Luko lève 20 millions d'euros pour son assurance habitation connectée

Luko lève 20 millions d'euros pour son assurance habitation connectée L'assurtech française compte investir dans ses boîtiers connectés, se lancer dans deux pays européens et recruter une cinquantaine de personnes dans les douze prochains mois.

Rare sont les séries A à deux chiffres. Encore plus dans l'assurtech. Après une première levée de fonds de 2 millions d'euros en mai 2018, Luko annonce un tour de table de 20 millions mené par Accel, aux côtés de Founders Fund et Speedinvest. Contrairement à d'autres start-up de l'assurance, Luko n'a pas souhaité faire entrer d'assureur à son capital. "Cela aurait été une erreur stratégique", estime Raphaël Vullierme, son CEO. "Nous avons besoin de liberté. En plus, il y a beaucoup d'argent sur les marchés du capital-risque", ajoute-t-il. La start-up, qui a le statut de courtier, a fait le choix de s'adosser à des réassureurs (Munich Re et Swiss Re) et La Parisienne Assurances (assurance 100% en marque blanche) plutôt qu'à un assureur traditionnel.

Grâce à cette levée de fonds, l'assurtech va investir dans des technologies de protection du foyer pour prévenir les sinistres : un capteur qui analyse les vibrations des portes, des outils d'analyse de la consommation électrique en temps réel… Avant de proposer une assurance habitation, Luko commercialisait des boîtiers à installer sur les compteurs d'eau, d'électricité ou les portes d'entrées. Ces capteurs sont désormais intégrés dans les offres d'assurance. La levée va donc permettre de financer ces capteurs, qui coûtent très cher à produire, surtout à petite échelle. Pour l'instant, seulement 1 500 foyers européens testent les capteurs, sur les 20 000 assurés Luko. "Nous ne les avons pas déployés car nous ne sommes pas encore entièrement satisfaits des résultats", confie Raphaël Vullierme. 

"Nous n'avons pas encore déployé nos capteurs car nous ne sommes pas entièrement satisfaits des résultats"

La smart home est un sujet central pour Luko, qui souhaite se différencier des assureurs traditionnels. "Le problème de l'assurance est que tous les acteurs vendent des produits d'habitation qui sont tous plus ou moins les mêmes. Or, cela coûte cher de vendre des produits de ce type car il faut notamment faire du SEO (les assureurs font partie des plus gros acheteurs de mots-clés, ndlr). Nous essayons donc de faire un produite utile, différenciant, qui ne nécessite pas de faire du SEO", indique le cofondateur. La jeune pousse mise aussi sur un modèle atypique. 30% des cotisations sont prélevées pour la gestion des sinistres (dont une partie est reversée à l'assureur partenaire), le service client et le développement des technologies de protection. Et les 70% restants sont placés dans un fonds commun servant à dédommager les assurés en cas de sinistre. En fin d'exercice, le solde de cette cagnotte est reversé à l'association choisie par l'assuré. Son homologue américain Lemonade a mis en place un modèle similaire avec son programme Giveback.

Focus sur l'habitation

Le nouveau financement lui permettra aussi de multiplier les partenariats dans la fintech et l'immobilier en 2020. "C'est un très gros levier de croissance pour nous", assure le dirigeant. En novembre dernier, elle s'est notamment associée à Lydia pour permettre à ses assurés d'être remboursés instantanément sur leur compte Lydia. En dehors des partenariats, Luko s'appuie sur une offre de parrainage et le bouche-à-oreille pour conquérir de nouveaux clients. Elle assure que son coût d'acquisition est deux à trois fois plus faible qu'un assureur traditionnel (soit une vingtaine/trentaine d'euros).

Pas de diversification produit prévue dans la roadmap. Luko souhaite se focaliser sur l'assurance habitation, contrairement à ses concurrents Lovys et Leocare qui proposent aussi de l'assurance auto ou smartphone. Elle avait pourtant lancé une assurance pour les trottinettes électriques, hoverboards et autres engins roulants. "Celle pour les trottinettes a bien marché mais les autres beaucoup moins", avoue Raphaël Vullierme. Ces produits ne seront pas abandonnés et évolueront puisque depuis octobre dernier il est obligatoire d'assurer une trottinette en responsabilité civile, par exemple.

Cet investissement à deux chiffres aidera également Luko à s'implanter dans deux pays européens (les noms ne sont pas communiqués) en 2020. Grâce à son partenaire européen Munich Re, la start-up peut facilement déployer Luko dans n'importe quel pays de l'UE. Mais ce ne sera pas gagné pour autant. "Il y a des barrières culturelles et marketing. Il faut adapter le produit et craquer le modèle dans chaque pays", note Raphaël Vuillierme. Une cinquantaine de recrutement est prévue dans les douze prochains mois, majoritairement des profils liés à l'assurance (actuaire, gestionnaire de sinistre…) et tech. Aujourd'hui, la jeune société compte une quarantaine de salariés.

Côté finances, Luko ne communique pas son chiffre d'affaires. Elle assure avoir un panier moyen de 80 euros à l'année et son taux de sinistre sur prime (rapport entre le montant des sinistres et celui des cotisations encaissées sur un même contrat) serait "bien meilleur que toutes les assurtech françaises", nous assure un investisseur. "Les coûts d'acquisition sont bien maîtrisés, leurs finances sont saines", complète-t-il. Comme les fintech BtoC, les assurtech BtoC ont tendance à brûler beaucoup de cash et donc à lever beaucoup d'argent, à l'image de Lemonade qui a levé 480 millions de dollars en quatre ans, mais a finalement décidé de décaler son entrée en bourse, sans préciser de date.