Guillaume Lachenal (Miliboo) "Pourquoi Miliboo s'introduit en bourse"

La marque en ligne de mobilier contemporain s'introduira sur Alternext le 9 décembre. Son président explique au JDN ce qu'il en attend.

JDN. Quel est le calendrier de l'introduction de Miliboo sur Alternext ?

Guillaume Lachenal, président de Miliboo © S. de P. Miliboo

Guillaume Lachenal. Nous avons reçu hier soir le visa de l'AMF et commençons donc aujourd'hui notre roadshow. Notre objectif est d'être coté dans deux semaines, le mercredi 9 décembre.

Pourquoi la bourse ? Ce n'est pas courant, pour un e-commerçant de votre taille…

C'est évidemment intéressant en termes de notoriété et d'image. Surtout dans le retail, où l'on essaie toujours de renforcer la visibilité de sa marque. Par ailleurs, la bourse correspond bien à la façon dont Miliboo se développe. Nous enregistrons une très forte croissance, le retour sur investissement de nos investissements marketing est rapide et de plus, nous nous astreignons déjà à des reportings très réguliers, plus fréquents que ce que demande la bourse. Etre coté ne nous apportera donc aucune des lourdeurs que craignent parfois les entreprises.

Ensuite, nous serons sur Alternext sur un marché parfaitement adapté à notre taille. Même si nous restons petits, avec 14,2 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2014-2015, Miliboo est une entreprise posée, totalement structurée, dont les dépenses sont uniquement constituées par ses investissements, son marketing et son BFR. Enfin, bien sûr, cela constitue pour nous une façon d'aller chercher des capitaux.  Nous avons eu l'occasion de boucler un nouveau tour de table auprès de fonds d'investissement, mais le private equity nous apporte moins qu'une IPO.

Pensez-vous pouvoir fournir les scores attendus par le marché ?

Ils ne sont pas supérieurs aux performances attendues par le private equity. Les fonds sont aujourd'hui dans la même démarche que les investisseurs en bourse. Par exemple, ils veulent aussi de la rentabilité. Et la bourse n'attend pas des résultats à plus court terme que les fonds. Il n'y a plus, comme avant, de décorrélation entre les deux mondes.

Le contexte de marché est notoirement mauvais en ce moment. Les récents exemples ne vous ont-ils pas incités à reporter votre introduction ?

Prenons-les au cas par cas. Deezer avait une valorisation absurde. Il n'est donc pas étonnant que les investisseurs n'aient pas suivi et que la société ait dû renoncer. Quant à Showroomprivé, il a eu un peu de mal les trois premiers jours mais est remonté. En outre, il s'agissait de permettre à ses actionnaires de sortir et non, comme Miliboo, d'une augmentation de capital destinée à financer des investissements. Chez nous, pas de cash-out prévu : tous les actionnaires restent. D'ailleurs, nos fonds actuels, Auriga Partners, Sigma Gestion et Naxicap Partners, participeront à hauteur de 1,5 million d'euros. Donc le message aux investisseurs n'est pas le même non plus.

"Nous cherchons environ 10 millions d'euros"

Bref, côté Deezer comme Showroomprivé, les raisons de ce qui s'est passé sont clairement identifiées et nous n'en avons aucune en commun avec eux. Pour notre part, nous avons donc tout ce que les investisseurs attendent d'une levée. Miliboo a démontré son modèle, nous doublons notre chiffre d'affaires tous les deux ans de façon purement organisque, et l'argent levé ira dans le développement de l'entreprise et pas ailleurs.

Après les attentats de Charlie Hebdo, la bourse avait chuté. Ne craignez-vous pas le même phénomène aujourd'hui ?

Notre IPO ne présente aucun caractère d'urgence, nous aurions très bien pu la décaler. Si nous avions besoin d'argent tout de suite, c'est vers les fonds que nous nous serions tournés. Mais suite aux attentats, nous pensons qu'il est au contraire temps de retrousser ses manches, même si cela présente un risque. Il n'est pas question d'entretenir le climat que ces gens veulent instaurer. Même si nous levons moins d'argent que prévu, nous ne voulons pas nous laisser faire.

Combien cherchez-vous à lever ?

Nous cherchons environ 8 millions d'euros, ce qui correspond au point médian de notre fourchette indicative de prix, de 4,21 euros à 5,69 euros par action. Mais le nombre et le prix des actions ne seront fixés qu'à l'issue de notre roadshow, donc je ne saurais vous donner un montant plus précis aujourd'hui.

Qu'allez-vous faire des fonds levés ?

D'abord, nous allons renforcer la pression marketing et poursuivre le développement de nos produits. Ainsi, bien sûr, qu'accompagner notre haut niveau de BFR puisque plus nous croissons, plus nous avons besoin de stocks et donc de trésorerie. Par ailleurs, nous allons dupliquer dans d'autres villes notre Milibootik, le magasin connecté que nous avons ouvert à Paris en octobre 2014, qui est un vrai succès. Rien qu'avec les encaissements sur place, nous sommes quasiment à l'équilibre de la boutique. Sans compter, donc, toutes les ventes qu'elle engendre sur le site et le mobile. Nous demeurons un acteur digital et ne projetons donc pas de déployer tout un réseau de distribution. Nous allons ouvrir tranquillement, au rythme d'un ou deux magasins par an, dans les villes françaises ou étrangères où nous aurons atteint un certain seuil de visites sur Miliboo.com.

"Nous allons lancer une gamme  de meubles connectés"

Quid de l'international ?

L'Italie, l'Espagne, le Benelux et dans une moindre mesure la Suisse représentaient déjà 15% de nos ventes sur notre exercice 2014-2015. Nous avons aussi mis en place un .co.uk et un .de pour avoir de l'antériorité sur Google le jour où nous lancerons au Royaume-Uni et en Allemagne, mais nous n'avons pas encore traduit tous les produits ni dépensé un euro de marketing dans ces deux pays. Maintenant que nous sommes prêts techniquement, nous allons lancer le Royaume-Uni en 2016 avec un budget marketing spécifique. En revanche, rien de prévu en Allemagne pour l'instant. Le pays est trop compliqué.

Nous allons également tester le marché américain au travers de quelques marketplaces. L'objectif n'est pas de faire des ventes, mais bien de mesurer l'appétence des consommateurs pour nos produits, à coût quasiment nul. Si le bilan de cette mesure est positif, alors nous nous interrogerons sur l'opportunité d'attaquer les Etats-Unis. Mais nous relèverions alors d'autres fonds pour cela. Nous n'utiliserons pas l'argent levé via l'IPO pour nous lancer là-bas.

Au lancement de la Milibootik, vous aviez présenté un premier prototype de canapé connecté. Avez-vous poursuivi dans cette voie ?

Tout à fait. Début 2016, nous présenterons à la presse plusieurs prototypes. Parmi eux, figurera un nouveau canapé connecté, avec chargeur de smartphone par induction, télécommande universelle et d'autres dispositifs encore. Nous avons également conçu une petite console connectée, ainsi qu'un miroir connecté qui sait afficher la météo, les mails, des mémos vocaux... Ces meubles embarquent toute une électronique et du wifi. Ils pourront donc tous communiquer avec une centrale domotique. Nous devrions débuter leur commercialisation au deuxième semestre 2016.

Guillaume Lachenal est le cofondateur et président de Miliboo. Autodidacte, il crée à 24 ans sa première société, Net Work Communication, fournisseur d'accès à Internet et éditeur de sites Web. En 2005 il fonde Taptoo, spécialisée dans le reconditionnement de serveurs et d'ordinateurs. En 2007 il lance le site marchand de mobilier contemporain Miliboo avec Aline Buscemi, qui prend la fonction de directrice générale. Sur son exercice clôturé le 30 avril 2015, Miliboo a enregistré un chiffre d'affaires de 14,2 millions d'euros et une perte nette de 900 000 euros.