La question
"Je
travaille depuis trois semaines dans un établissement
et le PDG vient seulement de me donner mon contrat
à signer. Lors des différents entretiens que j'ai
eu avec lui, il était question d'un CDI classique
et, à ma surprise, il veut me faire signer un
contrat nouvelles embauches ! Suis-je en
droit de refuser et de demander un CDI classique
comme notre accord de principe le prévoyait ?"
(Anonyme)
|
La
réponse de Me Isabelle Mathieu (Daem Partners)
e contrat nouvelle embauche est un contrat à durée
indéterminée, qui déroge au droit commun du contrat
à durée indéterminée. C'est pourquoi, comme le contrat
à durée déterminée, il doit être écrit. Si la transmission
de cet écrit peut supporter un délai de quelques
jours, celui de trois semaines ne saurait être admissible.
Dans ce cas, votre relation de travail s'inscrit
dans la forme de droit commun du contrat à durée
indéterminée, que vous êtes en droit d'exiger.
Toutefois, on peut se demander si l'employeur ne
peut alors prétendre que le salarié se trouve en
période d'essai. Ce qui le mettrait, en effet, dans
la même situation de précarité que de refuser un
contrat nouvelles embauches... Sauf si la convention
collective rend la période d'essai applicable de
plein droit, celle-ci doit être expressément fixée
dès l'engagement du salarié. C'est la rédaction
d'un écrit qui permet alors d'en rapporter la preuve.
En conséquence, si la question de l'existence d'une
période d'essai n'a pas été abordée au moment de
l'embauche, il n'est pas, en principe, possible
de l'imposer trois semaines après l'engagement dans
la société.
Bien que le salarié soit en droit d'exiger un CDI
classique, reste à savoir s'il y a intérêt. Il peut,
en effet, trouver avantage à poursuivre sa relation
de travail dans le cadre d'un CNE. Si l'ordonnance
du 2 août 2005 prévoit que, pendant deux ans, ce
contrat peut être rompu sans que l'employeur ait
l'obligation d'invoquer un motif réel et sérieux,
cela ne signifie pas pour autant que la rupture
relève de l'arbitraire de l'employeur.
Le
juge exercera son contrôle sur la légitimité
de la rupture"
|
D'une part, l'article 4 de la convention n°158
de l'OIT (Organisation international du travail),
applicable en droit français, impose un motif
valable pour rompre une relation de travail, motif
dont la preuve incombe à l'employeur. D'autre
part, il y a fort à parier que le juge exercera
son contrôle sur la légitimité de la rupture en
s'appuyant sur la théorie de l'abus de droit.
Le pouvoir discrétionnaire de l'employeur pourra
alors être assujetti à sa capacité à démontrer
un motif juridiquement recevable : une insuffisance
professionnelle (difficile à soutenir à mesure
de l'ancienneté du salarié), un motif disciplinaire
(si une faute est invoquée, l'employeur se verra
sans doute obliger de mobiliser la procédure disciplinaire)
ou un motif économique.
L'innovation du contrat nouvelles embauches se
situerait alors uniquement dans la perspective
du stricte formalisme. Le salarié peut, quant
à lui, démissionner sans respecter de préavis
et sans qu'il puisse se voir réclamer des dommages
et intérêts au titre d'une démission abusive (en
raison de l'exclusion de l'application de l'article
L 122-13 du Code du travail). Au moment de la
rupture, l'employeur lui versera une indemnité
de 8 %, calculée sur le total des rémunérations
brutes dues depuis la conclusion du CNE, exonérée
de charges fiscales et sociales.
|