Les grandes marketplaces face au casse-tête des bonnes pratiques

Les grandes marketplaces face au casse-tête des bonnes pratiques Au 1er janvier 2019, les places de marché de plus de 5 millions de visiteurs uniques devront diffuser en ligne un guide des bonnes pratiques à destinations des cyberacheteurs.

Les places de marché les plus fréquentées ont du pain sur la planche. Au 1er janvier 2019, celles de plus de 5 millions de visiteurs uniques devront élaborer et diffuser en ligne un guide des bonnes pratiques, pour dévoiler leurs process aux cyberacheteurs. L'objectif : renforcer la clarté, la transparence et la loyauté des informations transmises aux consommateurs. Il s'agit du dernier volet instauré par l'article 50 de la loi pour une République numérique mis en application par le décret n°2017-1435 du 29 septembre 2017.

Sont concernés tous les sites de mises en relation des biens, services et contenus proposés par des tiers. Par exemple, les cybermarchands qui détiennent une place de marché complémentaire à leur activité propre comme Amazon, Cdiscount ou Fnac. Autres cas : les pures places de marché comme eBay, Booking ou PriceMinister. Les comparateurs de prix ne sont pas épargnés non plus.

Suite à la diffusion des guides, la DGCCRF pourra procéder à des enquêtes

Cependant, encore faudrait-t-il que cette nouvelle obligation soit claire pour les marchands. "La première difficulté demeure le seuil de connexion de 5 millions de VU à partir duquel il faut créer ce guide. Cette notion de visiteur unique n'est pas juridiquement établie et cette mesure n'est fournie que par un seul institut", commence Marc Lolivier, délégué général de la Fevad. C'est-à-dire Médiamétrie. Avec son panel représentatif, cet organisme privé serait donc l'alpha et l'oméga d'une nouvelle obligation légale. Les e-commerçants seront-ils obligés de s'inscrire pour savoir s'ils sont ou non en dessous du seuil ? "La loi n'a pas vocation à obliger à souscrire au service d'une entreprise", rappelle Marc Lolivier.

Des discussions sont en cours entre les professionnels du secteur et la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), afin de résoudre cette problématique. Pour guider ses adhérents, la Fevad défend notamment un système d'équivalence entre le nombre de VU tel que défini par Médiamétrie et les audiences que les marchands comptabilisent sur leur site, qui sont souvent plus importantes notamment en raison des bots. Contactée par le JDN, la DGCCRF n'a pas souhaité répondre à nos questions.

Des bonnes conduites à définir

"Aujourd'hui, nous travaillons à référencer les bonnes pratiques en matière de transparence. Notre objectif : déterminer une charte modèle qui guidera tous les opérateurs de place de marché", continue Marc Lolivier. Voici quelques exemples que contiendrait cette charte : les bonnes pratiques pour répondre aux utilisateurs, comment bien présenter l'information en ligne ou que prévoir en matière de conditions générales.

L'objectif : renforcer la transparence et la loyauté des informations transmises aux consommateurs

De nombreux e-commerçants ont déjà élaboré par le passé des chartes éthiques. D'où l'idée de faire un benchmark à partir de celles déjà existantes, affirme la Fevad. Par exemple, Cdiscount a élaboré "un guide des bonnes pratiques" à destination des vendeurs tiers. De quoi fournir des pistes de réflexion pour construire une charte pour les consommateurs. Celle de Cdiscount rappelle par exemple aux marchands :

  • Les bonnes pratiques en matière de relation avec les clients : apporter la bonne information sur la place de marché, renseigner et mettre à jour les fiches de produits, détailler son profil de vendeurs ou encore afficher des prix TTC.
  • Les exigences de sécurité des produits et santé des consommateurs: fournir les informations sur la traçabilité, identifier les règles de sécurité applicables aux produits vendus, indiquer l'identité du fabriquant ou avertir sur les risques inhérents à son utilisation.
  • Les bonnes pratiques anti-contrefaçons : vérifier l'authenticité d'un produit notamment.

Suite à la diffusion des guides par les marchands, la DGCCRF pourra procéder à des enquêtes afin d'évaluer les pratiques des opérateurs de plateforme en la matière. Un pouvoir qui surprend les professionnels du secteur. "Ce texte est un ovni. D'ordinaire, l'autorité administrative de contrôle donne uniquement des avis sur les chartes éthiques. Ici, elle pourra réellement contrôler", regrette Marc Lolivier.

Un projet de règlement européen à venir

Un nouveau texte devrait bientôt sortir des tuyaux de l'Union européenne. Il s'agit du règlement PtoB, comme "plateforme to business", dont le JDN a obtenu une version non finalisée. Dans son article 13, ce projet de règlement défend notamment l'obligation d'élaborer un code de conduite pour les plateformes en ligne. Dès lors, P2B pourrait modifier l'obligation de créer un guide des bonnes pratiques instaurée par la loi française. Susceptible encore d'évoluer, ce texte sera en principe publié par la Commission européenne en avril 2018. Il devra ensuite être validé par le Parlement européen et le Conseil européen. Après son entrée en vigueur, les entreprises auront un délai de six mois pour se mettre en ordre de marche.