Loi Chatel dans l'e-commerce : le bilan Toujours un goût amer chez les e-commerçants

"Faire une loi pour rassurer les clients, c'est très intelligent. Faire une loi pour s'assurer qu'il n'y aura pas de dérives, c'est très bien. Mais augmenter nos charges alors que les fautifs sont les FAI et leurs hotlines, nous l'avons dénoncé à l'époque et le regrettons toujours", conclut Gauthier Picquart chez Rue du Commerce. Les fournisseurs d'accès à Internet étant en effet à l'origine de la majorité des plaintes de consommateurs ayant alarmé les pouvoirs publics.

Globalement, les coûts dus à l'application de la loi Chatel chez Rue du Commerce sont en ligne avec ceux que l'e-commerçant avait anticipés. "Cela a eu un impact sur notre compte d'exploitation et notre résultat a été dégradé, c'est certain. Cela ne s'est pas forcément répercuté sur les prix de vente, mais cela représente autant d'argent non réinvesti au service des clients." Gauthier Picquart constate par ailleurs que la qualité du service client dans l'e-commerce s'est beaucoup dégradée ces dernières années. "C'est inévitable en cas de délocalisation des centres d'appels. Pour notre part, comme nous n'avons pas délocalisé, nos coûts en la matière sont très élevés."

A l'entrée en vigueur de la loi Chatel il y a deux ans, la Fevad estimait à 80 millions d'euros le coût annuel de son application pour le secteur. Aujourd'hui, elle se demande à quel point ces mesures ont pu entraver la croissance de l'e-commerce. "Le secteur est porté par une vraie dynamique. Il est par ailleurs hyper-concurrentiel et à l'écoute des clients : les sites marchands savent que leur confiance est importante. Certes, la loi Chatel a sans doute eu un impact bénéfique en matière de confiance. Mais le taux de satisfaction lors d'un achat en ligne est resté extrêmement élevé ces six derniers mois : entre 96 % et 98 %. Et sans la loi Chatel, le secteur se serait peut-être encore mieux porté." Marc Lolivier ajoute être bien conscient que la résistance de l'e-commerce à la crise a étonné tout le monde. Ce qui n'a pas empêché ces mesures de peser sur la rentabilité des sites, peut-être davantage que sur la progression de leur chiffre d'affaires. "Nous avons vécu cette loi comme une occasion manquée, alors qu'elle aurait pu être portée par les professionnels du secteur, conclut-il. Pour faire une loi adaptée, il est bon de les écouter."

L'UFC Que Choisir se montre pour sa part satisfaite. "Les différentes mesures sont bien appliquées par les e-commerçants, juge Nicolas Godfroy. Nous rencontrons toujours quelques problèmes mais avec le support de la loi, il nous est désormais facile d'attaquer. Et finalement, les marchands n'ont pas augmenté leurs prix comme ils menaçaient de le faire : il y a trop de concurrence pour qu'ils puissent se le permettre"