Philippe Botteri (Accel Partners) "Nous pouvons investir de 100 000 à 80 millions d'euros dans une start-up"

Ayant quitté la Silicon Valley pour rejoindre le bureau britannique d'Accel Partners, Philippe Botteri revient sur la présence et la stratégie d'investissement du fonds en Europe.

JDN. En quoi la mission du bureau britannique d'Accel Partners diffère de l'activité américaine ?

Philippe Botteri. Accel Partners est un fonds international présent dans la Silicon Valley depuis 30 ans, mais nous sommes également présents à New-York, Londres, en Inde et en Chine. A Londres nous disposons de 530 millions de dollars dédiés aux investissements européens. Mais il faut davantage nous considérer comme la présence européenne d'une firme globale. Nous sommes une équipe de 15 investisseurs qui couvre l'Europe au sens large, de l'Irlande à la Russie en passant par Israël. Notre objectif est, entre autres, d'apporter la culture de la Silicon Valley  en Europe. Elle n'existe pas chez les autres acteurs du capital risque européens. Nous sommes également là pour ouvrir des portes aux équipes de management des sociétés de notre portefeuille au niveau international.

Showroomprivé, Shopmium, Comuto... vos investissements en France semblent s'accélérer. Signe d'une maturité du marché ?

La France est un gros marché du venture en Europe. Le pays a réussi à prouver sa capacité à innover dans les services web et mobiles, que ce soit dans le retargeting avec Criteo, l'e-commerce avec Vente-Privée et dans bien d'autres business models comme ceux de Comuto, Smartbox ou Shopmium, dans lequel nous avons investi avec Isai en décembre. Shopmium dispose d'un réel potentiel et voit déjà des copycats apparaître, puisque Prixing s'est récemment repositionné sur le même modèle. Quant à Comuto, la start-up va poursuivre son expansion internationale, qui était un des piliers de sa dernière levée de fonds.

Mais Paris participe à une dynamique remarquée dans toute l'Europe. Des villes comme Berlin, Oslo, Londres, Moscou, Stockholm ou Istanbul sont désormais devenu des places incontournables pour les investisseurs. Le fait qu'il n'y ait qu'une poignée de fonds de capital-risque internationaux en Europe diminue drastiquement la dynamique concurrentielle, ce qui rend les opportunités d'investissement sur le Vieux Continent très intéressantes, avec des retours sur capitaux investis potentiellement supérieurs à ceux des Etats Unis.

Quels sont les secteurs privilégiés d'Accel pour 2012 ?

Aujourd'hui nos thèmes d'investissement se concentrent autour du mobile, des applications mobiles, des nouveaux modèles de l'e-commerce comme Stylistpick, Birchbox ou Showroomprivé. On regarde également tout ce qui concerne les moyens et services de paiement. Nous avons récemment investi dans Peertransfer en Espagne, une start-up qui permet de payer ses frais de scolarité en ligne et aux étudiants étrangers de bénéficier de taux de change avantageux. Et nous regardons évidemment la convergence du secteur du paiement en ligne et mobile, à l'image de Braintree aux Etats-Unis, dans lequel nous avons investi en juin.

Qu'en est-il de vos critères d'investissement ?

Nous faisons à la fois du seed et de l'early stage avec des tickets allant de 100 000 euros à 80 millions d'euros. C'est une souplesse dans nos investissements qui nous permet d'accompagner les sociétés dans leur développement dans la mesure où nous gardons des réserves pour réinvestir dans certaines start-up. Le stade d'investissement dépendra de l'industrie, du secteur et du potentiel de création de valeur d'une start-up. Mais notre principal facteur de différenciation est notre approche "prepared mind" sur nos secteurs, nous permettant de les connaître au mieux avant même de rencontrer des entrepreneurs.

Diplômé d'X et des Mines de Paris, Philippe Botteri débute sa carrière comme manager chez McKinsey en 1998. En 2006, il devient vice-président du fonds Bessemer Venture Partners où il a, entre autres, investi dans Criteo. En juin 2011, il rejoint les bureaux britannique d'Accel Partners. Suite à l'investissement d'Accel Partners en décembre 2011, il devient membre du conseil d'administration de Comuto, l'éditeur de Covoiturage.fr.