Déconfinons l'épargne pour construire le monde d'après !

Alors que les Français sont forcés d'épargner lors du confinement, il faudrait pour relancer l'économie à l'issue du confinement que les ménages préfèrent consommer plutôt qu'épargner. Bien fléchée, l'épargne pourrait aussi servir à bâtir le monde d'après.

2,7 milliards d’euros. La collecte mensuelle du Livret A a fait un bond spectaculaire en mars 2020 en doublant par rapport à février, établissant un record depuis 2009. En période de crise économique les livrets réglementés restent un refuge pour l’épargne des ménages. Toutefois la crise sanitaire et bientôt économique du Covid-19 pourrait nous mener sur un chemin différent.  

L’institut d’étude économique de Sciences Po OFCE estime la perte d’activités en France à 120 milliards d’euros sur les huit semaines de confinement, à mettre en relation avec l’impact du confinement et l’arrêt d’un certain nombre d’activités commerciales (secteur de la restauration, du tourisme, etc…). L’OFCE relève également la constitution d’une épargne forcée de 50 milliards d’euros sur la même période, en ligne avec la collecte record du Livret A. L’expression “épargne forcée” est une terminologie intéressante et qui pointe la différence entre la crise actuelle et les crises économiques cycliques comme celles de 2008 ou des années 2000, qui relevaient de l’explosion de bulles spéculatives.

Si les ménages épargnent c’est qu’ils y sont forcés. Le confinement les prive de la consommation de certains biens et services. Ceci a des conséquences dramatiques pour certains acteurs, et les mesures de chômage partiel sont à ce titre salutaires, même si elles ne permettent pas de protéger les indépendants qui sont touchés de plein fouet. 

Se pose alors la question cruciale de la relance économique dans un monde post-confinement. Qu’adviendra-t-il de cette épargne forcée ? Il faut espérer que la consommation des ménages rebondira franchement, limitant ainsi l’impact social de la crise. L’épargne constituée lors du confinement pourra alors soutenir ce regain de consommation. A ce jour, les économistes ne privilégient pas ce scénario et prévoient plutôt une reprise lente de l’activité comme on l’observe en Chine. Il est vrai aussi que les ménages français ont désépargné sur la période 2009-2018, et il serait logique qu’ils arbitrent aujourd’hui en faveur de placements d’épargne pour se reconstituer un matelas, comme la tendance 2019 semblerait déjà l’indiquer. 

Dans ce cas, il est nécessaire que cette épargne soit mobilisée pour construire le monde d’après que chacun appelle de ses vœux, en l’orientant notamment vers les projets locaux de transition énergétique. Ces projets permettent d’améliorer la résilience de notre approvisionnement énergétique tout en irriguant les territoires de nouvelles activités et de revenus complémentaires, vitaux pour le maintien du tissu local. La volatilité des marchés financiers et l’incertitude économique à court et moyen terme ne favorisent pas les placements boursiers, et ce d’autant plus que les dividendes seront réduits si non pour des raisons économiques, au moins pour des raisons morales et politiques. Les placements dans le non-coté peuvent offrir une alternative d’investissement attractive pour répondre à cet enjeu de traçabilité des investissements vers des projets vertueux et locaux, ancrés dans l’économie réelle et adossés à des actifs tangibles, sans nécessairement transiger d’ailleurs sur la rémunération. Ces placements permettent surtout les investissements dont notre économie a besoin pour repartir de l’avant, dans la bonne direction. Il semblerait que les ménages soient en tous cas en demande de tels produits.