base de la médecine, s’effrite.

La situation actuelle est intenable, mais pas irréparable. Il est de la responsabilité des dirigeants, experts technologiques et chercheurs, de tirer parti des avancées en intelligence artificielle pour créer des solutions qui libèrent les professionnels de santé de leurs charges administratives, soient plus engageantes pour les patients et renforcent la relation soignant-patient. A titre d’exemple, le Centre Hospitalier de Rambouillet s’est récemment équipé d’une solution utilisant la reconnaissance vocale et l’IA conversationnelle pour permettre à ses praticiens de remplir plus efficacement les dossiers patients informatisés, et ainsi passer plus de temps à interagir avec leurs patients.

Les attentes des patients à l’ère de la culture digitale

En ces temps d’innovation record dans le secteur, la plupart des patients estiment que la technologie leur permet d’être mieux connectés aux organismes de santé, et par conséquent les maintenir en meilleure santé. De plus, à l’heure de la "consumérisation" accrue de la santé, les attentes des consommateurs digitaux redéfinissent la façon d’envisager la santé, les services auxquels les patients ont accès, et les interactions avec les organisations de santé. Les patients de cette nouvelle ère souhaitent désormais mieux comprendre leurs frais médicaux, leurs traitements, et connaître les temps d’attente, les notes données aux médecins, le degré de bienveillance des équipes médicales, et les résultats cliniques. Les acteurs de l’innovation ont donc tout intérêt à accroître le niveau de transparence et d’engagement, rendant les applications de e-santé plus intuitives et agréables à utiliser pour les patients comme les professionnels. L’enjeu est de taille : diminuer les pressions et frustrations ressenties, augmenter la confiance, améliorer le soin et maîtriser les dépenses.

Le serment d’Hippocrate enjoint les médecins à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour soigner les patients. Il leur rappelle que la médecine est un art autant qu’une science, et que la bienveillance, l’empathie et la compréhension sont parfois plus importantes que les procédures ou les prescriptions.

Il met aussi l’accent sur le caractère privé des informations médicales. Tous les acteurs de l’innovation en santé devraient également appliquer ces principes à leur travail, afin de fournir des solutions qui priorisent l’humain, appliquent des politiques claires et vérifiables de protection des données, et recueillent explicitement le consentement de leurs utilisateurs. Le bien-être du patient est et restera le fondement du soin.