Anne-Manuèle Hébert (Pollutec) "L'IoT doit se situer sur l'ensemble de la chaîne de la gestion de l'eau"

Le salon Pollutec se tiendra du 10 au 13 octobre prochain à Lyon. A cette occasion, sa nouvelle directrice Anne-Manuèle Hébert revient pour le JDN sur les enjeux liés à l'eau et au rôle de l'IoT.

Anne-Manuèle Hébert, directrice du salon Pollutec. © Alice Prenat pour le studio Portrait Madame

JDN. L'eau sera une thématique forte lors du salon Pollutec, organisé pour la 35e année à Lyon. Comment les technologies peuvent-être avoir un impact sur sa gestion ?

Anne-Manuèle Hébert. L'un des enjeux majeurs dans l'eau concerne les fuites. 80% d'entre elles sont invisibles, car elles sont situées dans les canalisations enfouies. Le rôle de l'IoT et de l'IA est de les rendre visibles (des entreprises comme ACWA Robotics ou Fluidion présenteront leurs solutions pendant le salon, ndlr). Au-delà des fuites d'eau, on ne peut plus imaginer fonctionner sans digitalisation et sans outil IoT. Les objets connectés représentent un élément fort de prise de décision, pour déterminer quand utiliser la ressource, pour quels usages, en quelle quantité, etc. L'IoT doit donc se situer sur l'ensemble de la chaîne de la gestion de l'eau. Mais la technologie ne suffit pas, il faut aussi repenser nos modes de consommation, penser à l'économie circulaire et à la recyclabilité.

Qu'avez-vous prévu pour cette édition afin de souligner ces enjeux ?

Le Water Hub est une nouveauté pour laquelle nous voulons rendre visible les problématiques dans l'eau : il s'agira d'un espace de 200 m² dédié à la sensibilisation sur le fonctionnement des réseaux d'alimentation en eau potable, mettant en situation la reproduction d'un réseau réel que nos partenaires (le média Monreseaudeau.fr, l'Office international de l'eau OiEau et le distributeur Christaud, ndlr) reconstruiront tous les jours de A à Z pour en expliquer le fonctionnement, en montrer les innovations et souligner les enjeux liés à la sobriété hydrique ou aux fuites. Il y aura notamment un espace smart water. Nous mettrons par ailleurs en avant dans un espace scénarisé les 12 innovations nominées à nos Pollutec Innovation Awards, dont trois seront récompensées. Dans ces candidatures, nous avons pu observer l'essor de l'IA dans les solutions.

La sensibilisation contre les fuites d'eau est récurrente. Y-a-t-il une problématique sur l'eau peu connue des acteurs ?

L'eau est une ressource complexe qui se raréfie. Elle se retrouve au cœur de conflits de partage, une notion très importante mais peu prise en compte dans l'industrie. Par exemple, l'agriculture est souvent mise en avant pour sa consommation d'eau mais de nouveaux usages, comme la production d'hydrogène, sont aussi très consommateurs d'eau. Il faut ainsi comprendre les enjeux de chacun et trouver comment gérer ce conflit entre la raréfaction de la ressource et l'augmentation de la production d'hydrogène. Nous accueillerons notamment Jean-Luc Fugit, président du Conseil supérieur de l'énergie, pour en discuter lors d'une table-ronde.

Qu'en est-il du rôle des smart city ?

Les élus, qui représentent 20% de notre public, sont confrontés au quotidien à des problématiques liées au changement climatique, à l'artificialisation des sols ou à la pollution de l'eau. C'est à eux de trouver le bon mix technologique et le bon investissement pour répondre aux défis. Le programme leur sera dédié le mercredi 11 octobre, tandis que la formation et l'emploi seront mis en avant le vendredi 13, la technologie ne pouvant être déployée sans les bonnes compétences. Pour les engager et les inciter à appliquer de bonnes pratiques, nous animerons des ateliers expliquant comment remettre de la biodiversité en ville, organiser la gestion des biodéchets et leur valorisation, améliorer la qualité de l'air, diminuer la facture énergétique ou encore prévenir des risques environnementaux et industriels.

Le Plan Eau du gouvernement, qui a pour objectif de réaliser 10% d'économies d'eau d'ici à 2030, mentionne la réutilisation des eaux usées traitées. Mais ce qui bloque, c'est la réglementation, pas la technologie. Nous mettrons en avant ce qui se fait à l'étranger, notamment en Suisse, pour faire évoluer les usages des collectivités. L'Italie est le pays invité cette année, cette distinction lui permettra de présenter à la communauté internationale son écosystème en matière de solutions environnementales et de gestion du littoral.

Comment a évolué le salon Pollutec depuis sa création ?

Le salon européen des solutions environnementales Pollutec a été créé il y a 45 ans pour mettre en avant les solutions technologiques destinées à réduire la pollution. Depuis, le contexte a changé et il ne se passe plus une journée sans que l'on ne parle dans les médias de l'environnement, via la décarbonation de l'industrie, les ressources, la météo, etc. Pollutec a évolué avec ce contexte et présente des solutions dans onze domaines, dont la gestion de l'eau, l'efficacité énergétique ou encore la ville durable. L'objectif est d'avoir une approche systémique des problèmes environnementaux, en présentant des solutions qui permettent d'en comprendre l'origine, l'impact, les enjeux, etc. Cette édition 2023, la 43e édition et la 35e qui se tient à Lyon du 10 au 13 octobre, rassemblera plus de 2 000 exposants et prévoit plus de 50 000 visiteurs, dont 80% d'industriels. Les prochaines réflexions porteront sur l'engagement du grand public pour déterminer comment faire passer le message et encourager une prise de conscience individuelle.

Anne-Manuèle Hébert rejoint le groupe RX en mai 2022 en tant que directrice de division. A ce titre, elle a pour mission le développement de la division Environnement & Energies, en parallèle de la direction du salon Pollutec. Anne-Manuèle Hébert est diplômée de l'INALCO (spécialité Asie du Sud) et de l'IAE (gestion, finance et management) et a travaillé dans de nombreux secteurs tels que la mode, la musique, les composites ou même l'influence, dans des fonctions de direction marketing, direction commerciale et direction de BU.