ENTREPRISE
09/02/2005
TMS, la maladie professionnelle du siècle
La première cause de maladie au travail est vieille... comme le tricot. Au début du siècle dernier, elle touchait alors essentiellement les femmes qui effectuaient des mouvements fins et répétitifs pour travailler la laine. Aujourd'hui, cette même maladie a adopté un autre vocable : les TMS ou troubles musculo-squelettiques. Il s'agit d'affections périarticulaires qui concernent tous les tissus mous situées autour des articulations. Des tissus qui souffrent quand les gestes répétitifs se multiplient. Les symptômes les plus courants des TMS sont des douleurs aux poignets, aux épaules et aux coudes, au moindre mouvement ou au moindre effort. Ces troubles, parfois sévères, ont été reconnus maladie professionnelle au milieu des années 80. Aujourd'hui, rien qu'en France et selon les données de la CNAMTS, plus de 20.000 cas de TMS sont détectés chez les salariés chaque année. A eux seuls, les TMS représentent 67 % des maladies professionnelles. Un phénomène qui n'inquiète plus seulement la médecine du travail, mais aussi les entreprises.
"Autrefois, les entreprises avaient tendance à rejeter le problème des TMS sur les salariés en prétendant qu'ils effectuaient mal leurs gestes ou s'exposaient à ces troubles en dehors de leur travail, explique Jean-Yves Catta, président de TEO conseil, un cabinet spécialisé en ergonomie et management d'organisations. Aujourd'hui, les employeurs prennent conscience de la responsabilité de l'entreprise et cherchent à se prémunir de risques financier et juridique." Ce changement d'attitude des entreprises est motivé par un nouveau facteur risque. En matière de TMS, les entreprises craignent désormais un retour de bâton sur le terrain juridique, à l'image du dossier "amiante". En outre, un cas déclaré de TMS peut coûter cher. Selon les chiffres de la Caisse régionale d'assurance maladie Pays de la Loire, un TMS à l'épaule coûte en moyenne 17.000 euros à l'entreprise, sans compter un arrêt de 220 jours. En face, les salariés commencent eux aussi à se préoccuper de ce type de risque. "Dans une usine d'assemblage de luminaires d'une centaine de salariés, 30 % des opérateurs étaient reconnus comme atteints et d'autres se plaignaient de douleurs, explique Jean-Yves Catta. Les salariés ont organisé une grève, uniquement sur ce sujet." Du coup, les syndicats s'emparent du dossier, revendiquant une meilleure prévention.
Entre 1999 et 2002, le nombre de TMS a explosé en passant de 12.000 à 21.000 cas annuels déclarés en France. Cette progression, qui s'explique en partie par une meilleure reconnaissance de la maladie et un meilleur diagnostic, montre que le phénomène est plus profond. "L'essor des troubles musculo-squelettiques résulte aussi de l'organisation actuelle du travail. Les cycles de travail sont de plus en plus courts", note Jean-Yves Catta. Or dans un cycle long, le salarié peut réguler son activité en cas de douleur et répète moins souvent le même geste.
La baisse des temps de pause est également en cause, avec en arrière plan la loi sur les 35 heures. "Les micro-blessures s'accumulent. Or ces micro-blessures peuvent se réparer automatiquement avec des temps de repos aménagés", remarque Jean-Yves Catta. Autre facteur de développement des TMS : le stress, "qui limite les capacités d'anticipation des salariés, augmente la fatigue". Pour l'heure, les cadres, par définition davantage autonomes, restent moins touchés par le phénomène que les ouvriers et les employés. Mais de l'avis des spécialistes, les TMS guettent la population cadre, notamment du fait de l'utilisation quasi-permanente de l'ordinateur, qui provoque des gestes répétitifs, et d'un niveau de stress élevé.
Autant de risques qui poussent certaines entreprises à prendre des mesures préventives face aux TMS. Ces mesures résident généralement dans l'aménagement du poste de travail ou dans l'adaptation du produit en lui même. "Par exemple, le fabricant de luminaires en question envisage de concevoir des lampes avec moins de vis", poursuit Jean-Yves Catta. Autre piste possible : favoriser la polyvalence des employés afin de limiter une exposition prolongée à un même geste.
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