Alma lève 12,5 millions d'euros pour devenir le Stripe du paiement fractionné

Lancée début 2019, la fintech propose aux marchands, physiques et en ligne, une solution de paiement en trois ou quatre fois. Elle revendique 1 000 clients.

Entre le crédit et le paiement au comptant, il y a le paiement fractionné, en trois ou quatre fois. Cette solution de financement explose en France. Spécialisée dans ce domaine avec comme cible les petits et moyens commerçants, la start-up Alma explose aussi. Moins d'un an après sa levée de fonds de 3,3 millions d'euros, cette fintech parisienne annonce un nouveau tour de table de 12,5 millions d'euros auprès de ses investisseurs historiques (Idinvest et Isai) et du fonds de capital-risque allemand Picus Capital. Didier Valet, ancien directeur général délégué de Société Générale, remet au pot. Ce financement en equity est complété par une dette de 17 millions d'euros qui servira à financer les marchands. Sachant qu'Alma avance le montant total du paiement au commerçant en vue du crédit accordé au client final.

La levée de fonds va permettre à la start-up, lancée début 2019, d'améliorer l'expérience client de sa solution. "Je suis obsédé par le travail de Stripe en matière d'expérience client. Je veux donc la meilleure expérience client et un taux d'acceptation très élevé. Je suis persuadé que c'est comme ça qu'on gagnera", estime Louis Chatriot, cofondateur d'Alma et ancien directeur général de Stripe en Italie. Alma prévoit également d'intégrer sa solution aux sites marchands. Aujourd'hui, les consommateurs sont redirigés vers une page de paiement externe.

"Nous voulons faire du 'B to small B', pour toucher des entreprises dont les clients ressemblent à des clients finaux"

La solution en magasin, disponible depuis juillet dernier, sera aussi améliorée. "L'expérience client est plus importante en boutique physique que sur un site web car vous voyez les gens qui font la queue et qui peuvent donc s'impatienter", explique Louis Chatriot. 100% SaaS, Alma met à disposition des retailers soit un service qui permet de créer et envoyer un lien de paiement sur le smartphone du client, soit une application à intégrer dans le logiciel de caisse.

Alma travaille par ailleurs sur une solution de paiement en plusieurs fois pour les entreprises BtoB. "Sur ce segment, il ne s'agit pas de cibler les grandes entreprises comme Bouygues ou Lafarge qui utilisent déjà des tas d'outils comme l'affacturage. Nous voulons plutôt faire du 'B to small B', pour toucher des entreprises dont les clients ressemblent à des clients finaux. Par exemple, une entreprise qui vend des pièces détachées de moto à des garages", illustre Louis Chatriot.

4 000 clients fin 2020

Grâce à ce nouveau produit, Alma entend élargir son portefeuille clients déjà composé de 1 000 marchands, en ligne et en magasin. "On ne s'attendait pas à ce que le besoin soit si fort", s'étonne Louis Chatriot, qui vise plus de 4 000 clients fin 2020. En revanche, pas question de s'adresser aux gros marchands comme la Fnac, Conforama ou Ikea, qui utilisent déjà les solutions de paiement en trois ou quatre fois des acteurs historiques (Banque Casino, Cetelem, Oney...). "Ils font très bien leur travail", sur les gros marchands, reconnaît le dirigeant. Alma ne peut pas s'aligner sur les tarifs de ces grands acteurs qui proposent des taux bas (entre 0,5 et 2%). Elle prélève de son côté 1,55% de commission sur la transaction des paiements fractionnés avec frais (pour le client final), et 3,8% pour un service sans frais dans le cas où le marchand prend tout en charge.

Cette levée de fonds va aussi permettre à la jeune pousse de se faire connaître. Depuis son lancement, Alma n'a pas fait de marketing mais a bénéficié des nombreuses recommandations de ses clients. "Il va être temps pour nous de prendre la parole, faire du marketing, des adwords, faire parler de nous sur les réseaux sociaux, créer des meet-up…", énumère Louis Chatriot.

Autre objectif affiché : décrocher un agrément d'établissement de paiement. Actuellement, la fintech repose sur un modèle de rachat de créances et dépend d'un acteur régulé, comme les fintech Qonto, Lydia et consorts qui s'érigent en agents de paiement via Treezor. De son côté, Alma utilise La Parisienne Assurances pour assurer les créances. Elle va également demander un agrément de société de financement qui lui permettra de proposer des solutions de crédit allant au-delà du quatre fois. Elle espère les obtenir d'ici la fin de l'année. Pour accompagner tous ces projets, la start-up a prévu de recruter une trentaine de personnes en 2020. Son effectif compte 17 personnes aujourd'hui.

En revanche, pas de projet à l'international. "La France est un marché colossal dans le retail. Rien que dans l'e-commerce, il y a 200 000 marchands. On a tellement à faire", fait remarquer Louis Chatriot. "On est très peu sur le marché des paiement en plusieurs fois, on a donc le temps", ajoute-t-il. Mais Alma ne ferme pas non plus la porte à une opportunité à l'étranger. "Nos plus gros marchands nous pousseront hors de France. C'est comme ça que Stripe a grossi", rappelle le dirigeant. Le prestataire de paiement américain est aujourd'hui présent dans 40 pays dans le monde et a atteint les 35 milliards de dollars de valorisation.