La collaboration technologique public-privé : un atout de croissance majeur

Il faut favoriser la collaboration entre public et privé pour que la mission de service public de l’État bénéficie des technologies développées par les entreprises et que l’économie en soit stimulée.

Dans un contexte de déficit public, passer des partenariats avec des acteurs privés est d’abord un moyen pour l’État de ne se résoudre à privatiser complètement certains services. Mais, au-delà d’une stratégie d’économie, la collaboration dans le domaine de l’innovation technologique apporte un certain nombre de bénéfices à l’État, aux entreprises et, plus largement, au fonctionnement des institutions démocratiques.

La concurrence entre public et privé, un non-sens

Une idée pourtant encore courante voudrait que le public et le privé se fassent concurrence. Il s’agit d’un non-sens. Les deux secteurs n’ayant pas la même vocation. Outre ses fonctions régaliennes, l’État a en effet pour rôle premier d’assurer une mission de service public. Certes, ce rôle peut impliquer la fourniture de biens et de services en cas de carence du privé. Mais, comme statué par le Conseil d’État, hors ce cas précis l’État n’a pas à s’immiscer dans le commerce. Il s’agit, non seulement d’une mauvaise manière de dépenser l’argent public, mais également de refaire moins efficacement ce que le privé fait déjà.

Fondamentalement, l’innovation ne peut en effet venir que du secteur privé. L’État a sa mission à remplir à l’égard de ses citoyens et la continuité comme priorité. Il n’est donc pas soumis au même impératif d’efficacité et de rentabilité que les entreprises. Celles-ci pensent consommateurs, parts de marché à conquérir et, stimulées par la concurrence, sont continuellement incitées à améliorer leurs offres.

L’efficacité du privé au service de l’État

L’intelligence consiste donc, au contraire, à faire collaborer public et privé pour tirer le meilleur des deux mondes. C’est un fait, les entreprises sont plus efficaces que l’État : elles prennent des décisions plus rapides et s’adaptent mieux aux attentes des consommateurs, voire les anticipent. Entreprendre un partenariat avec une entreprise permet à l’État de bénéficier de cette efficacité, pour déléguer la réalisation d’une solution tout en contrôlant les conditions de son exploitation, afin de veiller à la façon dont les citoyens vont en bénéficier. L’entreprise, dont la rémunération dépendra du succès de son produit, aura d’ailleurs tout intérêt à rechercher la satisfaction des utilisateurs en proposant la meilleure solution possible.

Pour l’État, toujours en quête de rationalisation, s’associer est d’abord une stratégie de réduction des dépenses publiques, en confiant l’investissement initial à un tiers puis en bénéficiant d’une remise sur le prix de la technologique qu’il aura aidé à mettre en œuvre. Mais, plus encore, la collaboration comporte un effet vertueux pour la société entière, en dynamisant l’économie. L’entreprise qui aura développé une technologie pour l’État pourra en effet la revendre sur d’autres marchés — là où, si l’État l’avait développé, il l’aurait gardé pour son seul usage.

Licornes européennes

Historiquement, l’héritage français est celui d’un État administrateur, qui remonte au colbertisme. S’il faut être fier d’avoir un État fort, qui protège ses citoyens, l’excès d’interventionnisme doit être réfréné pour ne pas empiéter sur l’initiative privée. Outre le risque d’étouffer le dynamisme économique, dans un contexte de concurrence technologique mondiale, voir la France à la traîne de pays plus libéraux pose un enjeu de souveraineté. Les entreprises françaises sont aujourd’hui soumises à la concurrence d’entreprises étrangères aux méthodes pirates : non-respect des droits des utilisateurs, soumission à des gouvernements autoritaires... Face à cette menace, l’État doit poursuivre ses efforts pour faire de la collaboration avec le privé un atout de souveraineté et de préservation des institutions démocratiques.

Collaborer avec les entreprises et les aider à développer leurs technologies est le meilleur moyen de les aider à croître au-delà des frontières, pour créer une offre européenne. Car un défi qui dépasse les frontières nationales requiert une réponse d’envergure continentale : il faut créer des licornes européennes, pour faire face aux appétits des GAFAM et de la Chine, et offrir une alternative technologique soucieuse du respect des lois et libertés individuelles aux 500 millions de citoyens européens.

Par souci de préserver la pluralité des acteurs sur le marché - condition sine qua non au jeu de la concurrence - il importe, enfin, que ces partenariats ne soient pas uniquement passés entre la puissance publique et de grandes entreprises. De par leurs tailles, celles-ci souffrent bien souvent des mêmes lenteurs que l’État lui-même. Il faut oser miser sur de petites structures et de jeunes pousses dynamiques pour favoriser l’émergence de nouveaux acteurs et bénéficier de leur capacité d’innovation.