Journal du Net > Management >  Patrick Starck (HP France) : L'interview JDM
INTERVIEW
 
janvier 2005

Patrick Starck (HP France)
Une fusion doit être mise en œuvre très rapidement

Trois ans après le rapprochement avec Compaq, le PDG de HP France tire le bilan d'une opération qui a dû marier culture de l'ingénieur et culture commerciale.
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En septembre 2001, HP et Compaq annonçaient leur rapprochement. En mai 2002, l'opération était bouclée. Philippe Starck, actuel PDG de HP a piloté cette fusion en France. Il tire les leçons de la troisième fusion-acquisition de sa carrière. Il revient également sur les grandes qualités d'un dirigeant, son parcours, sa gestion du stress.

Chiffres clés (source HP)
X
Monde
France
Chiffre d'affaires
(en mds d'euros)
61
(2003)
8
(2004)
Effectifs
150.000
5.000

Avec trois années de recul, quel bilan tirez-vous de la fusion entre HP et Compaq ?
Patrick Starck. Trois ans après la fusion, l'entreprise est intégrée et son positionnement est cohérent. Le bilan est très positif. La fusion se justifiait par les besoins de consolidation du secteur. Il nous fallait réaliser des économies d'échelle. Après la fusion HP-Compaq, de nombreuses autres fusions ou acquisitions sont intervenues sur le marché : IBM et PricewaterhouseCoopers en juillet 2002, Veritas et Symantec en décembre 2004), Oracle et People Soft en décembre 2004… La fusion nous a permis d'avoir une longueur d'avance. Notre positionnement sur le marché fait de nous un acteur unique. Sur tous les marchés, nous avons une position stratégique, de premier ou deuxième. Nous avons une vision d'industriel, c'est-à-dire que nous considérons que notre présence sur tous les marchés du traitement numérique de l'information représente un avantage compétitif. Nous sommes le seul acteur de taille mondial présent sur tous les marchés : le grand public, les PME et les grandes entreprises. Cela nous conduit à fabriquer aussi bien des appareils photos numériques que des supercalculateurs pour la modélisation thermonucléaire.

Comment la fusion a-t-elle changé la culture d'entreprise ?
Le corps social de HP provient de trois origines : HP avant la fusion, Compaq et HP après la fusion. Cette fusion a été pilotée au sein d'un culture d'entreprise commune. Les deux entités avaient une culture anglo-saxonne, qui suppose une grande spontanéité de la relation et moins de rigidité dans la hiérarchie. Les deux entités avaient aussi la culture du client. Enfin, tous les acteurs étaient conscients que la culture devait évoluer. Les fondamentaux restent, mais ils changent dans leur expression pour s'adapter aux clients et à la concurrence. Nous avons réussi à marier la culture d'ingénieur qui caractérisait HP, et donc d'innovation technologique, de maîtrise et de conceptualisation des processus, avec la réactivité commerciale et l'efficacité marketing de Compaq.

Quels conseils donneriez-vous à un chef d'entreprise pilotant une fusion ?
Il s'agit de ma troisième intégration, après Tandem en 1997 et Digital en 1998- 1999. Sur un marché qui évolue vite, une fusion doit être mise en œuvre très rapidement. Il n'y a rien de pire que de garder les deux activités en parallèle trop longtemps. La stratégie doit être comprise de tous, pour éviter de prendre du retard sur son marché. L'activité doit continuer. Il faut suivre une stratégie d'intégration claire et la communiquer à ses clients. Chez HP, nous avons réalisé en une année l'intégration juridique et sociale ainsi que la restructuration. Tout a été renégocié. Aujourd'hui, les collaborateurs n'ont qu'un seul statut social.

Quels sont aujourd'hui les grands enjeux sur le plan des ressources humaines pour HP ?
Le principal enjeu de HP consiste à s'assurer du développement des compétences des collaborateurs. Dans les hautes technologies, le marché évolue très vite. Il faut donc être constamment à l'écoute et anticiper les besoins en compétences. Et pour développer les compétences, nous proposons des formations sous forme de cours magistraux et de cours à distance via l'intranet, ce qui offre une plus grande souplesse.


Nous rentrons dans une phase d'investissement"

Dépendez-vous directement de la maison mère ? Quelle est votre marge de manœuvre ?
HP est réparti selon trois grandes régions géographiques : les Amériques, l'Europe, le Moyen-Orient et l'Afrique et, enfin, l'Asie Pacifique. Je réponds donc à la direction Europe. Notre groupe suit une stratégie globale. La ligne de produits se définit au niveau mondial et chaque pays décline ensuite la stratégie.

Quelles sont les perspectives pour le marché de la high-tech en 2005 ?
Les entreprises reprennent les investissements qu'elles avaient arrêtés après la bulle Internet. Depuis fin 2004, nous rentrons dans une phase d'investissement qui se traduira par un retour de la croissance.

Et comment voyez-vous le marché de la high-tech à moyen terme ?
A moyen terme, le marché devrait continuer à connaître une croissance importante. La digitalisation des processus analogiques me paraît très porteuse. Tout processus analogique deviendra numérique. La télévision passe au numérique, ce qui permettra une convergence des technologies. Par ailleurs, on peut aujourd'hui se connecter partout et cela ne fera que s'accentuer. Enfin, tout devient virtuel, ce qui atténue les notions de lieu et de temps.


Dans notre métier, tout part du client"

Quels ont été les moments clés de votre parcours professionnel ?
Après une formation d'ingénieur, j'ai commencé ma carrière chez IBM dans le développement de logiciels. Rapidement, j'ai eu le virus du commerce et suis devenu ingénieur commercial. Après dix ans chez IBM, j'occupais la fonction de directeur du secteur industriel. Compaq m'a ensuite embauché au poste de directeur commercial. En 2000, je suis devenu PDG de Compaq. Au moment de la fusion, j'ai pris la direction du "nouvel" HP.

Est-ce votre expérience commerciale qui vous a permis d'atteindre ce poste ?
Mon expérience commerciale m'a donné le goût du client. Dans notre métier, tout part du client. Cela m'a donc préparé à une fonction de direction.

Quelles sont à vos yeux les principales qualités d'un manager et d'un PDG ?
Dans la culture HP, le goût du travail en équipe est une qualité essentielle. Il faut donc savoir sélectionner une équipe qui fonctionne avec efficacité et donne l'exemple. Les valeurs qui en découlent sont le respect des individus, l'ouverture et l'écoute. Le manager doit aussi faire preuve d'une forte capacité d'adaptation. Le PDG est en plus visionnaire. Son rôle consiste à anticiper les mouvements du marché pour garder un temps d'avance sur la concurrence. Il doit mettre en œuvre la stratégie au sein de toute la structure. Que ce soit dans la finance, le commerce ou le marketing, les salariés doivent tendre vers le même but, avec une même vision du positionnement du groupe. Nous menons des enquêtes d'opinion à ce sujet. La grande majorité des collaborateurs comprennent et adhèrent à la stratégie et savent comment ils y participent. Pour en arriver là, il faut savoir communiquer, autre qualité importante pour un PDG.

Pourriez-vous décrire votre journée de travail type ?
Une journée doit s'équilibrer autour d'une activité tournée vers l'extérieur, avec des visites clientèles pour défendre un dossier ou des visites de suivi, et une activité en interne : amélioration des processus, prise de décision… Il ne faut pas se laisser absorber par l'interne.


Le stress est stimulant"

Quels sont vos horaires ?
J'aime venir travailler tôt, vers 7h45 ou 8h00. Cela me laisse au moins une heure de travail sans téléphone, ni réunion. Le soir, je pars vers 20h-20h30, sans parler des nocturnes exceptionnelles. Après 18h00, je me consacre au débriefing de la journée avec les commerciaux qui rentrent de chez les clients.

Comment gérez-vous le stress ?
Suivant les personnes, le stress agit comme un paralysant ou comme un stimulant. Pour moi, il constitue un stimulant. Il favorise ma créativité et m'aide à surmonter les difficultés. Par ailleurs, pour me vider de cette dose de stress, je fais de la course à pieds. Le stress se gère mieux grâce à l'expérience. Prenons l'exemple de l'escalade. Lors d'une ascension, l'alpiniste est sous stress. Tous ses sens restent en éveil, il fait attention au placement de ses mains et de ses pieds. Ce stress lui permet de monter. Et son expertise l'aide à mieux gérer son stress.

Avez-vous trouvé un équilibre entre vie privée et vie professionnelle ?
Oui, j'ai trouvé un équilibre. J'essaie d'éviter de travailler le week-end, que je consacre à mes enfants.

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Quelles sont vos bonnes résolutions pour 2005 ?
D'un point de vue personnel, je souhaite m'entraîner suffisamment pour être capable de courir un marathon dans de bonnes conditions, c'est-à-dire pour pouvoir ensuite en courir un deuxième ! D'un point de vue professionnel, je recherche la croissance profitable. Je compte saisir toutes les opportunités de croissance.

Parcours
Patrick Starck, 49 ans, est président-directeur général de HP France depuis deux ans. Précédemment, il occupait les fonctions de PDG de Compaq France et vice-président Europe. Basé à Munich, Patrick Starck a occupé les fonctions de vice-président Europe en charge des grands comptes et du réseau de distribution. Avant de rejoindre l'Allemagne, il a travaillé pendant plus de quatre ans au sein de Compaq France (de 1994 à 1998), comme directeur des grands comptes et produits d'informatiques d'entreprise. Patrick Starck a commencé sa carrière chez IBM France où il a occupé successivement pendant dix ans de 1984 à 1994, les postes d'ingénieur développement logiciel, ingénieur commercial grands comptes, chef de département ventes et directeur du secteur industrie. Il est diplômé de l'Ecole supérieure d'électricité (Supélec, 1983).

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