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EXPERT
 
07/12/2005

Thierry Garby (Avocat)
Gestion des conflits : le procès n'est plus une fatalité

Face à un litige, les entreprises peuvent trouver des solutions plus profitables que le procès. Des techniques existent déjà pour les y aider.
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A lire
Thierry Garby est l'auteur de
"La Gestion des conflits"
(Economica, 2004)
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Dans les entreprises, les litiges sont vus comme des accidents de parcours générant des pertes, des occasions de coûts sans gain réel. Pourtant, une autre approche est possible : il s'agit de transformer les litiges en occasions de profit. Cette transsubstantiation résulte d'un changement d'attitude et de l'utilisation de techniques pointues et efficaces. Les litiges sont des événements normaux des relations d'affaires. L'économie de marché est fondée sur l'échange et la concurrence. Les deux sont conflictogènes : ils opposent les intérêts des parties. Il en est de même dans la relation de travail.

Le dynamisme de l'économie est fondé sur l'opposition des intérêts. Ces énergies contraires créent un mouvement en avant parce que nous espérons dans l'avenir des satisfactions supérieures aux sacrifices que nous consentons. J'accepte de payer le prix en considération de la satisfaction que j'espère recevoir de l'objet acquis (le retour sur investissement), etc. Le litige apparaît lorsque l'avenir n'offre plus de perspective suffisante et que la volonté de l'un empêche celle de l'autre de s'accomplir. La difficulté est de savoir faire cesser le blocage et redonner du dynamisme à la relation.


Il faut savoir amener tous les participants de l'affrontement à la coopération"

Le remède classique consiste à éliminer une des parties par la contrainte institutionnelle (le procès) pour permettre à l'autre d'exercer sa volonté. Cette solution est de moins en moins satisfaisante car son coût énergétique est trop élevé : trop de temps consacré à la résolution, procédure trop longue par rapport au rythme des affaires, coût trop élevé, résultat trop imprévisible, difficultés d'exécution. De plus, le contentieux ne permet pas de faire qu'une partie remplisse son obligation. Il se borne à accorder à l'autre partie une indemnisation qui ne compense qu'en théorie le préjudice subi car on n'a pas obtenu ce dont on avait besoin mais autre chose.

La gestion des conflits consiste à rechercher comment empêcher le litige d'aboutir à de telles pertes, comment obtenir la plus grande satisfaction possible au-delà du blocage. On passe donc d'une philosophie d'élimination de l'adversaire par le droit (j'ai raison, il a tort) à une philosophie de coopération avec le partenaire pour résoudre un problème.

Première méthode : la négociation de conflit
Elle impose une véritable formation des intervenants. Il s'agit notamment de cesser de menacer et de proclamer son bon droit sans pour autant s'affaiblir. Il faut non seulement savoir négocier positivement mais aussi savoir y amener l'autre partie. Il faut savoir apprécier les conséquences d'un défaut d'accord et le moment à partir duquel un accord devient avantageux (et savoir amener l'autre partie à s'en rendre compte également). Il faut savoir amener tous les participants de l'affrontement à la coopération. Ces techniques sont difficiles à mettre en œuvre, surtout lorsque les enjeux sont élevés et/ou les émotions fortes.

Deuxième méthode : la médiation
Lorsque la négociation achoppe, il faut recourir à un tiers qui peut rendre divers services : faciliter la négociation (la médiation), donner un avis sur un point sur lequel achoppe la négociation.

La facilitation consiste à aider les parties à négocier lorsqu'elles n'y parviennent pas seules. Les difficultés peuvent être multiples : les relations entre les parties, un manque d'information, des différences dans les ressentis et/ou les valorisations, un événement extérieur qui oppose les parties ou des intérêts trop divergents. Il est alors difficile de négocier sans avouer sa faiblesse. Un tiers pourra aider les parties à communiquer, il pourra les entendre séparément pour rechercher les solutions acceptables que personne n'ose proposer, il pourra les suggérer comme les siennes propres, il créera une relation de coopération et de confiance permettant d'avancer vers une solution. Cette technique de médiation aboutit à des accords dans 75 % des cas. Elle mérite donc d'être tentée.

Les centres de médiation
Pourtant, lorsque la négociation se durcit, on ne songe pas toujours à la médiation parce qu'on ne sait pas analyser la raison de la difficulté ou parce qu'on n'ose pas la proposer. Les centres de médiation sont là pour aider à réfléchir à la question et peuvent proposer la médiation à la partie adverse.


La négociation peut se bloquer parce que les parties ont des évaluations divergentes"

La négociation peut se bloquer parce que les parties manquent d'information ou parce qu'elles ont des évaluations divergentes. Le tiers peut alors être chargé de donner un avis qui peut être technique ou juridique (par exemple sur l'interprétation du contrat). Cet avis peut n'être qu'une aide à la négociation ou s'imposer aux parties, selon ce qu'elles conviennent. Un tiers peut aussi provisoirement modifier ou compléter le contrat lorsque celui-ci n'a pas prévu un cas de figure. Dans cette procédure (en anglais "adjudication") un tiers décide à très bref délai (un mois) d'une mesure provisoire permettant d'éviter la rupture du contrat et de poursuivre la relation contractuelle.

D'autres méthodes existent : la décision sur dernière offre (DDO) où le tiers choisit une parmi les dernières offres des parties, le "medarb" qui combine médiation et arbitrage etc. Des centres de médiation et d'arbitrage disposent de procédures mettant en œuvre ces techniques : le Centre de médiation et d'arbitrage de Paris (CMAP) propose huit procédures, la Chambre de commerce internationale propose un règlement pour recourir à diverses techniques. Quelques cabinets d'avocats développent une réelle technicité.


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