Comment les scientifiques européens peuvent-ils renverser la tendance à la désinformation ?

L'étude de 3M en collaboration avec Ipsos précise que 42% des Européens estiment que la science est importante dans leur vie quotidienne, ce qui est bien inférieur à la moyenne mondial de 56%.

S’il y a bien eu un moment où l'on pourrait s'attendre à ressentir le plus vivement l'impact quotidien de la science, c'est au cours des 24 derniers mois de pandémie ...

Les flux de recherche sur les vaccins, les masques et les ventilateurs ainsi que leurs effets contre le virus se sont retrouvés au cœur des journaux et des conversations médiatiques, sans parler des statistiques, des taux de contamination et des estimations – des chiffres qui ont pris une importance jamais vue auparavant.

Pourtant, chez 3M, la dernière étude menée en collaboration avec Ipsos précise que seuls 42% des Européens estiment que la science est importante dans leur vie quotidienne, ce qui est bien inférieur à la moyenne mondiale de 56%. Qu'est-ce qui se cache derrière ce faible pourcentage ? Le coupable pourrait bien être la désinformation.

Depuis 24 mois, on assiste à une accélération majeure de la diffusion de la désinformation en Europe. En effet, la loi sur les services numériques de l'UE représente une tentative claire de s'attaquer aux problèmes de la désinformation et des fausses informations. À mesure que des faits non vérifiés circulent, il devient de plus en plus difficile pour les citoyens de savoir à quoi se fier, ce qui engendre la dégradation de la crédibilité des bons faits scientifiques qui sont également partagés.  

L'examen des recherches et des opinions publiques, comme il a été présenté dans Indice de l'Etat de la Science  2022 de 3M en collaboration avec IPSOS, révèle que les "fake news" ne sont pas seulement une intrigue secondaire, mais un déterminisme majeur de la relation de la société avec la science.

Représentant le monde scientifique, nous avons l'opportunité - et même la responsabilité - de devenir des gardiens plus actifs de la bonne science au service de la bonne information.

Une image de la science ternie par la désinformation

Il est peu probable que l'intérêt porté sur notre santé publique et la qualité des soins disparaissent de sitôt. En effet, 80% des Européens reconnaissent aujourd'hui comme une impérieuse nécessité un meilleur accès aux soins et citent ce problème comme la priorité absolue de la société.

Compte tenu de son importance, la question de la santé et de la médecine n’est pas épargnée de la désinformation.  La majorité des Européens reconnaissent cette menace : 57% d'entre eux estimant que de futures crises de santé publique pourraient résulter de la méfiance à l'égard des avis scientifiques.

Outre l'augmentation des crises de santé publique, la majorité des Européens craignent que la désinformation généralisée n'entraîne une aggravation des divisions sociales (57%) et une augmentation de la gravité des effets du changement climatique (52%). C'est un tableau sombre.  

Changement de chaîne

Un indicateur clé de la fiabilité et de la confiance peut être la plateforme par laquelle les informations sont transmises.

L'examen minutieux des médias sociaux comme moyen de communication n'est pas nouveau. Néanmoins, le fait que seulement 31% des Européens font confiance aux faits scientifiques transmis par les médias sociaux, contre 70% pour les médias traditionnels, montre à quel point les médias sociaux sont perçus comme un élément central de la diffusion de la désinformation.

Les médias sociaux permettent aux informations, vraies ou fausses, de circuler à la vitesse de l'éclair et, potentiellement, aux fausses informations de prendre racine auprès d'un large public. Les Européens se méfient des informations diffusées sur les plateformes sociales, principalement parce qu'ils ne savent tout simplement pas ce qui est crédible et ce qui ne l'est pas.

Même en tant qu'experts dans nos domaines, je suis sûr que nous avons tous eu des moments où nous avons lu quelque chose sur les médias sociaux et où nous nous sommes demandé si c'était vrai.

Un collègue m'a récemment fait part d'une méthode conçue pour nous aider tous à évaluer les fausses informations. Elle a été élaborée par un expert en culture numérique et propose une courte liste d'actions permettant de déterminer si une source d'information est crédible. Cette méthode, appelée « SIFT », vous invite à vous arrêter, à enquêter, à trouver et à retracer la source. Pour ma part, je me suis souvenu de cette méthode en parcourant mes flux sociaux et elle s'est avérée utile.

Grâce aux connaissances, aux méthodes et à l'expertise dont nous disposons en tant que communauté, nous avons la possibilité et la responsabilité de contribuer à la sauvegarde de la science.

Il est encourageant de constater qu'une autre conclusion de l'indice de l'Etat de la Science est que près de 80% du public européen souhaite entendre davantage les scientifiques et les chercheurs eux-mêmes. Maintenir et accroître la confiance dans la science peut être un parcours périlleux, mais le moment est venu pour nous d'aller de l'avant et de protéger la vérité. Nous sommes tous les gardiens de la « bonne science » et nous pouvons travailler ensemble pour mettre fin à la désinformation.