LaCollection, une success story du Web3 français

LaCollection, une success story du Web3 français La start-up lancée en plein confinement continue de séduire les musées du monde entier et s'ouvre de nouveaux horizons.

En découvrant l'exposition de l'artiste Robert Alice qui se tient jusqu'au 22 octobre à La Monnaie de Paris, Jean-Sébastien Beaucamps a pu mesurer le chemin parcouru en un peu plus de deux ans. LaCollection, la start-up Web3 qu'il a fondée en janvier 2021, a en effet produit l'évènement, à l'occasion duquel un artiste NFT a pour la première fois l'honneur d'exposer dans la plus ancienne institution monétaire du monde.

LaCollection, née en plein confinement

LaCollection est une plateforme d'art, qui joue également un rôle de curation, d'éducation et de soutien envers les institutions et les artistes. Elle a noué des partenariats avec le British Museum, le Musée de la Monnaie, le Grand Palais immersif, le Museum of Fine arts de Boston et le Leopold Museum en Autriche. Et elle travaille avec un nombre grandissant d'artistes contemporains. 

Son histoire commence en janvier 2021, alors que la France s'apprête à enchaîner son troisième confinement, et que les musées sont fermés au public depuis de longs mois. Jean-Sébastien Beaucamps commence alors à imaginer un projet qui ressemblait alors à un pari un peu fou. "Avant, j'allais dans les musées et galeries au moins une fois par semaine", explique-t-il. "Avec le confinement, j'ai ressenti un manque, et j'ai pris conscience de l'impact de l'art sur le bien-être et la santé mentale. J'ai alors réfléchi à des manières de pouvoir profiter de la culture, même quand les institutions sont fermées".

Jean-Sébastien Beaucamps, qui avait eu l'occasion de s'intéresser à la blockchain dans le cadre de ses activités professionnelles - il a notamment géré la cellule VC de Sodexo - suit alors de près l'émergence des NFT. Mais il n'est pas convaincu par les plateformes existantes. "Il n'y avait pas d'approche curatrice aboutie", regrette-t-il. "Opensea est une simple marketplace, avec des dessins d'enfants placés à côté d'oeuvres d'art numérique d'artistes connus".

L'idée de LaCollection est née en partie de cette insatisfaction, et de la volonté de travailler avec les musées pour présenter des oeuvres de qualité. "L'idée était de construire du contenu qui ait du sens", explique Jean-Sébastien Beaucamps. Audacieux, il contacte différents musées, via LinkedIn. Et c'est le British Museum, l'un des musées les plus prestigieux de la planète, qui sera le premier à répondre positivement. Ce, alors que la plupart des musées n'ont alors jamais entendu le mot NFT. Pour ce premier projet, l'idée est de compléter une exposition consacrée à Hokusaï en exposant sous format NFT à la fois la centaine d'oeuvres mise en avant par l'exposition, mais aussi toutes celles détenues par le musée et destinées à rester dans les réserves.

LaCollection propose donc de présenter sous format NFT des oeuvres rarement, voire jamais exposées, comme elle le fera plus tard lors d'une collaboration avec le Museum of Fine arts de Boston. Le projet avait abouti en août 2022 à une exposition de reproductions numériques à Giverny de pastels de Renoir, Monet et Manet. "Ce sont des oeuvres pastel très fragiles, jamais exposées", explique Jean-Sebastien Beaucamps. "Nous avons voulu les mettre en avant en les rendant accessibles au plus grand nombre". Les fonds récoltés ont servi à la rénovation d'une peinture de Degas, exposée dans la foulée au musée d'Orsay.

La collaboration avec le British Museum suscite des réactions très positives et va rapidement donner naissance à d'autres collaborations : le Leopold Museum en Autriche, et des institutions françaises prestigieuses, comme le Grand Palais Immersif et le Musée de la Monnaie.

Rapprocher institutions, artistes et Web3

La véritable mission de LaCollection est de rapprocher des acteurs et des communautés qui ne se parlaient pas jusqu'alors. Il s'agit en effet d'éduquer les institutions sur le sujet de la blockchain et des NFT, et de faire découvrir cette technologie au public en proposant des manières simplifiées de collectionner leurs premières oeuvres numériques, notamment le paiement par carte bleue et un wallet ne nécessitant qu'un mail. Un autre aspect de la proposition de La Collection est également de permettre à des artistes issus du monde de l'art digital et des NFT d'exposer dans des institutions prestigieuses, et de contribuer ainsi à faire entrer la blockchain dans l'Histoire de l'Art.

Aujourd'hui, Jean-Sebastien Beaucamps dresse un bilan très positif. "Quelque part, on a éduqué le marché", explique-t-il. "Il y a de la part des institutions comme des collectionneurs une volonté d'explorer les cas d'usages du Web3."

Le succès de la proposition de LaCollection s'explique également par le fait qu'elle répond à un besoin majeur de la part des institutions muséales : attirer un public plus jeune et plus international. Actuellement, la moyenne d'âge des collectionneurs de NFT est d'environ 30 ans. Et LaCollection a rapidement attiré des utilisateurs du monde entier, représentant près de 150 nationalités.

De nouveaux domaines artistiques

Cet intérêt de la part des musées comme des collectionneurs ne semble pas devoir diminuer. "Concernant l'art digital, comme dans tout secteur émergent qui commence a s'affirmer, il y a des acteurs traditionnels qui commencent a valider ce marché", explique Jean-Sébastien Beaucamps, qui estime qu'une nouvelle page de l'histoire de l'art est en train de s'écrire sous nos yeux.

"Comme toujours, cela commence avec une majorité de détracteurs", explique-t-il. "Cela a été le cas des impressionnistes au début, ou même de la photographie. L'art a toujours eu besoin de nouvelles vagues de collectionneurs qui soutiennent les artistes à l'origine de nouveaux mouvements". L'acquisition de NFT par le Centre Pompidou en février dernier, une première pour une institution de ce type, constitue à ses yeux un signe de l'adoption à venir. "C'est un message très fort", estime-t-il.

Dans les mois à venir, LaCollection va poursuivre son développement en explorant davantage de domaines artistiques, au sens large. De nouveaux projets dans la photographie, après des collaborations avec l'AFP et le photographe Reza, ainsi que dans la BD, avec les éditeurs Dupuis et Calmann-Levy, ou encore dans la littérature, avec une version NFT augmentée du prochain roman de Michael Connelly, sont prévues.