Baveux, truandaille, boursemolle...voici les insultes médiévales les plus grossières
Dans la France médiévale, l'insulte trouvait sa source dans la morale, la vie sociale ou la simple observation de la nature humaine. Plus qu'un simple exutoire, elle était le reflet d'un ordre social où l'honneur et la réputation étaient sacrés.
On ne disait pas à son adversaire qu'il était bête sans y mettre les formes. "Baveux", par exemple, sanctionnait le bavard impénitent, le prétentieux à la langue bien pendue, rappelant que la parole incontrôlée menaçait l'ordre moral. "Champi" allait plus loin : il désignait un bâtard, un enfant né hors mariage, parfois issu d'une liaison inavouée entre un religieux et une laïque. L'insulte touchait alors l'individu jusque dans ses origines, ce qui valait condamnation à vie dans une société basée sur l'honneur.
Les statuts sociaux inspiraient aussi des insultes savoureuses. Être traité de "culvert", ce n'était pas seulement être qualifié de paysan, mais d'individu dépendant, astreint à la volonté d'un seigneur. Le mot, venu du latin "collibertus", rabaissait l'autre à une condition jugée inférieure, créant une démarcation sociale.

Certaines insultes puisaient dans l'animalité ou la scatologie. "Pourceau" affublait l'individu d'un caractère porcin, jugé lubrique ou sale. "Chiabrena", littéralement "chiure de merde", attaquait la dignité de l'adversaire. De même, "boursemolle" pointait la lâcheté ou l'impuissance, renvoyant à l'anatomie masculine pour mieux stigmatiser la faiblesse. La créativité ne s'arrêtait pas là : "escouê" signifiait "sans queue" et désignait donc l'impuissant ou le châtré. "Grippeminaud" s'en prenait à l'hypocrite, celui qui minaude et vole en douce.
Le registre religieux, central à l'époque, nourrissait l'art de l'invective. S'attaquer à la lignée d'un adversaire, le traiter de "fils de pendu", c'était lui infliger une double peine : salir sa mémoire et celle de ses ancêtres. Les "ribauds" et "ribaudes", eux, étaient pointés du doigt pour leur débauche, rangés dans la catégorie des fornicateurs ou des filles de joie.
Certains termes avaient une portée collective. "Truandaille" désignait la bande de vauriens, la racaille d'une époque où errer sans titre pouvait valoir l'exclusion. D'autres, comme "faquin" ou "cuistre", ciblaient la malhonnêteté ou la prétention ridicule, montrant que le mépris pouvait aussi se décliner sur le mode de la moquerie.
Au fil des siècles, bon nombre de ces mots se sont éteints, remplacés par des équivalents moins imagés, ou sont restés cantonnés à des registres régionaux. "Baveux", par exemple, a traversé l'Atlantique et se retrouve encore dans le français québécois pour désigner un prétentieux ou un insolent. D'autres, comme "boursemolle" ou "chiabrena", ne survivent que dans les glossaires d'historiens.