Faire de la lutte contre l'arrêt cardiaque un projet sociétal

En ce mois de janvier 2022, le dernier volet de la loi obligeant les Établissements Recevant du Public (ERP) à s'équiper d'un défibrillateur (DAE) est entré en vigueur : désormais, certains ERP de catégorie 5 sont eux aussi concernés. Une étape de plus pour densifier le parc de défibrillateurs en France et s'assurer que les endroits les plus fréquentés (gares, grands magasins, salles de spectacle, salles de sport, …) soient équipés.

Une réponse à enjeu de santé public majeur

L’arrêt cardiaque est la première cause de mortalité évitable avec 50 000 victimes par an en France, 400 000 à l’échelle de l’Europe. En comparaison, les accidents de la route font 15 fois moins de victimes par an et les incendies, 300 fois moins.

Actuellement, le taux de survie face à un arrêt cardiaque en France est de seulement 5%. Pourquoi un taux si faible ? Car il faut agir dans les 4 premières minutes pour avoir un maximum de chances de survie, alors que les secours mettent en moyenne 15 minutes à intervenir. Pour agir, 3 gestes simples sont à retenir : alerter les secours, masser et utiliser un défibrillateur. La bonne nouvelle, c’est que dans 70% des cas, un témoin est présent et peut intervenir pour aider la victime en attendant l’arrivée des secours - à condition qu’il connaisse les bons gestes et qu’il ait un défibrillateur en bon état de fonctionnement.

Plus de détails sur cette loi

Afin d’être en conformité, un ERP à la nécessité de s'équiper d’un défibrillateur, d’assurer sa maintenance, de mettre en place la signalétique nécessaire au sein de son établissement et de déclarer le défibrillateur dans la base nationale (Géo’DAE).

La réglementation touche ainsi tous les établissements des catégories 1 à 3, les plus grands comme les salles de concerts ou les grands magasins, qui doivent être équipés depuis 2020. Mais aussi ceux de catégorie 4 qui sont concernés depuis le 1er janvier 2021. Il peut s’agir d’hôtels, d’écoles, de lieux de culte. Certains ERP de catégorie 5, comme les salles de sport ou les établissements de santé y sont aussi soumis depuis le 1er janvier 2022.

Le raisonnement derrière cette loi est simple : là où il y a une forte fréquentation, le risque qu’il y ait un arrêt cardiaque est plus fort. La chance qu’un appareil soit utile - et utilisé - est donc plus importante.

Une mesure qui doit s’accompagner d’une politique publique de sensibilisation des citoyens aux gestes de premiers secours

Si cette mesure est une excellente initiative qui permet d'augmenter drastiquement le nombre de défibrillateurs dans l’espace public, elle oublie le volet formation pourtant nécessaire. Or, c’est bien l’association des défibrillateurs et de la formation à leur utilisation et aux gestes des premiers secours qui permettra réellement de sauver des vies.

Il reste sur ce point encore un long chemin à parcourir : seulement 20% de la population française est formée aux gestes qui sauvent et 30% des défibrillateurs déployés en France sont hors d’usage, faute de suivi et de maintenance.

Malgré ce constat alarmant, il ne faut pas céder à la fatalité. Des exemples dans le monde montrent que l’on peut changer les choses. À Seattle par exemple, 80% de la population est formée. On y trouve des défibrillateurs absolument partout. Dans la rue, en entreprises, dans les commerces et dans les immeubles d’habitation. La ville revendique un taux de survie à l’arrêt cardiaque de plus de…60% ! En France, cela représenterait des dizaines de milliers de vies sauvées chaque année, des proches, des amis, des voisins, des collègues.

La période compliquée que nous traversons avec le Covid a redéfini pour chacun d’entre nous notre rapport à l’essentiel. “Veiller sur ses proches, ses voisins”, “être solidaire” sont des mots que l’on n’a rarement autant entendus. Mais ce ne sont pas toujours des engagements simples à matérialiser dans notre quotidien. Le sens de cette loi est simple : c’est ensemble, en prenant soin des autres, en veillant chacun de nous sur ceux qui nous entourent qu’on peut sauver une vie.

Dans une période où nous cherchons du liant pour la Nation, à recréer de la fraternité au sein de la population, se rassembler autour d’une cause comme l’arrêt cardiaque représente une vraie opportunité.

Un premier pas vers une massification de l’installation des défibrillateurs ?

Comment aller encore plus loin demain pour en faire un réel projet à impact sociétal ? 80% des arrêts cardiaques ont lieu à domicile ou sur le lieu de travail, c'est-à-dire là où l’on passe le plus de temps. Il est donc impératif d’élargir ce mouvement afin d’équiper chaque bureau et chaque immeuble d’habitation et de continuer le maillage du territoire débuté avec les ERP. Jamais on n’entendra quelqu’un se satisfaire d’avoir un extincteur à 200 mètres de son domicile. Alors pourquoi en serait-il autrement avec un défibrillateur ? Il est temps d’agir, tous ensemble.