Aria, la fintech qui offre un salaire fixe aux freelances

Aria, la fintech qui offre un salaire fixe aux freelances La start-up, qui ouvre progressivement son service depuis le 15 avril, revendique déjà 1 000 clients. Elle vient d'obtenir l'autorisation d'octroyer des prêts garantis par l'Etat.

Les freelances sont particulièrement touchés par la crise. Sans salaire fixe, avec une activité qui dépend du dynamise économique, ils n'ont en plus pas le droit à tous les mécanismes mis en place par l'Etat et beaucoup n'arrivent pas à obtenir de prêts garantis par l'Etat. Mais les indépendants sont aussi touchés par une crise qui dure depuis des années : la fluctuation de leurs revenus. Certains mois peuvent être très bons tandis que d'autres non. Pour mettre fin à ce problème, la start-up Aria permet aux freelances de toucher un revenu mensuel fixe. Depuis le 15 avril 2020, la fintech ouvre progressivement son service à ses 5 000 préinscrits. A ce jour, plus de 1 000 indépendants utilisent son application.  

Comment Aria détermine le revenu fixe d'un freelance ? Quand un utilisateur s'inscrit, il indique ce qu'il pense gagner sur les prochains mois. Aria détermine ensuite une rémunération fixe dans le temps, sorte de moyenne, soit sur un mois soit toutes les deux semaines (elle prévoit d'ajouter de l'IA afin d'être encore plus précise). La fintech met à disposition du freelance un compte (opéré par Mangopay) sur lequel il recevra ses revenus. "Au bout de deux ou trois semaines, nous regardons ce qu'il a sur le compte. S'il n'a pas atteint le revenu fixe défini, nous lui faisons une avance, qu'il remboursera les mois suivants. S'il a gagné plus, il peut soit verser le montant total de sa rémunération sur son compte bancaire soit laisser l'argent sur son compte Aria", explique Clément Carrier, cofondateur d'Aria, lui-même ancien freelance. 

Ne pas endetter le freelance 

La jeune pousse peut avancer jusqu'à 45% du revenu mensuel de l'indépendant. Par conséquent, le risque financier n'est pas mince. "Par exemple, un livreur Deliveroo reçoit un paiement toutes les deux semaines de la part de la plateforme. S'il lui manque 200 euros, nous lui avançons. Si le mois suivant, nous lui prêtons 400 et 600 euros, nous aurons un warning et nous étudierons la situation. Nous suivons de très près le risque", rassure Clément Carrier, qui précise que l'analyse de risque est réalisée par la start-up spécialisée Algoan. A ce jour, Aria assure que le taux de défaut sur les avances réalisées s'élève à moins de 1%. 

Aria assure que le taux de défaut sur les avances réalisées s'élève à moins de 1% 

Pour verser les avances, Aria a obtenu un agrément d'Intermédiaire en financement participatif (IFP) qui lui permet de récolter de l'argent auprès d'investisseurs particuliers pour le prêter aux freelances, comme peut le faire une plateforme de crowdlending. "Pour l'instant, nous contactons des business angels, ce qui est suffisant. Le ticket minimum s'élève à 15 000 euros", indique le dirigeant. "Le statut d'IFP permet de démarrer notre activité mais ce n'est pas scalable. Nous avançons sur plusieurs pistes pour pouvoir prêter au-delà d'un million d'euros", ajoute-t-il.  

Du recouvrement et de l'assurance à la facture

Côté business model, Aria ne prélève pas d'intérêt mais un abonnement mensuel allant de 2,90 à 14,90 euros, en fonction du montant de l'avance. Si un freelance a besoin d'une avance plus importante, il change d'abonnement. Chaque formule comprend aussi des fonctionnalités complémentaires comme l'épargne automatique de l'Urssaf et la TVA. 

Aria propose également un service de recouvrement de factures. Elle automatise les mails de relance pour la phase amiable et a recours à un partenaire pour les cas de recouvrement judiciaire. La tarification n'a pas encore été définie mais il s'agira probablement d'un prélèvement de "quelques euros par facture", d'après le dirigeant. Autre service proposé par la fintech : l'assurance contre les retards de paiement, en partenariat avec La Parisienne Assurances. A l'échéance de la facture, si le freelance n'a pas reçu de paiement de son client, il pourra recevoir 90% de la somme de la facture puis Aria se chargera de la relance. Si l'argent est récupéré, Aria verse les 10% restant. Elle prélève une commission à la facture allant de 1 à 5%. 

"Aria n'a pas vocation à devenir une nouvelle néobanque avec une carte bancaire"

Enfin, la start-up se prépare à proposer des crédits allant jusqu'à 50 000 euros. Elle cherche actuellement des partenaires car elle ne souhaite pas octroyer elle-même les crédits (d'autant que c'est contraignant d'un point de vue réglementaire). En revanche, elle est déjà habilitée à octroyer des Prêts garantis par l'Etat et s'apprête à lancer une offre pour les indépendants. 

Concurrent de Shine et Qonto ?  

Avec toutes ces fonctionnalités, on pourrait croire qu'Aria souhaite marcher sur les plate-bandes des néobanques pour professionnels comme Shine (spécialisée dans les freelances) et Qonto. "Aria n'a pas vocation à devenir une nouvelle néobanque avec une carte bancaire", balaie Clément Carrier. "Tout d'abord, il commence à y avoir beaucoup de néobanques pour les professionnels. Ensuite, nous sommes compatibles avec des Shine et Qonto. On pourrait même leur vendre certaines briques", complète-t-il. Les néobanques pour pro font parfois le choix de plugger des services externes ou bien de construire leurs propres offres en interne. 

Aria vise entre 10 et 15 000 utilisateurs d'ici fin 2020. Elle cible les indépendants qui ne gagnent pas de "gros revenus", selon Clément Carrier. "Pas un développeur web qui touche 8 000 euros par mois", illustre-t-il. Parmi ses 1 000 premiers clients, elle compte majoritairement des livreurs et chauffeurs ainsi que des freelances web. Pour élargir sa cible, elle s'associe à des plateformes spécialisées comme Stuart et Brigad (hôtellerie-restauration) ou encore dans le diagnostic immobilier.  

Pour financer son développement, la jeune société de six salariés espère lever entre 1 et 1,5 million d'euros fin 2020. Jusqu'ici, elle a réalisé une levée de fonds de 300 000 euros auprès de business angels et a remporté le prix Innov'up de la région Île-de-France d'une valeur de 100 000 euros.