Le Black Friday, nouvel enjeu majeur pour les e-commerçants

Le Black Friday, nouvel enjeu majeur pour les e-commerçants Amazon, Carrefour, Cdiscount, Fnac, Groupon et Rakuten racontent le vendredi noir, vu de l'intérieur, entre contraintes et tours de force.

Contrairement à Halloween, le Black Friday s'est bien implanté en France. Ce grand moment de rabais agressifs, importé des Etats-Unis, devrait générer près de 1,3 milliard d'euros de chiffre d'affaires du vendredi 23 novembre au lundi 26 novembre 2018 dans l'Hexagone, selon la Fédération du e-commerce et de la vente à distance (Fevad). Mais que représente cet événement pour les professionnels ? Le JDN a posé la question à quelques mastodontes du retail en France.

"Le Black Friday n'est pas une opération commerciale de déstockage"

Tout d'abord, les grands distributeurs ont intégré cette nouvelle réalité. "Pour nous, le week-end du Black Friday est le plus important de l'année sur le non-alimentaire", commence Elodie Perthuisot, directrice marketing chez Carrefour France. Le seul vendredi noir est devenu la journée record des ventes chez Cdiscount, avec 43 millions d'euros de volume d'affaires en 2017, et la journée la plus intense de l'histoire d'Amazon.fr, avec 2 millions d'unité vendues en 2017. Fnac souhaite de son côté faire du Black Friday 2018 son premier week-end de ventes sur Internet et son deuxième en magasin après Noël. Et côté croissance ? Le chiffre d'affaires du Black Friday double tous les ans chez Rakuten France (ex-PriceMinister).

Afin de réitérer ces succès cette année, distributeurs et marques misent d'abord sur le nombre de références à prix cassés et sur les rabais. Une évidence difficile à atteindre. "Le Black Friday n'est pas une opération commerciale de déstockage. Ce sont vraiment les meilleures ventes du moment, les plus en vues pour Noël, qui doivent bénéficier de remises supplémentaires", explique Fabien Versavau. Par exemple, des Playstation 4, des Nintendo Switch, des iPhone, des smartphones ou les dernières collections de vêtements et de chaussures. La revente à perte n'est pas autorisée, contrairement aux soldes. Voilà pourquoi les remises grimpent rarement au-dessus de 50%.

Le Black Friday 2018 des marchands interrogés par le JDN
  Amazon Carrefour Cdiscount eBay Fnac Groupon Rakuten
Nombre de références en promotion 70 000 Des milliers 2000 en propre, 250 000 au total NC 40 000 8800 520 000
Fourchette de rabais promis NC Jusqu'à 50% Jusqu'à 60% Jusqu'à 50% Entre 15 et 50% Jusqu'à 80% De 15% à 40%

Le Black Friday est histoire d'anticipation. Fnac commence à travailler son vendredi noir six mois en amont. "Chez Carrefour, nous avons porté notre attention sur le niveau d'accueil en magasin afin que nos équipes s'adaptent. Il faut pouvoir maintenir le niveau de service et de satisfaction faces aux affluences attendues", explique Elodie Perthuisot. En ligne aussi, il faut se préparer à d'importantes audiences : le site Cdiscount a atteint des pics à 9 000 visites par minute en 2017 et a adapté en conséquence ses serveurs cette année pour supporter jusqu'à 25 000 visites par minute. Une affluence qui sera de nouveau en grande partie mobile : "Lors du Black Friday 2017, nous sommes monté à 80% de transactions réalisées sur mobile dans le monde", rappelle Etienne Lefort, responsable du département produits chez Groupon France.

Remises supplémentaires et omnicanalité, deux clefs du succès

Beaucoup de marchands font la part belle aux cartes de fidélité lors du vendredi noir pour offrir des remises supplémentaires. A la manière d'un cash-back, il s'agit d'un pourcentage de remises, en argent ou en point, versé sur une carte de fidélité à chaque achat et réutilisable en boutique ou sur Internet plus tard. En ce sens, "Carrefour permet au client d'obtenir 25% de remises sur sa carte de fidélité, du vendredi 23 au dimanche 25 novembre, sur des catégories entières de produits comme les téléviseurs, les smartphones ou les iPhone", promet Elodie Perthuisot. Même son de cloche chez Rakuten France qui mise sur son programme de fidélité pour se différencier. "Le client membre du Rakuten Club bénéficie de remises supplémentaires qui doublent ou triplent par rapport à un client normal", compte Fabien Versavau. Chez ces deux retailers, les intérêts de ces mécanismes sont multiples : stimuler les achats après le Black Friday pour Noël ou encore proposer des rabais très offensifs, sans dépasser le seuil des reventes à perte.

En plus du marketing digital, Carrefour a tiré à plus de 8 millions de catalogues papiers dédiés au Black Friday pour 2018 

La cohérence de l'offre marketing entre tous les canaux reste par ailleurs une nécessité. Chez Carrefour, les prix sont les mêmes en ligne et dans ses 5 600 magasins. Le distributeur mise sur le marketing digital comme sur le traditionnel catalogue papier, tiré à plus de 8 millions d'exemplaires en 2018 pour l'événement. Même les places de marché s'essayent à l'omnicanalité : Rakuten se lance dans le retrait en click and collect dans 150 boutiques de Boulanger pour tous les achats Boulanger réalisés sur Rakuten. "Depuis quelques semaines, nous sommes la première place de marché à faire cela en France. Ce qui permet aux consommateurs de s'affranchir des frais de livraison ", commente Fabien Versavau. Fnac mise aussi sur son réseau physique pour faire la différence via le retrait en magasin (click & collect) dans toute la France.

Et les petits marchands ? "Les TPE et les PME doivent comprendre que le Black Friday est devenu un marronnier incontournable. Avec les fêtes de fin d'année, il représente entre 20 et 25% de leur chiffre d'affaires", explique Alexandre Eruimy, directeur général de Prestashop. Même son de cloche chez Oxatis, une solution e-commerce en mode SaaS e qui accompagne près de 10 000 entreprises. "Nos vingt meilleures TPE et PME françaises vont faire sur le seul vendredi noir l'équivalent de quatre vendredi en ventes. Et plus les marchands sont gros, plus ils réussissent. Imaginez, pour certaines entreprises, cela correspond à une commande toutes les trois minutes pendant trois jours", conclut Marc Schillaci, PDG d'Oxatis.