Le digital sauve le marché publicitaire de la baisse, mais pour combien de temps encore ?

Le digital sauve le marché publicitaire de la baisse, mais pour combien de temps encore ? Le marché publicitaire français tient bon avec des recettes stables au premier semestre, selon le Bump dévoilé ce mardi. Une résistance essentiellement due au digital, mais dont la croissance ralentit.

Le marché publicitaire français résiste et se stabilise après le ralentissement constaté au premier trimestre, se réjouissent les auteurs du Baromètre unifié du marché publicitaire dévoilé ce mardi par France Pub, l'Irep et Kantar Media. Les recettes publicitaires nettes totales des régies au premier semestre de l'année s'élèvent à 7,739 milliards d'euros, soit +0,2% par rapport au 1er semestre 2022 et un montant 15,3% supérieur au premier semestre 2019 (avant la crise sanitaire). Ces chiffres tiennent compte des recettes offline et online de tous les médias au sens large, historiques et digitaux. Mais la situation est très inégale.

Les perdants : la TV, le courrier et la presse

Si on se limite aux 5 médias traditionnels, c'est-à-dire télévision, cinéma, radio, presse et publicité extérieure, en incluant leurs recettes digitales, le marché est en baisse de 4,2% par rapport au 1er semestre 2022 et il reste encore bien en dessous du niveau du 1er semestre 2019, à -8,6%. A lui seul le secteur de la télévision a perdu 7,7% ce premier semestre comparé au premier semestre de 2022.

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"Nous avions déjà observé ce tassement de la télévision en fin d'année dernière et il se poursuit en 2023, tiré par la baisse des espaces classiques. Seul le digital de la télévision est en hausse, sa part de marché est en forte progression. Multipliée par deux ces cinq dernières années, elle représente déjà 8% des recettes nettes de la télévision au premier semestre", analyse Christine Robert, directrice déléguée de l'Irep. "Le portefeuille d'annonceurs a lui aussi baissé de 7,4%, avec des annonceurs pure players (issus du digital, ndlr) qui ont complètement coupé leurs budgets", précise Florence Doré, directrice marketing France de Kantar Media. Une tendance cependant relativisée par Xavier Guillon, directeur général de France Pub : "La baisse de la télévision observée ce premier semestre est aussi une conséquence d'un effet de base de comparaison défavorable puisque nous avions observé une forte hausse de la télévision au premier semestre 2022. Dans l'ensemble, malgré cette baisse, la télévision reste proche des montants moyens mensuels observés en 2019, autour des 300 millions d'euros."

Les imprimés sans adresse ont poursuivi leur forte tendance baissière liée à la hausse du prix du papier et au recul généralisé de la demande des gros donneurs d'ordre, avec -15,6%. Une perte pas encore compensée par l'explosion du digital (+59,1%). Même tendance à la baisse pour le courrier publicitaire : -9,5%.

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Enfin, la presse a quant à elle vu ses recettes baisser ce premier semestre de 3,4%, digital compris, comparé au premier semestre de l'année dernière, pour atterrir à un niveau de recettes de 17% inférieur à celui observé au premier semestre 2019. "Le seul univers de presse qui progresse ce semestre est la presse gratuite avec +3,1%", précise Christine Robert. Les recettes de la presse gratuite restent cependant très largement en dessous des niveaux de 2019 : -42,5%.

Les gagnants : cinéma, radio, affichage extérieur et, comme toujours, le digital

Du côté des gagnants, le cinéma, qui se redresse en affichant +20,9% comparé à il y a un an, comble progressivement son écart vis-à-vis de l'avant crise sanitaire, toujours de -22,8%. Mais ce sont surtout les leviers digitaux à la performance, adulés par les annonceurs en temps d'inflation, qui affichent leur bonne santé : +21% pour le retail search, +15% pour les comparateurs en ligne, +9% pour l'affiliation et +5% pour le search classique.

Le social évolue quant à lui de 3% 'seulement', la radio affiche +2,3% et rattrape ses volumes d'avant crise sanitaire, le display digital se maintient à +2% et la publicité extérieure, à +1,4%.

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Cumulées, les recettes digitales de la télévision, de la radio et de la presse ont quant à elles évolué de seulement 3,2% ce semestre comparé au premier semestre de l'année dernière. Même si toujours en développement, le digital montre cependant lui aussi une certaine perte de vitesse. "Pris dans sa globalité, le digital reste dynamique mais la progression n'est plus à deux chiffres", précise Christine Robert en citant les chiffres de l'Observatoire de l'ePub. Le digital n'en reste pas moins un important moteur pour ce marché, avec un niveau au premier semestre 2023 de 57,4% supérieur à celui enregistrée avant la crise sanitaire, au premier semestre 2019.

Le marché de la communication en hausse de 1,2% ce premier semestre et de 2% en 2023

Le Bump répertorie également l'ensemble des investissements des annonceurs en communication (médias, mais également événementiel, mécénat, parrainage, relations publiques, etc.), dont le niveau a évolué de 1,2% sur ce premier semestre.

Selon l'étude, les incertitudes économiques et la crise énergétique peuvent expliquer la forte baisse des investissements de communication de l'industrie et du BtoB, à l'exception de l'industrie de base (industries d'extraction des matières premières). Dans le secteur des biens de consommation, les investissements évoluent à un rythme soutenu dans la mode, plus particulièrement grâce au luxe et aux enseignes à petits prix. A noter également le retour de l'industrie automobile et le dynamisme de la grande distribution généraliste. Les protagonistes de la grande distribution comptent sur la publicité pour faire face à la hausse des prix et maintenir leurs parts de marché dans un climat concurrentiel accru.

Le marché de la communication devrait finir l'année avec +2% pour atteindre 33,4 milliards d'euros, un niveau proche de celui observé en 2019 (-1,2%). Dans cet ensemble, le digital retrouvera une croissance modérée, de 4,7% pour finir à 9,4 milliards d'euros. Une prévision qui se base sur les dernières analyses de conjoncture de l'INSEE et de la Banque de France, elles-mêmes moins sombres et permettant d'espérer la stabilisation prochaine de l'inflation et une légère progression du PIB en 2023 (+0,9% en moyenne annuelle).