Carrière
RUBRIQUES
ENTREPRISE
07/11/2006
"Seules 5 à 15 % des entreprises sont toujours dans la famille à la troisième génération."
Dans les pays occidentaux, les deux tiers des entreprises sont de nature familiale. Elles participent pour plus de la moitié du PNB. En France, 60 % des 500 plus grandes entreprises sont familiales selon l'Asmep, l'Association des moyennes entreprises patrimoniales fondée par Yvon Gattaz. Les chiffres sont éloquents. Pourtant, lors de la transmission d'une génération à l'autre, seul un tiers restent dans le giron familial. Psychiatre et consultant, Jacques-Antoine Malarewicz décrypte le phénomène dans Affaires de famille, comment les entreprises familiales gèrent leur mutation et leur succession, paru aux Editions Village Mondial. Entretien. Pourquoi avoir choisi ce thème ? Quelle est l'importance des entreprises familiales dans l'économie ? Jacques-Antoine Malarewicz. Les études sur les entreprises familiales sont de nouveau à la mode. Il faut dire qu'entre 2003 et 2013, ce sont près de 500.000 entreprises familiales qui vont changer de mains. Alors on les redécouvre quantitativement et qualitativement, avec leurs atouts et leurs handicaps. En outre, dans les pays émergents, l'Etat n'est pas en mesure de prendre en main les industries. Ce sont donc des entreprises familiales telles que Mittal qui prennent le pouvoir actuellement. Elles ont donc un rôle prépondérant dans le contexte économique actuel.
L'entreprise familiale est un système dont les règles de fonctionnement sont à la fois managériales et familiales, les deux coexistent malgré leurs différences. Elle tient davantage compte de la dimension affective, des relations et de la communication entre les personnes. Les dirigeants et actionnaires sont obligés de s'entendre. Avec sa vision à long terme, voire transgénérationnelle, de la gestion, elle n'hésite pas à réinvestir ses bénéfices dans son développement et affiche souvent une excellente rentabilité. Quelles problématiques un tel système soulève-t-il ? Le problème surgit lorsque la logique du système familial et l'affectif deviennent prépondérants dans le management, constituant un obstacle à la transmission de l'entreprise. Des conflits familiaux peuvent émerger concernant la répartition des rôles et des responsabilités. Souvent, ils poussent la famille à vendre l'entreprise pour cause de désaccord. Plus l'entreprise est ancienne, plus la famille est grande (petits-enfants, parties rapportées...), plus il y a de conflits d'intérêts possibles. C'est une des raisons pour lesquelles seules 5 à 15 % des entreprises sont toujours dans la famille à la troisième génération. Qui sont les successeurs des dirigeants ? Aujourd'hui, le successeur n'est plus forcément le fils ou la fille aînée du dirigeant mais le plus compétent, celui dont les études et le cheminement sont les plus adaptés. Le choix se fait dans un pool familial élargi, voire même le cousin ou la cousine. Si personne ne répond aux exigences du poste, le successeur est choisi à l'extérieur de la famille. Cette tendance à mettre de côté la logique familiale au profit de la compétence est assez nouvelle. L'important au final est de sauvegarder le capital de la famille.
Cela se prépare trois ou quatre ans à l'avance. Au niveau de la famille, une charte doit prévoir le mode d'emploi de la transmission et comment cela se traduit concrètement sur la marche de l'entreprise. Tout doit être envisagé, même l'ouverture sur l'extérieur. L'entreprise peut également faire appel à un professionnel de la transmission, consultant ou notaire, pour les questions financières ou managériales, ou encore aborder des éléments affectifs. Enfin, le dirigeant qui part doit apprendre à lâcher prise, faire confiance à son successeur sans quoi ce dernier pourrait commettre des erreurs. Les gens sont compétents quand on leur fait confiance.
|
Découvrez le nouveau classement Forbes des milliardaires du monde. Lire