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ENTREPRISE
 
05/12/2006

Paul, une chaîne toujours plus gourmande

Une boulangerie familiale qui devient une chaîne internationale de 370 magasins, c'est l'histoire de Paul. Un succès qui tient à sa stratégie d'implantation et une vraie culture de la qualité.
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Avec un chiffre d'affaires de près de 270 millions d'euros en 2005, en hausse de 70 % par rapport à 2001, les boulangeries Paul ont su imposer leur prénom sur le territoire français... et bien au-delà. Le nombre de points de vente à l'étranger a ainsi triplé depuis 2000 et l'on trouve désormais le pain Paul aussi bien à Miami et à Londres qu'à Tokyo. Un parcours remarquable quand on sait qu'il y a cinquante ans, Paul n'était qu'une boulangerie familiale installée à Lille.

Evolution du chiffre d'affaires de Paul (source : société)
Evolution du chiffre d'affaires de Paul


Chez Paul, qualité ne rime pas avec surgelé
L'enseigne Paul, c'est avant tout un concept conciliant les avantages de la boulangerie de quartier et la puissance d'un groupe de taille nationale. Quand il reprend le commerce de son père dans les années 60, Francis Holder décide d'aller à l'encontre du marché, qui privilégie le pain blanc, et revient à des recettes à l'ancienne. C'est aujourd'hui encore le mot d'ordre suivi par l'enseigne, qui produit quelque 150 sortes de pains différents, des rustiques aux spéciaux. Dans la plupart des cas pétris et cuits sur le point de vente, conditions pour obtenir la dénomination de boulangerie, ces pains se distinguent de ceux des chaînes concurrentes, livrés surgelés. Pour capitaliser sur cet atout, l'enseigne décide d'ailleurs d'exposer les fournils à la vue des clients, parfois même en vitrine du magasin. Quand les points de vente sont trop petits pour abriter un atelier de production, c'est le fournil le plus proche qui les approvisionne.

A côté de cette exigence de qualité, qui fait souvent la force des boulangeries de quartier, Paul bénéficie des atouts d'un réseau de près de 300 points de vente sur l'ensemble du territoire français. "Nous pouvons offrir une dynamique produit dont ne peuvent pas disposer les artisans traditionnels, analyse Maxime Holder, fils du fondateur et directeur général du groupe. Même face à des réseaux comme Banette, qui garantissent comme nous une même recette sur l'ensemble du territoire, nous disposons d'une cohérence qu'ils n'ont pas au niveau de la gamme de produits." Sans compter les économies d'échelle en termes d'approvisionnement en matières premières que peut procurer un groupe qui produit plus de 50 millions de pains par jour.

Les magasins Paul se sont habillés de noir dès 1993.Paul a également fortement diversifié son offre au cours du temps. La sandwicherie est ainsi apparue dans les années 80. "L'idée était de rompre avec le marché qui cherchait à se différencier par le contenu du sandwich, se souvient Maxime Holder. Nous avons préféré capitaliser sur la grande variété de pains dont nous disposions." En 1987, enfin, l'enseigne se lance sur un nouveau métier : celui de la restauration hors domicile. Paul crée ainsi ses salons de thé, permettant aux clients de déguster sur place les pâtisseries et sandwiches. Aujourd'hui, l'adossement d'un restaurant à une boulangerie est généralisé : 120 des 200 magasins détenus en propre par le groupe en sont désormais pourvus.


Une enseigne qui soigne ses fréquentations
Second pilier du succès rencontré par Paul : ses emplacements. Au départ, l'enseigne opérait en local, sur l'agglomération de Lille. A partir du commerce familial, Francis Holder crée des magasins satellites et s'implante là où l'on ne s'attend pas à trouver des boulangeries : hors des centres-villes, en particulier dans les centres commerciaux. Ces derniers, en plein essor dans les années 70, accompagnent ainsi le développement de l'enseigne, qui s'étend progressivement à l'ensemble du territoire.

Evolution du nombre de magasins Paul
(source : société)
Evolution du nombre de magasins Paul
Aujourd'hui, l'objectif est toujours le même : poursuivre les implantations dans le centre des grandes villes (plus de 100.000 habitants) mais également leur périphérie, sur des emplacements très fréquentés. Démarché par le groupe de restauration collective Elior, l'enseigne s'attaque ainsi au marché encore peu développé des gares, des aéroports et des aires d'autoroutes. En 1993, le groupe lance le concept de villages Paul : une boulangerie est implantée dans une zone résidentielle peu commerçante en même temps qu'est négociée l'ouverture de cinq ou six autres magasins en franchise (Nicolas, Picard, McDonald's...). On compte aujourd'hui une trentaine de villages de ce type.


Des gérants responsabilisés pour gommer l'image de chaîne
Mais un tel développement ne va pas sans poser des problèmes d'image. "Pendant trente ans, Paul n'était pas reconnu comme une chaîne. Il n'y avait qu'un magasin par ville et le consommateur le percevait comme une boulangerie de quartier. Aujourd'hui, l'image de la chaîne gagne du terrain sur celle de l'artisan", commente le directeur général. Pour atténuer cette évolution, le groupe mise sur la motivation du personnel au niveau des points de vente. Son pari : améliorer le service en rendant les gérants patrons de leur boutique et reproduire ainsi l'expérience client de la boulangerie de quartier.

Aujourd'hui, l'image de la chaîne gagne du terrain sur celle de l'artisan"

Maxime Holder
Maxime Holder, directeur général de Paul
Pour développer l'entreprenariat, Maxime Holder s'appuie sur plusieurs modèles. Celui de la franchise tout d'abord. Initié en 2000, ce mode de gestion concerne près d'un tiers des magasins français fin 2006. Mais d'autres modèles, plus innovants, sont également en cours de développement. La location-gérance en premier lieu, qui permet à un jeune entrepreneur, ancien salarié du groupe notamment, de s'installer à son compte avec une faible mise de fonds initiale, moyennant une redevance de 15 à 20 % de son chiffre d'affaires. Les joint-ventures ensuite, qui permettent à des gérants de franchises Paul de s'associer à hauteur de 40 % au développement de l'enseigne sur une ville ou une région donnée. En appui de cette stratégie, Paul mène une politique volontariste de formation de ses gérants de magasins, en y consacrant 3 % de son chiffre d'affaires total.


De nouvelles sources de financement
Une telle stratégie de soutien de l'entreprenariat permet également à l'enseigne de résoudre en partie la question de son financement. Paul est en effet le fer de lance d'un groupe familial dont il réalise 75 % du chiffre d'affaires. Ce dernier réunit également les boulangeries Saint Preux, les pâtisseries et salons de thé parisiens Ladurée et l'entreprise de boulangerie industrielle Moulin Bleu.

Sites
  Le site de Paul
Non coté, le groupe dont Francis Holder est le PDG ne veut pas non plus faire appel à des investisseurs extérieurs, non impliqués dans le métier de boulanger. La généralisation du modèle de gérant-investisseur donne donc à l'enseigne Paul des marges de manœuvre que l'autofinancement et l'endettement ne lui permettraient pas. D'autant que ce ne sont pas les projets d'expansion qui font défaut à Maxime Holder.


Un concept qui s'exporte bien
L'internationalisation de l'enseigne a commencé dès les années 80, grâce à une opportunité d'ouverture de franchises aux Etats-Unis. Depuis, on trouve du pain Paul dans 14 pays et sur quatre continents. "Nous nous sommes développés en propre ou via des filiales sur les marchés espagnols et britanniques car cela nous permettait d'acquérir une expérience à la fois sur des marchés latins et sur des marchés nordiques", explique Maxime Holder. Les implantations dans les autres pays se font par l'intermédiaire de franchises.

Chiffres clefs

Date de création : 1889
Chiffre d'affaires 2005 :
270 millions d'euros dont 17 % à l'international
Effectif : 4.846 collaborateurs dont 2.046 franchisés
Points de vente : 373 dont 299 en France.
Capital : 100 % Groupe Holder (Paul, Saint Preux, Ladurée, Moulin Bleu)

Pour son développement à l'international, l'enseigne a fait le choix d'adapter le moins possible son offre aux consommateurs locaux. "En nous implantant à Londres, nous nous sommes aperçus que ce qui attirait les clients chez nous était le fait de retrouver exactement la même baguette qu'à Paris", justifie le directeur général, expliquant qu'il défend en fait un art de vie à la française. L'objectif est maintenant d'approfondir le développement sur l'Europe, dans les zones où l'enseigne est moins présente (Belgique, Suisse, Italie mais aussi Europe de l'Est). Mais des projets à Moscou et en Israël sont aussi en chantier.


De nouvelles ambitions pour la France
A côté de ces plans de développement à l'international, Paul a encore des ambitions sur le territoire français. Continuer l'expansion du parc de magasins tout d'abord. L'objectif est de le multiplier par deux en cinq ans, en s'appuyant sur les travaux d'agrandissement des centres commerciaux. L'enseigne veut aussi prendre pour cible les villes de taille moyenne, jusqu'à présent occupées par Saint Preux. Elle regarde enfin avec intérêt des implantations plus originales : grands centres d'exposition ou sites industriels, comme celui de Renault à Guyancourt, mais aussi universités et hôpitaux quand la législation le permettra. Et parmi les projets encore très confidentiels du groupe : la création d'une nouvelle enseigne...


Les recettes du succès

Arriver à combiner qualité artisanale et logique industrielle.
Des implantations inhabituelles dans les centres commerciaux et à la périphérie des villes.
Une relation client soignée, reposant sur la motivation des gérants impliqués financièrement dans leur magasin.
L'exportation du concept français avec un minimum d'ajustements.


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