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ENTREPRISE
 
08/02/2006

Alter Eco, l'essor d'une marque à part

Ces trois dernières années, la marque de commerce équitable a décuplé son chiffre d'affaires, tout en étant rentable. Ses atouts ? Sa présence en grande distribution et sa maîtrise des coûts.
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Alter Eco sur le Web
  Le site institutionnel
  Le site de vente en ligne
Alter Eco, la jeune marque de commerce équitable française, démontre que "développement durable" peut rimer avec "rentable". Créée en 1999, cette PME a réussi à multiplier par dix son chiffre d'affaires depuis 2002, pour atteindre 10 millions d'euros en 2005. Rentable depuis 2003, son résultat net a plus que doublé en 2004. Une performance compte tenu de son objet social : promouvoir un commerce alternatif, à l'écart des géants de l'agroalimentaire, qui garantit des conditions de travail et de rémunération décentes aux producteurs des pays en développement. Comment Alter Eco a-t-elle réussi à transformer ce projet socialement ambitieux en une réussite économique ?

A sa création, l'entreprise fait le choix de la distribution spécialisée et ouvre un magasin dédié aux produits du commerce équitable dans le centre de Paris. Mais le chiffre d'affaires ne décolle pas et le loyer grève le budget. Pour Tristan Lecomte, fondateur et président d'Alter Eco, une évidence s'impose : il faut réduire l'offre et augmenter les volumes vendus. Son regard se tourne naturellement vers la grande distribution. Il ferme son magasin parisien et signe en 2002 un contrat d'exclusivité d'un an avec Monoprix. Treize produits équitables font leur apparition dans les rayons thé, chocolat ou sucre de l'enseigne de centre-ville et les consommateurs sont au rendez-vous : entre 2002 et 2003, le chiffre d'affaires de l'entreprise enregistre une croissance de 172 %.

Un chiffre d'affaires multiplié par 10 en 3 ans
(en millions d'euros, source : Alter Eco)


Amortir les frais fixes et développer le réseau de distribution
Pour Tristan Lecomte, "la massification des volumes n'est pas un choix, c'est un impératif". Objectif : amortir les frais fixes élevés auxquels une entreprise de commerce équitable comme Alter Eco doit faire face. En effet, mettre en place des filières d'approvisionnement coûte cher : il faut aller à la rencontre d'organisations de producteurs, réaliser un audit économique, social et environnemental avant de travailler avec elles, former les agriculteurs et les ouvriers, lorsque la transformation se fait sur place, et assurer un suivi de la production. En 2002, ce poste de dépenses représentait 7,7 % du chiffre d'affaires, une part tombée à 5,8 % en 2004. La promotion des ventes (campagnes d'affichage, habillage de gondoles) génère également des coûts fixes qui peuvent être rationalisés : bien que les montants dédiés à ce poste aient été multipliés par plus de quatre entre 2002 et 2004, leur poids dans le chiffre d'affaires est passé de 4,6 % à 3,4 %.

Le commerce équitable est non seulement notre raison d'être mais aussi notre outil de différenciation"

Tristan Lecomte
Mais pour atteindre cet objectif, Monoprix ne suffit pas. Dès 2003, les produits Alter Eco rejoignent les rayons d'autres grands distributeurs : Cora et Match tout d'abord, puis Système U, Leclerc et Carrefour. Des accords ont également été signés avec certains magasins d'autres enseignes (Casino, Atac, Champion, Intermarché...). Avec 70 références, Alter Eco réalise ainsi désormais 7,8 % des ventes de produits labellisés en France.


Limiter le surcoût pour le consommateur final
Ce n'est pas parce que l'on commercialise des produits du commerce équitable et que l'on poursuit un but social que l'on traite plus facilement avec la grande distribution. "Certains de nos interlocuteurs ont un intérêt de départ pour nos produits et nous reçoivent plus facilement. Mais globalement, nous sommes traités comme toute PME et nous devons sans cesse faire nos preuves", témoigne Tristan Lecomte.

Alter Eco en chiffres

Date de création : 1999
Répartition du capital : investisseurs individuels (50,7 %), salariés (8,6 %), fonds (40,7 %)
Chiffre d'affaires : (estimation en 2005) 10 millions d'euros
Résultat net : (en 2004) 30.361 euros
Nombre de références : 70
Nombre de fournisseurs : 26 organisations de producteurs dans 19 pays
Distribution : présent dans 2.500 points de vente

Et faire ses preuves, pour la grande distribution, c'est avant tout vendre. L'augmentation des volumes a notamment permis à l'entreprise de fixer des prix raisonnables pour ses produits. "Nous ne sommes en moyenne que 10 % plus cher que les marques classiques et nous avons même des prix comparables pour certains produits comme les coeurs de palmier, les épices ou le cacao, explique le fondateur. Nous sommes également 20 % moins cher que les marques bio nationales." Le consommateur n'a donc plus obligatoirement besoin de faire de concession sur le prix pour acheter équitable. Le marketing fait le reste.


Communiquer sur l'histoire du produit
"Le commerce équitable est non seulement notre raison d'être mais aussi notre fonds de commerce et notre outil de différenciation", analyse Tristan Lecomte. La stratégie marketing d'Alter Eco découle naturellement de son positionnement : si sa priorité est d'augmenter le prix d'achat payé aux producteurs des pays en développement, c'est également son premier argument marketing. Ses campagnes d'affichage mettent ainsi en avant les retombées positives que l'acte de consommation peut avoir. "Nous nous orientons vers une autre forme de marketing, celui du sens, où l'histoire du produit compte plus que l'imaginaire qui lui est associé", explique le fondateur.

Publicité d'Alter Eco
Le créneau du commerce équitable a de belles années devant lui. Aussi, la concurrence s'intensifie-t-elle. Les marques Malongo et Lobodis viennent côtoyer les produits Alter Eco sur les rayonnages des enseignes de la grande distribution. Pour faire face, la PME a choisi de développer une marque multi-produit : là où ses concurrents proposent du café, du thé ou du chocolat, Alter Eco ajoute les épices, l'huile, le riz et le couscous. Cette diversification devrait se renforcer avec l'introduction de produits plus élaborés dans leur offre. D'autres pistes de développement sont également explorées. Une filiale aux Etats-Unis a ainsi été ouverte en 2004 et les ventes en grande distribution ont commencé il y a six mois. Enfin, Alter Eco teste de nouveaux circuits de distribution en lançant un site de vente en ligne (voir site). Un développement financé par des investisseurs privés (particuliers mais également fonds à caractère éthique) ayant renoncé pour un temps à leurs dividendes.

Les recettes du succès

Le choix de la grande distribution pour augmenter le volume des ventes et accéder au grand public.
Un positionnement comme marque multi-produits.
Un prix qui reste compétitif par rapport aux concurrents classiques.


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