La pub digitale continue de faire du sur-place au premier semestre

La pub digitale continue de faire du sur-place au premier semestre Le coup de frein observé au deuxième semestre 2022 se poursuit en 2023 avec des recettes en hausse de 5%. L'année devrait finir avec +6%, selon le 30e Observatoire de l'ePub du SRI dévoilé ce mardi 11 juillet.

Le ralentissement du marché de la publicité digitale français se poursuit, avec une hausse de 5% des recettes le premier semestre de l'année comparé au premier semestre de l'année précédent. Ce résultat sort du 30e Observatoire de l'ePub du SRI, réalisé par le cabinet Oliver Wyman, en partenariat avec l'Udecam, rendu public ce mardi 11 juillet. Ce score est beaucoup moins flatteur qu'en 2022, quand les recettes avaient évolué de 15% au premier semestre comparé à la même période de 2021, malgré le début de la guerre en Ukraine.

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Cette perte de vitesse ne surprend personne : c'est la suite logique d'un mouvement amorcé l'année dernière et tout particulièrement au deuxième semestre. Comment mieux performer face au "ralentissement de la croissance dans une période de stagnation économique", comme l'indique textuellement le rapport ? En effet, l'analyse d'Oliver Wyman tient compte d'une conjoncture toujours marquée par l'impact de la guerre en Ukraine sur l'économie mondiale, dont notamment l'inflation qui influe sur le comportement des consommateurs et des annonceurs.

Mais alors que beaucoup misaient sur une reprise digne de ce nom dès le deuxième semestre de cette année, ce rapport vient au contraire confirmer qu'il faudra attendre 2024 avant d'observer un quelconque retour à une accélération plus marquée. Le document maintient en effet sa prévision d'une année 2023 à +6% (contre +10% en 2022) pour le marché publicitaire français, dont les recettes devraient s'élever à 9 milliards d'euros, en tenant compte d'une évolution du PIB français inférieure à 1% et d'un léger réveil des annonceurs au deuxième semestre (par déduction de +7% en S2 comparé à la même période de 2022).

"Dès que cette crise conjoncturelle prendra fin, nous retrouverons une dynamique de croissance à deux chiffres"

Ce réveil au deuxième semestre sera favorisé en France notamment par la coupe du monde de rugby et par les Jeux Olympiques de 2024, événement de nature à donner un second souffle au marché publicitaire. Mais jusqu'à quand ? "Grâce à ces événements sportifs, nous aurons un bon premier semestre 2024 et nous espérons disposer de signaux plus positifs dès le second semestre de cette année. Ceci étant, en dehors de ces événements, la question de fond sur la croissance reste entière : elle devrait rester relativement stable", déclare Jean-Baptiste Rouet, président de la commission digitale de l'Udecam. "Notre marché est dans la moyenne internationale, notre décélération n'est pas très forte (en effet en tenant compte de toutes les prévisions du marché et en les comparant aux principaux pays européens et aux Etats-Unis, comme le fait le rapport, le taux de croissance de la France est dans la moyenne haute, ndlr.)", observe de son côté Sylvia Tassan Toffola, présidente du SRI. "Si vous analysez la situation sur dix ans, notre taux de croissance annuel moyen est de 13% : dès que cette crise conjoncturelle prendra fin, nous retrouverons une dynamique de croissance à deux chiffres", assure-t-elle.

La presse en ligne souffre

Pas de quoi rassurer les éditeurs de presse et sites d'information et entertainment, qui ont vu leurs revenus fondre de 10% ce premier semestre 2023 comparé à la même période de l'année précédente, après une année 2022 à seulement +2%, marquée par un second semestre difficile (-5,6%). "Les sites de news ont un inventaire majoritairement display, leur offre vidéo est très limitée en volume. Or la vidéo est le format qui tracte les investissements publicitaires", explique Jean-Baptiste Rouet. Une analyse nuancée par la présidente du SRI : "Cette baisse est liée à la conjoncture, car les annonceurs se voient obligés de se réfugier sur des logiques de très court terme pour préserver leur ROI. Les éditeurs renforcent leur offre vidéo et ils sont très actifs sur les KPI d'attention et la data : le match n'est pas terminé, les annonceurs reviendront dès que la conjoncture économique sera moins défavorable car ils ont besoin de qualité et de contexte", analyse-t-elle.

Sur le marché du display en effet, seule cette catégorie "édition et info" (qui rassemble une vingtaine de régies de presse nationale, PQR, presse magazine et pure players) a subi une perte, tous les autres enregistrant des hausses : +14% pour la TV (CTV y compris) et la radio ; +7% pour les plateformes de streaming vidéo et audio ; +6% pour la catégorie retail et services (les régies des retailers). A noter ici que les chaînes historiques de la radio et de la TV ont beaucoup mieux performé que les plateformes de streaming. "Qu'un YouTube ou un Spotify performe moins bien qu'une chaîne TV ou une radio historique, cela peut surprendre. L'explication est peut-être à trouver dans un contexte de croissance modérée, où les grands annonceurs tirent profit des accords commerciaux globaux qu'ils ont noués avec les chaînes historiques et qui se font sentir sur le digital", poursuit Jean-Baptiste Rouet.

Toujours dans le segment display, qui au total a évolué de seulement 2% au premier semestre, le format audio a continué de grimper de manière explosive (+39%, ses parts de marché passant de 4% à 5%) et la vidéo de monter (+6%) pour atteindre 50% des recettes du display. A contrario, la bannière classique a continué de perdre du terrain (38% des parts de marché contre 41% il y a un an) et les opérations spéciales ont été également été impactées par la crise : -7% au premier semestre.

Boom de l'affiliation, ralentissement historique du social

L'affiliation et les comparateurs reprennent des couleurs, avec respectivement +9% et +15% au premier semestre de l'année comparé à la même période de l'année précédente, des chiffres qui contrastent avec les résultats moroses observés en 2022 quand les recettes de l'affiliation ont évolué de 5% et celles des comparateurs sont restées stables. L'explication reste la même : en période de crise, les annonceurs se rabattent sur des leviers particulièrement adaptés aux logiques de performance de court terme.

Pas de surprise là encore, malgré la décélération constatée un peu partout, le search, autre levier axé performance par excellence, a évolué de 8% au premier semestre (contre 13% en 2022 comparé à 2021), surtout grâce aux bonnes performances du retail search (+21% en S1 contre 39% sur l'année 2022), qui pèse désormais 16% des recettes du search.

Au total, le retail media demeure un levier à forte attractivité pour les annonceurs, au point que dès la prochaine édition de l'Observatoire il sera traité comme un canal à part entière, au même titre que le display, le search ou le social. Avec +15% le premier semestre de l'année (contre +30% en 2022 comparé à 2021), le retail media affiche une performance de loin supérieure à tous les autres leviers, y compris de celle du search classique hors retail (+5°) et du social, qui lui a enregistré seulement +3% au premier semestre. "Cette forte décélération du social est une première et s'explique sans doute par le fait que les annonceurs de la longue tail, qui assurent 80% des revenus de Meta, TikTok et Snapchat, ont un peu lâché ces plateformes pour se concentrer sur le search, qui est un levier à la performance plus facile à maîtriser", analyse Jean-Baptiste Rouet. Un comportement encore une fois favorisé par la crise économique.

Les moins bonnes performances du social et du search hors retail media n'ébranlent cependant pas les fondamentaux du marché publicitaire en France : comme un peu partout dans le monde, le trio Google-Meta-Amazon continue de capter la majorité des recettes, ici les deux tiers. Leur part du gâteau est passée de 68% à 69% , tandis que la part de tous les autres acteurs réunis (soit plus de 100 acteurs recensés dans le cadre de cette étude) est restée stable. "Cette asymétrie m'interpelle fortement surtout quand vous considérez que 79% des investissements partent chez les acteurs non européens (essentiellement États-Unis et Chine), soit des plateformes nativement dataïsées travaillant en vase clos et proposant du low cost. Les annonceurs se tournent vers ces acteurs alors qu'en face les Européens améliorent constamment leur proposition de valeur (SPO, attention, brand safety, contexte, qualité référentiel carbone…). Notre alternative est beaucoup plus crédible", conclut la présidente du SRI.