Meta Verified for Businesses, une offre intéressante pour les petits retailers
Meta Verified for Businesses. C'est le nom de l'abonnement de Meta pour les entreprises annoncé le 19 septembre 2023 et actuellement en test en Nouvelle Zélande, en Australie et au Canada. Pour un coût mensuel de 20,79 euros par réseau social (ou 33 euros/mois pour un abonnement groupé), les commerçants peuvent obtenir le badge bleu de certification ainsi qu'une protection contre l'usurpation d'identité et une assistance pour la gestion du compte professionnel. "Meta a axé le message sur la certification, mais quand on regarde l'offre, c'est surtout de la monétisation de services", soulève Camille Poisson, consultante en marketing digital.
La certification des comptes entreprises sur les applications Meta est déjà attribuée gratuitement aux commerçants avec une certaine notoriété. Si le géant américain indique que le badge bleu "renforce la confiance des clients", aujourd'hui aucun chiffre ne montre un plus fort engagement des utilisateurs auprès des comptes certifiés. "Pour les retailers déjà installés sur leur secteur, le badge n'a pas d'impact sur le consommateur", affirme Vincent Chevalier, PDG et fondateur d'Impulse Analytics. "Assez peu d'utilisateurs font attention au badge bleu, ils regardent surtout la cohérence du contenu vis-à-vis de leurs attentes, explique Camille Poisson. Le phénomène est différent de ce que l'on voit sur la certification des créateurs de contenus, beaucoup plus victimes d'usurpation d'identité".
Le badge bleu devrait également protéger les comptes contre l'usurpation d'identité selon la communication de Meta. Mais ici encore l'intérêt n'est pas évident pour Isabelle Mathieu, experte social media et auteure du blog emarketinglicious : "Les marques les plus susceptibles d'être impersonifiées sont les grandes entreprises et elles ont déjà leur badge. De leurs côtés, les petites entreprises sont beaucoup moins concernées par ce problème d'usurpation d'identité".
Une meilleure assistance pour les petits comptes
"La proposition de valeur principale de l'abonnement est un accès facilité à l'assistance client", souligne Vincent Chevalier. Comme sur toute application, les problèmes techniques d'accès au compte et de gestion de ce dernier sont fréquents. Seuls les grands distributeurs comme Zara ou Adidas, avec un gros budget publicitaire, ont des gestionnaires de compte. "Quand on est un petit commerçant, c'est un véritable dédale pour contacter Meta suite à des problèmes de comptes bloqués ou hackés", poursuit le PDG de Impulse Analytics. "Avec cet abonnement, Meta propose aux entreprises de résoudre les incidents techniques sur leur compte Facebook ou Instagram. C'est en ça que l'offre répond à un vrai enjeu pour les commerçants", confirme Isabelle Mathieu.
Depuis sa création en 2020, le Conseil de surveillance de Meta, organisme indépendant en charge des modérations, a reçu des millions de réclamations de la part des utilisateurs quant aux difficultés de récupération de comptes. En août 2022, ce dernier avait réclamé au géant de la tech un service client pour une meilleure gestion des problèmes techniques. "Les retours des créateurs de contenus abonnés à Meta Verified à propos de l'assistance client sont positifs", indique Vincent Chevalier. De son côté, Isabelle Mathieu s'interroge quant aux capacités de Meta à mettre en place un service performant : "La mise en place d'une assistance client nécessite des recrutements, or le groupe a réduit ses effectifs. Il y aura-t-il assez de ressources pour, qu'une fois instauré, ce service client soit performant sur le long terme ?". Les vagues de licenciements se sont enchaînées chez Meta durant toute la première partie de l'année 2023. Au total, 10 000 employés ont été remerciés.
Meta est passé à côté de l'enjeu de la visibilité
"L'impact de Meta Verified ne va pas être très important pour les grandes entreprises", analyse Isabelle Mathieu. Pour l'experte en social media, la réelle problématique des commerçants est le nombre d'utilisateurs touchés par les publications, alors même que Facebook et Instagram ne pousse pas le contenu des marques certifiées. "La question à 1 million d'euros était de savoir si, avec cet abonnement, Meta allait faire payer la portée organique (le nombre d'utilisateurs touchés par une publication ndlr)", estime Vincent Chevalier. Le communiqué de présentation de l'offre explique que les comptes certifiés et abonnés apparaîtront plus haut dans les résultats de recherche et qu'un carrousel "Recommanded Meta Verified businesses" s'affichera sur le fil d'actualité des utilisateurs d'Instagram.
Pour Isabelle Mathieu, Mark Zuckerberg est passé à côté de l'enjeu de visibilité des marques : "L'offre de Meta augmentera la portée du compte des commerçants certifiés, mais pas la portée de leurs publications". "Et pourtant, c'est un enjeu clés sachant que seulement 10% des abonnés d'une marque voient ses publications, explique Vincent Chevalier. A l'heure actuelle, la seule solution pour pousser ses publications est la publicité". En termes de stratégie social media, l'important n'est pas le nombre d'abonnés à un compte mais le taux d'engagement. "Il faut passer de mesures de vanité à des mesures de conversion pour réellement observer les résultats business", insiste Isabelle Mathieu. Faire grandir sa communauté est important aux premières étapes de la stratégie réseaux sociaux d'une marque, quand celle-ci est encore en quête de légitimité. "Meta Verified peut permettre aux petites entreprises de développer leur notoriété assez facilement, nuance pour sa part Camille Poisson. Si une marque veut se faire connaître rapidement pour s'imposer sur son segment, l'abonnement peut avoir un intérêt d'un point de vue du référencement".
Une offre évolutive
Meta Verified for Businesses est une offre en test et l'entreprise américaine a précisé qu'elle pourrait la modifier, notamment avec l'ajout d'une fonctionnalité WhatsApp permettant de créer une page personnalisée et un chat pro. Pour Vincent Chevalier, l'ajout de ce service apporterait encore de la valeur à l'offre de Meta.
L'année à venir va marquer un changement du modèle de Meta avec le RGPD et la suppression des cookies tiers au premier trimestre 2024. "La publicité va-t-elle aussi bien se monétiser qu'avant ? C'est une question", confirme le PDG d'Impulse Analytics. Avec la multiplication de ses offres d'abonnements, le géant de la tech tente de diversifier ses sources de revenus alors que ceux-ci proviennent à 90 % de la publicité. Le 30 octobre, Meta a annoncé un abonnement utilisateur pour bénéficier des réseaux Facebook et Instagram sans publicité.