L'AMP est-il condamné ?

L'AMP est-il condamné ? Contraignant techniquement, peu rémunérateur, et désormais lâché par Google lui-même, l'Accelerated Mobile Pages a-t-il encore un intérêt pour les éditeurs ? Trois d'entre eux répondent.

Pensé pour alléger les pages web sur mobile et améliorer le chargement de ces dernières, le format AMP, pour Accelerated Mobile Pages, a été lancé en février 2016, et s'adressait avant tout aux  médias, à qui Google promettait une meilleure mise en avant. Las, après l'annonce de la suppression du pictogramme AMP dans le carrousel d'actualités en juillet 2021, puis la simplification de la gestion des contenus sur Google News en ne poussant plus les résultats AMP dans l'application, les éditeurs peuvent se poser la question de l'intérêt de rester sur ce format. Le JDN a récolté l'avis de trois professionnels du secteur des médias afin d'y voir plus clair.

Des contraintes trop présentes

Si le format AMP est un avantage indéniable pour les utilisateurs, que ce soit pour la rapidité de chargement des pages et l'expérience de lecture plus fluide grâce au nombre de publicités réduit, celui-ci impose aux médias de revoir leur modèle en repartant de (presque) zéro. Emmanuel Alix, directeur digital de L'Equipe, relate son expérience : "Un test a été effectué au tout début d'AMP. Ça rapportait du trafic, effectivement, mais les contraintes publicitaires très fortes nous ont poussé à arrêter ce format." Un affranchissement rendu possible car la performance des articles a été travaillée en amont.

Delphine Binet, responsable SEO du site Leparisien.fr, reste assez mitigée sur l'utilité de l'AMP : "Au début, c'était plutôt intéressant avec le carrousel AMP, car cela permettait de mettre en avant des sites qui n'avaient pas fait le travail d'améliorer leurs performances sur mobile. De fait, ça a pu aider au positionnement, maintenant ce n'est plus le cas." Un début en fanfare pour être réduit au silence quelques années plus tard, donc. C'est également le constat que fait le head of product d'un gros éditeur français, qui souhaite rester anonyme : "On a été un des premiers acteurs à se lancer dessus, c'était une belle opportunité de référencement. Pendant une période, il fallait utiliser l'AMP pour figurer dans les newsbox. Aujourd'hui, on aimerait s'affranchir de l'AMP, pour des raisons de monétisation notamment."

Un format encore utilisé ?

Si certains médias comme l'Equipe se séparent de ce format, il reste encore utilisé : "Pendant longtemps nos articles abonnés n'étaient pas sur AMP. Ça fait très peu de temps qu'on les a, à peine quelques mois", explique Delphine Binet. Néanmoins, ce format tend à reculer au profit des article non AMP. En cause : "L'annonce en mai de la MAJ page expérience, l'augmentation de l'importance des Core Web Vitals, de l'amélioration des performances… Aujourd'hui, on tend vers la fin de l'AMP", d'après la responsable SEO du Parisien. Un avis que partage notre head of product anonyme : "Les Core Web Vitals ont vocation à inciter les sites à améliorer leur webperf. Si les indicateurs Core Web Vitals sont bons, on peut arrêter l'AMP. Après une phase d'expérimentation bien sûr."

L'AMP, un tremplin vers le futur de l'actualité ?

Et si l'AMP n'était qu'une phase ? En un sens, Google prépare la fin de l'AMP avec les Core Web Vitals. "On a beaucoup travaillé sur les Core Web Vitals, on a drastiquement amélioré nos performances", confirme Delphine Binet. "Le but de la création d'AMP, c'était d'avoir des pages qui chargent rapidement et qui ne soient pas trop polluées de pub. De plus en plus de mises à jour récentes de Google vont dans ce sens, comme le page experience update", poursuit-elle.

Ainsi, l'AMP aurait agi comme un déclic pour améliorer l'UX et permettre de faire la transition pour les éditeurs de toutes tailles. "Ça nous a permis de nous préparer à ne plus utiliser AMP si Google déprécie le format", explique Delphine Binet. En attendant que Google prenne une décision sur ce format, le format AMP a déjà rempli ses objectifs.