Ces start-up qui ont fui Paris

Ces start-up qui ont fui Paris Gardant plus ou moins contact avec la capitale, des start-up ont fait le choix d'emmener locaux et équipes à Montpellier, Lyon ou encore Nantes. Retour d'expérience.

Parisiens, vous ne vous voyez pas passer toute votre vie dans la capitale ? Certaines start-up franciliennes ont décidé de ne pas vous perdre de vue en permettant le full remote à coups de forfaits télétravail ou en multipliant les antennes régionales pour vous garder dans leurs effectifs. Parmi elles, Back Market a ouvert un bureau à Bordeaux il y a quatre ans, où se trouve désormais le CEO, et propose d'accompagner tous les collaborateurs qui souhaitent s'y délocaliser. Doctolib a suivi la même trajectoire, en ouvrant son deuxième site national il y a deux ans à Nantes, choisie pour son cadre de vie et la solidité de son écosystème tech notamment. Elle se donne pour objectif d'y atteindre le cap des 750 salariés à l'horizon 2024. D'autres jeunes pousses parisiennes ont totalement sauté le pas, la plupart du temps tôt dans leur développement et sur décision des fondateurs, en fuyant pour une métropole régionale.

Plug in digital a rejoint l'écosystème du jeu vidéo montpellierain

"Un choix de vie familial", confie Francis Ingrand. Le fondateur de Plug in digital, start-up spécialisée dans la distribution et l'édition de jeu vidéo fondée en 2012, et son équipe ont quitté Paris en 2016 pour Montpellier. "Plutôt citadin, je cherchais une ville de taille correcte, permettant de se déplacer assez facilement en train, en avion". Autre atout montpellierain, l'écosystème du jeu vidéo y est très dynamique. "Le prix des bureaux a également joué dans ma décision, c'est de l'argent facilement économisé. Les salaires moyens sont aussi plus bas."

Une décision plus facile à prendre au début de la croissance de la société. "On a pu le faire parce qu'on n'était pas trop nombreux, reconnait Francis Ingrand. Au moment de partir on était cinq ou six. On n'a pas obligé tout le monde à déménager, deux personnes ont dans un premier temps fait le choix de rester et on a gardé un petit bureau à Paris. Aujourd'hui, on est une cinquantaine à Montpellier." Quant aux recrutements, "c'est un peu plus compliqué pour embaucher mais c'est plus facile de fidéliser nos collaborateurs. Il y a moins de concurrence", résume le fondateur.

Indy a fui l'hyper compétitivité du bassin d'emploi parisien

Cette réduction du turn over est ce qui a séduit Indy, fondée en 2016. "Notre projet était de s'inscrire sur le long terme avec les mêmes équipes, ce qui est très important dans la phase d'hyper-croissance", explique Côme Fouques, CEO. La start-up, qui propose aux indépendants une solution comptable dédiée, prend la décision d'échapper à l'hyper compétitivité du marché de l'emploi parisien et de déménager à Lyon en septembre 2018, après sa première levée de fonds. "A l'époque on était cinq et on s'est dit qu'une fois qu'on aurait trente salariés on serait bloqués, se rappelle le CEO. C'était maintenant ou jamais." Le déménagement intervient alors un peu plus tôt que ce qu'ils auraient prévu dans leurs vies personnelles respectives.

Le choix de la ville s'est basé sur ce critère principal : "un bassin d'emploi dynamique du point de vue du logiciel. Sur ce secteur, Lyon se positionne au-dessus des autres métropoles régionales, estime Côme Fouques. Le prix des bureaux et le fait de pouvoir faire l'aller-retour vers la capitale en une journée ont également joué." Malgré avoir été "un peu pénalisés pour le recrutement des profils les plus rares", il a été "plus facile de recruter à Lyon qu'à Paris. Certes le bassin de recrutement est moins grand, mais il y a moins de compétition. Notre pari s'est révélé gagnant et réaliste", se réjouit le fondateur.

Un bémol est à noter cependant. "Parfois, on se sent un peu coupés de l'écosystème parisien et de ses bonnes pratiques et opportunités, reconnait le CEO. A Paris, beaucoup de savoirs informels très précieux se transmettent en rencontrant d'autres entrepreneurs, en assistant à des meet-up. A Lyon, l'écosystème n'est pas du tout aussi dynamique."

Vizity Map a quitté Paris dans une logique de décentralisation

Vizity.map, fondée en 2016, s'est aussi tournée vers Lyon après une phase de développement de son projet : une plateforme de création de cartes interactives. "A l'époque, l'a priori général était 'il faut monter sa start-up à Paris, parce que c'est là que sont le réseau, les incubateurs, l'accompagnement…", se rappelle le fondateur Timothée Lairet.

Sans son équipe, il décide quand même de quitter Paris en 2017 pour Lyon, d'où il est originaire, et fait des allers-retours toutes les semaines en condensant ses rendez-vous sur deux jours. Quand le confinement arrive, la société subit un plan de licenciement économique et quitte ses locaux. Point positif : "Cela a accéléré tous les projets qu'on avait au niveau de la décentralisation", met en avant Timothée Lairet. Une fois la crise sanitaire calmée, la société déménage pour de bon à Lyon en suivant le CEO et s'installe dans un espace de coworking.

"Aujourd'hui, on est quatre à Lyon, un à Paris et un à Aurillac. Quand on ouvre des postes, on dit qu'il y a une équipe à Lyon, mais il est possible de travailler n'importe où. On ne veut pas faire de l'emplacement géographique un frein, défend le fondateur. Et quand il y a des évènements à Paris, on se débrouille pour en bénéficier." Signe de cette transition vers la décentralisation, Timothée Lairet confie prévoir de déménager à Marseille d'ici un an. Est-ce que l'entreprise le suivra ? Ce n'est pas encore prévu, mais Vizity.map n'est en tout cas pas ancrée à Lyon.

"La clé, ce sont les talents", analyse Guillaume Pellegrin, fondateur de Newton Offices, prestataire de coworking, et hôte du podcast Extra-Muros, qui met en avant les réussites d'entreprises hors de la région parisienne. "Avant de se déplacer, les entreprises regardent si d'autres déjà présentes sur des métiers connexes ont formé des gens."

Faguo a déménagé à Nantes, qui correspond davantage à ses valeurs

Invitée du podcast notamment, la marque de vêtements et de chaussures Faguo, fondée en 2009. La boite décide de déménager ses bureaux à Nantes en 2019, pour se rapprocher de la nature, notamment des forêts, s'installer dans des bureaux éco-responsables et pouvoir s'y rendre à vélo. Les fondateurs offrent à l'époque quatre jours de vacances à Nantes à leurs trente collaborateurs, afin qu'ils puissent découvrir la ville avec leurs proches. Un peu moins de la moitié de l'équipe décide de les suivre. Un accompagnement à l'installation leur est proposé et… un vélo offert à l'arrivée.