Leaders à mission : la nécessaire émergence

D'abord garant de la croissance économique de son organisation, puis plus récemment porteur du sens et des valeurs, le leader doit aujourd'hui se réinventer pour devenir un leader à mission.

Transformation, le nouveau mot « valise » mais au fond de qui et de quoi parle-t-on ?

Les enjeux ESS s’imposent à l’entreprise, de manière de plus en plus bruyante. Le cadre réglementaire évolue, les clients révisent leurs besoins et leurs comportements, la société civile ne laisse rien passer, le travail est en pleine mutation et les nouvelles générations de collaborateurs posent leurs exigences « de vertu » avant même d’être sortis de leurs écoles.

Il n’est plus possible de faire de la demi-mesure, de faire « comme si », ou de surfer sur la vague en instrumentalisant les enjeux ESS. Il ne peut suffire d’organiser le tri des déchets dans les bureaux ou de consacrer une partie des heures des équipes à des projets associatifs. Tout cela est très utile. Mais le sujet n’est plus là. Il ne s’agit pas de faire un peu plus ou un peu moins de ce qu’on faisait jusqu’ici, il s’agit de changer de paradigme en évaluant lucidement ce qu’on peut faire dans son contexte.

Il revient alors à l’entreprise de questionner, puis si besoin de transformer ses activités pour que les impacts directs et indirects de ces activités, soient non pas une seule compensation du négatif, mais deviennent intrinsèquement positifs. Concrètement, que ces activités contribuent à la nécessaire transformation du monde et de la société, compte tenu de l’urgence climatique, et de l’ensemble des enjeux environnementaux, sociaux et sociétaux. Sans (trop) rogner sur ses profits. Une équation bien complexe qui nécessite des leaders matures d’un nouveau type.

A la manette, rien de nouveau…les leaders toutes catégories confondues !

L’entreprise ne peut changer que si ceux qui ont le pouvoir de décision, d’influence et d’action sont moteurs et acteurs. Une évidence simpliste à énoncer, moins facile à mettre en œuvre.

Que les leaders aient conscience des enjeux est important, mais ne suffit pas. Ce qui est nouveau, c’est, qu’afin d’avoir un rayonnement systémique, chacun va devoir non seulement revoir ses représentations, ses modes de management et de pilotage tout en traduisant une conscience en convictions et en une vision concrètement déployée. Et rendre des comptes à tout va…

Nous savons déjà qu’il faut développer le co-leadership et la transversalité. Nous savons que les besoins d’exemplarité et d’alignement des leaders, conditions de la transformation, nécessitent de l’authenticité, de la congruence, et la capacité à donner du sens. Nous savons que pour faire face à l’incertitude et aux paradoxes, il faut des leaders à la fois ancrés et agiles.

Et pourtant combien en comptons-nous dans les organisations de toute taille et tout profil ? Toute la puissance économique de la Nation est concernée, de la TPE aux managers des entreprises du CAC40. Qui se donne les moyens de transformer ses modèles de leadership en profondeur ? Un leadership ouvert au monde, éminemment responsable, mais également acteur, contributeur positif du monde de demain ? Ils se comptent sur les doigts de quelques mains…

Une posture d’équilibriste en proie à des injonctions paradoxales

Les dirigeants devaient jusqu'à présent répondre à deux enjeux : développer et maintenir la croissance économique de l'organisation et incarner le sens et les valeurs de l'entreprise auprès des collaborateurs. Le moment est venu pour ces leaders de porter une troisième "mission" : répondre aux besoins de la Cité dans laquelle s'ancre l'entreprise. 

Porter une telle ambition suppose de concilier son identité de dirigeant, avec celle de citoyen et de membre de la communauté humaine, avec des enjeux et des contraintes qui peuvent apparaître contradictoires. Cela nécessite de l’audace, du courage, de la ténacité. Embarquer les équipes et les parties prenantes de l’entreprise impose de porter soi-même des convictions fortes, une intention claire, une énergie qui trouve sa source dans l’ancrage. Cela est la condition de l’exemplarité.

Le leader doit donc être au clair sur qui il est, sur ses aspirations, sur les forces dont il dispose, tout en ayant conscience de ses vulnérabilités. Sa posture doit être juste pour lui et au sein de l’entreprise qu’il représente. La lucidité face à la complexité, la justesse pour toutes les parties-prenantes des décisions prises et l’engagement volontaire au service de quelque chose de plus grand que soi est la maturité attendue de chaque leader aujourd’hui. Un vrai métier, on vous dit…