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ENTREPRISE
 
28/09/2005

Le casse-tête des seniors pour les entreprises

Avec l'allongement de la durée de vie professionnelle, les entreprises doivent désormais savoir offrir un rôle à leurs seniors. Une petite révolution.
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 Insee
 TNS Sofres
 OCDE

Les baby-boomers, désormais papy-boomers, resteront encore quelques années au bureau. Il est grand temps pour les entreprises de savoir ce qu'elles vont leur proposer. Comment gérer ses seniors ? Comment les motiver sans se ruiner ? La question de l'activité et du rôle des seniors en entreprise est cruciale. Aujourd'hui, seulement 34 % des salariés français entre 55 et 64 ans sont actifs alors que la moyenne européenne est de 51 %. Le chômage des 50-60 ans touche 400.000 personnes dont 90.000 cadres, selon le cabinet de recrutement Boyden interim executive.

Depuis 2003 et la loi Fillon, les salariés doivent comptabiliser 40 annuités de travail pour toucher une retraite à taux plein et voient donc la durée de leur vie professionnelle s'allonger. "Alors que les cadres se préparaient dès leurs 50 ans à la retraite, ils doivent maintenant raisonner pour rester quatre à cinq ans de plus", explique Gérard Fournier, directeur général de Boyden interim executive, co-auteur de Manager les quinquas (Editions d'Organisation, 2004). Les entreprises se doivent d'employer au mieux leurs salariés jusqu'à 62 ans, soit 200.000 personnes de plus par an en France. Les PME aux structures légères et aux finances limitées vont sans doute éprouver des difficultés par manque de souplesse.

Une problématique pour les huit prochaines années"

Gérard Fournier, Boyden executive

Pour l'entreprise, l'enjeu est d'avoir les personnes à la bonne place avec les bonnes compétences. Cela nécessite un travail important en amont, une démarche personnelle du senior et une restructuration du service RH. Un long chantier qui s'annonce. Selon deux enquêtes TNS Sofres effectuées en 2004, les deux tiers des DRH contre un tiers seulement des cadres jugent l'attention de leur entreprise sur la gestion des âges suffisante. Pour 82 % des DRH, contre 34 % des cadres, elle n'emploie pas les compétences de chaque génération de manière optimale. "Les opérationnels se rendent mieux compte des problématiques terrain de la gestion des âges", note Brigitte Guénard, directrice associée du cabinet César consulting, cabinet spécialisé dans la mobilisation des acteurs autour des projets difficiles.

La question qui se pose est de savoir s'il faut traiter tout le monde de la même manière ou bien ajuster des solutions suivant les âges, c'est-à-dire suivant les contraintes et les envies. En effet, celles-ci sont totalement différentes à 30 ans ou à 55 ans. Selon Gérard Fournier, 40 % des bons contributeurs souhaitent partir avant 60 ans et 20 % de la population senior touchée par les restructurations et les bouleversements technologiques est dépassée.

Dans les grands groupes, les bilans de compétences voire les bilans de vie se multiplient, au cours desquels les salariés sont amenés à préciser leurs choix de "fin de carrière" à trois, cinq et dix ans. Le problème pour le senior en question est qu'il lui faut accepter de changer de poste ou de métier, s'adapter, et souvent changer de salaire. Or, c'est le regard des autres, dans la société, qui compte le plus important, avant le salaire. "Boyden executive interim permet aux cadres d'effectuer des missions temporaires, intervient Gérard Fournier. C'est l'esprit de contribution qui prime, le statut les intéresse beaucoup moins. Ce type de mission auraient été refusé par le cadre dans sa propre entreprise car comprise comme une sorte de dégradation au regard des autres." Une des solutions qui semble s'imposer reste une reconversion temporaire ou non, dans le conseil interne ou externe, qui permet au senior de transmettre ses connaissances et son expérience (voir l'encadré).

Evolution du nombre de personnes âgées de 60 à 64 ans
(source : Insee, 2005)
1995
2.912.957
2000
2.707.432
2005 (provisoire)
2.657.542

Quant aux perspectives à plus ou moins long terme, elles indiquent deux choses. Une augmentation du nombre de seniors actifs, mais une diminution du nombre de personnes âgées de 60 à 64 ans selon l'Insee. Selon l'OCDE, nous nous acheminons vers un vieillissement et une baisse de la population active. La France pourrait compter un salarié de plus de 50 ans sur quatre en 2010 contre un sur cinq aujourd'hui.

"Les problématiques de gestion des seniors devraient surtout toucher les huit prochaines années, la tranche des 48-55 ans actuelle", constate Gérard Fournier. Ceux qui ont entre 48 et 55 ans ont une logique de départ avant 60 ans alors que les moins de 45 ans ont intégré le fait qu'ils sont obligés de travailler pour atteindre 40 annuités. Sur les six à huit années à venir, vont partir en retraite 220.000 personnes en plus, dont 50.000 cadres qui ont plus de 55 ans actuellement. "En France, nous connaissons le plus faible taux d'occupation des salariés entre 55 et 60 ans à seulement 37 %. Parallèlement, le taux de chômage des jeunes est de 22 %, le plus fort en Europe. Il n'y a donc pas de relation entre le départ des seniors et le recrutement des jeunes."

En savoir +

Nombre de cadres actuellement ont un rôle au niveau de la cohésion sociale. Les métiers se sont nettement informatisés ces dernières années. "Les postes vont être redéfinis, des jeunes vont être embauchés, conclut Gérard Fournier. Il n'y aura pas de perte de compétence, mais une sorte de mue de l'emploi et du travail."

Le conseil interne comme aide à la mobilité
Les seniors perdent parfois confiance, se sentent dévalorisés et n'arrivent pas à se repositionner dans un poste standard. C'est en partant de ce constat que Brigitte Guénard a créé en 1999 une structure de conseil interne au sein de Thales, avant de reproduire le système dans d'autres entreprises à partir du cabinet de conseil Cesar consulting dont elle est directrice associée depuis 2004.
"Dans cette structure les seniors sont amenés à faire du conseil interne durant 18 à 24 mois, leur permettant ainsi de retrouver une légitimité", explique-t-elle. C'est une structure d'aide à la mobilité par son parcours formateur et le temps de réflexion qu'il induit, voire une reconversion avant la retraite. Les personnes retrouvent confiance en elles, découvrent d'autres métiers et perspectives auxquelles elles n'auraient jamais pensées, se font reconnaître des autres.
Chez Thales plus de cent personnes sont passées par le conseil interne depuis 1999, dont la moitié de plus de 50 ans. Les trois quarts ont retrouvé un poste en interne, et la moitié des personnes en pré-retraite ont monté leur propre cabinet de conseil. "Par exemple, un chef de service achat en province s'est retrouvé sans poste après une restructuration, raconte Brigitte Guénard. La structure de conseil interne lui a trouvé une mission de transition sur un poste en cours de recrutement, à l'origine destiné à un profil plus jeune. La mission de conseil du service technique s'est révélée très attrayante pour le cadre. Finalement le recruteur a préféré le cadre expérimenté, donnant une autre dimension au poste."


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