Comment la désinformation se répand et comment l'arrêter ?

Chaque jour, de fausses informations sont créées et partagées avec, parfois, l'intention de tromper. Mais même si ce n'est pas toujours le cas, la désinformation peut avoir des effets néfastes. C'est particulièrement vrai lorsqu'il s'agit de sujets graves comme la pandémie de Covid-19 ou les récentes élections américaines.

C'est précisément en ces temps d'incertitude et de tension que notre besoin de recevoir les informations les plus récentes est le plus grand. Malheureusement, il peut être difficile de déterminer si elles sont correctes étant donné la quantité d’informations auxquelles nous sommes confrontés quotidiennement. Alors, que peut-on faire pour lutter contre la désinformation ? Et comment se fait-il qu'elle se répande aussi largement ?

Désinformation et intox, quelle est la différence ? 

Si la désinformation n’est pas un phénomène nouveau en soi, elle a explosé avec l’essor des nouvelles technologies et des réseaux sociaux. Pour la combattre, il est nécessaire de comprendre la différence entre “intox” et “désinformation”. Si ces termes désignent des informations qui sont factuellement inexactes, la Commission Européenne définit l’intox comme étant “une information que celui ou celle qui la partage croit vraie”. Tandis que la désinformation est une “information fausse ou trompeuse, créée, présentée et disséminée pour le profit ou tromper intentionnellement le public”. Et c’est justement là que se pose le problème de la désinformation. 

Il est presque impossible de mesurer le nombre d’informations erronées diffusées pour tromper délibérément les autres. Des études ont démontré que les Européens sont confrontés à la désinformation plus de 29 milliards de fois par an, 75% d’entre eux y sont confrontés au moins une fois par semaine et 37% le sont quotidiennement. Le problème ne réside pas uniquement dans le fait que les gens soient “mal informés”, la désinformation coûte à l’économie mondiale environ 78 milliards de dollars chaque année et, dans les pires des cas, elle menace la démocratie

Malheureusement, il est difficile de l’arrêter, les fausses informations se répandent plus rapidement et largement que les vraies. Preuve qu’il s’agit d’un phénomène complexe, des personnalités publiques, des médias et même des entités politiques peuvent être trompés. Cependant, il est indéniable que les plateformes en ligne, en particulier les réseaux sociaux qui reposent sur la curation algorithmique et le micro ciblage de contenus, sont des caisses de résonance amplifiant la désinformation.  

Le rôle des médias sociaux...

Notre réseau social est constitué de personnes que l’on connaît (directement ou indirectement) ou de marques/entreprises ou autres groupes que l’on aime et suit. Sur la base de ces informations et d’autres données personnelles collectées en dehors du réseau social, l’algorithme de la plateforme détermine ce qui pourrait nous intéresser et nous recommande des contenus similaires (contenus, publicités ou groupes). Chaque fois que nous acceptons lesdites recommandations, nous confirmons les hypothèses de l’algorithme et indiquons que nous souhaitons en recevoir davantage. Malheureusement, cela peut également impliquer des informations erronées. Et à moins de consommer d’autres médias pour avoir des opinions plus diverses, il se peut que nous ne remarquions même pas le piège. De plus, avec le temps, l’exposition à des contenus tendancieux peut nous inciter à être plus ouverts à ce type d’informations ou théories car les humains ont tendance à croire ce qu’ils ont déjà entendu à plusieurs reprises. C’est ce que l’on appelle l’effet de vérité illusoire. 

L’algorithme joue également un rôle important en matière de désinformation car il permet à des tiers de cibler les internautes afin de les influencer. Il peut s’agir de toutes sortes de contenus, des publicités mais aussi d’informations pouvant être racistes, homophobes ou encore extrémistes. 

Après tout cela, on peut penser qu’il sera plus facile de repérer un contenu destiné à nous influencer. Si cela peut parfois être le cas, la réalité est plus complexe car l’algorithme qui nous alimente de recommandations ne changera pas du jour au lendemain. Le processus est si lent qu’il ne se remarque même pas et malheureusement, les humains sont plus ouverts à croire ce qui confirme leurs croyances. C’est ce que l’on appelle le biais de confirmation. 

Existe-t-il un remède ? 

Il n’existe pas de solution miracle à la désinformation et s’il existe, le remède doit être aussi complet et dynamique que le problème lui-même. C’est la raison pour laquelle il faut y aller étape par étape. Tout d’abord, cela passe par faire la différence entre ce qui peut être réalisé par chaque individu et ce qui exige une action des plateformes ou de nos dirigeants. 

Au niveau individuel, les internautes ont plusieurs options. Cela implique de vérifier la crédibilité de la source des informations ou la présence d’une couverture similaire dans d’autres médias. Ils peuvent également, via la recherche d’images inversées, trouver si elles n’ont pas déjà été utilisées auparavant ou encore en suivant ces quelques conseils utiles. 

Toutefois, la charge ne doit pas reposer uniquement sur les épaules des individus. Les plateformes, telles que Facebook, doivent contribuer à améliorer l’écosystème en étant plus transparentes et en permettant aux chercheurs d’étudier comment la désinformation se répand en ligne, notamment via les algorithmes et les pratiques publicitaires. En outre, les plateformes doivent prendre davantage de responsabilités en ce qui concerne la manière dont leurs services peuvent involontairement amplifier la désinformation et être utilisés à mauvais escient pour le faire. Facebook et Twitter ont déjà pris des mesures importantes pour empêcher la diffusion de la désinformation sur les élections américaines sur leurs plateformes. Mais sans mesures plus significatives, notamment en matière de transparence systémique, il n'y aura pas assez de résultats.

Enfin, plus près de nous, les législateurs européens doivent profiter des prochaines réglementations pour se concentrer sur la question de l’amplification et du micro ciblage qui alimentent la désinformation. Le Digital Services Act (DSA) est un premier pas. Nous devons saisir cette opportunité pour un meilleur Internet et une meilleure société !