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ECONOMIE
 
01/03/2006

Jacques Anas (COE)
"La situation des trésoreries est plutôt aisée actuellement"

L'opinion des trésoriers d'entreprise de plus de 500 salariés confirme la reprise économique auparavant ternie par le taux de change et le prix du pétrole.
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Analyser la trésorerie d'exploitation, c'est à peu de chose près prendre le pouls d'une entreprise. A plus grande échelle, on peut se faire une opinion sur la conjoncture économique. Depuis mars 2005, l'Association des trésoriers d'entreprise (AFTE) et le Centre d'observation économique de la CCIP ont lancé conjointement une enquête d'opinion mensuelle auprès des trésoriers d'entreprise. Jacques Anas, responsable de la division enquêtes-statistiques du COE, analyse l'évolution des entreprises sur l'année écoulée.

Vous suivez les trésoreries de grandes entreprises françaises depuis près d'un an. Pourquoi ?
Jacques Anas. En France, il n'existait auparavant que deux enquêtes de trésorerie. L'une semestrielle de l'Insee dans le secteur industriel et l'autre trimestrielle par la Banque de France auprès des établissements bancaires. Avec l'AFTE, nous voulions un indicateur plus fréquent, mensuel, en relation avec l'actualité. En effet, la trésorerie est un bon indicateur de la performance et de la situation économique des entreprises. Quand l'économie ralentit, cela se reflète dans le compte d'exploitation et finalement dans la trésorerie d'entreprise. Si les entreprises se remettent à investir, elles vont payer plus d'intérêts en cas d'endettement extérieur. Cela va se voir au niveau de la trésorerie. Bien sûr, notre baromètre est avant tout une enquête d'opinion, non exhaustive, mais très significative au final.


Le taux de change a une influence de moins en moins négative."

Quelles évolutions avez-vous pu observer sur un an ?
Le premier semestre 2005 a été marqué au départ par une baisse du solde d'opinion concernant la trésorerie d'exploitation, en rapport avec la conjoncture française. Par contre, il est remonté progressivement à partir du printemps et rapidement en fin d'année avec l'amélioration de l'activité. Mais globalement la situation des trésoreries est plutôt aisée actuellement car le solde d'opinion est très positif. Début 2005 a seulement connu une sorte de trou d'air qui a ralenti le processus de reprise entrevue depuis 2003, mais la confiance des entreprises s'est améliorée dès la mi-2005.

Quel est l'impact de la conjoncture économique, du prix du pétrole ou du taux de change sur les trésoreries ?
Le prix élevé du pétrole a eu un impact très négatif entre mars et octobre 2005. Par la suite on a vu les prix baisser se répercutant alors sur l'opinion des entreprises. Quant au taux de change, il a une influence de moins en moins négative. L'euro s'est fortement apprécié fin 2004, avant de reculer depuis un an. Son influence serait presque positive depuis février 2006 indiquant que le taux de change atteint une sorte équilibre à 1,20 dollar pour un euro.

L'opinion des trésoriers est beaucoup moins positive en février 2006. Comment l'expliquez-vous ?
D'un certain point de vue, c'est vrai. La croissance est d'ailleurs moins forte que prévue fin 2005, ce qui pourrait expliquer les résultats de l'enquête. Mais il faut ici faire preuve d'une extrême réserve car les séries sont volatiles et nous ne sommes pas sûrs que le mouvement soit durable. Il faut attendre mars ou avril pour le confirmer. De plus, nos résultats ne sont pas encore désaisonnalisés, faute d'historique.

D'autres facteurs influencent-ils les trésoreries ?
Oui, si la situation économique se dégrade, les délais de paiement des clients augmentent, ce qui pèse sur la trésorerie. Et cela a été le cas début 2005, jusqu'en octobre où cet allongement a commencé à diminuer. Reste les problèmes d'exploitation qui dégradent facilement la trésorerie.


Il semble que la demande des entreprises en financement reparte à la hausse."

Dans votre baromètre, vous évoquez également les marges bancaires. Que nous révèle l'opinion des trésoriers à ce sujet ?
Ces marges avaient tendance à se réduire en 2005 : la conjoncture était moins bonne et les liquidités bancaires plus importantes. Depuis octobre, les marges baissent de moins en moins et le solde d'opinion est revenu à zéro. Il semble que la demande des entreprises en financement reparte à la hausse ce qui pourrait indiquer la reprise de l'activité et des investissements à venir, mais rien n'est encore avéré. Sans oublier qu'en décembre dernier les taux directeurs sont repartis à la hausse. Avec l'augmentation des marges sur les crédits, tout porte à croire que les intérêts payés par les entreprises pourraient augmenter de nouveau à l'avenir, pesant alors lourdement sur la trésorerie.

Où vont les profits des entreprises : sont-ils amassés dans un "trésor de guerre" ou bien investis ?
Il faut déjà différencier les profits des entreprises françaises en France de ceux des filiales à l'étranger. Or, les chiffres communiqués par les entreprises sont le plus souvent consolidés et près des trois quarts des résultats viennent de l'étranger. Le bilan est sans doute moins positif en France. De plus, la plupart des investissements effectués le sont à l'étranger. Je pense qu'en France, les entreprises vont sans doute commencer par réduire l'endettement - peu important - et reconstituer leur rentabilité dans l'attente d'une véritable phase de croissance économique. Les investissements restent modérés jusqu'à présent et n'entament pas la trésorerie. Cela pourrait changer à l'avenir...

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Parcours

 Jacques Anas : Né en 1952, diplômé de l'ENSAE et de l'ISUP, il a mené une carrière internationale en Amérique latine (1979-1981), en Afrique (1985-1987), puis à Washington comme fonctionnaire international à la Banque interaméricaine de développement (1987-1995). Depuis 1995, il dirige depuis 1995 la division des enquêtes et des indicateurs au Centre d'observation économique de la CCIP.

 L'enquête mensuelle sur les trésoreries d'entreprise est effectuée via Internet auprès d'un panel moyen de 250 entreprises de plus de 500 salariés sur le sol français, ne prenant pas en compte les filiales étrangères.


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