"Carrefour des illusions", les meilleurs extraits 2005, le "bain de sang"

En 2005, Luc Vandevelde, président du conseil d'administration et proche des actionnaires historiques de Promodès, a décidé d'en finir avec Daniel Bernard. "Luc la main froide" comme on l'appelle au Royaume-Uni mérite son surnom.

La physionomie de Luc se transforme instantanément, son visage devient dur, son regard froid.

"Le 19 janvier, je déjeune avec Luc chez Taillevent. J'en profite pour revenir sur le départ de Daniel Bernard. J'explique qu'il "faut éviter l'affrontement". Daniel Bernard n'est pas homme à se laisser faire. Or, quand on analyse la composition du conseil d'administration, on constate que la révocation de Daniel Bernard est loin de faire l'unanimité. "En dehors de vous-même, lui dis-je, quatre autres administrateurs seulement seront favorables à cette décision : Robert Halley, Carlos March, José Luis Leal et Jacques Badin. Ce qui fait cinq voix pour. Par contre, il est vraisemblable que, outre Daniel Bernard et Joël Saveuse, Christian Blanc et Sylvia Jay seront contre. Ce qui fait quatre voix contre. Et on ne sait pas ce que décideront Pierre Rodocanachi et François Henrot. On le voit, c'est loin d'être gagné au conseil." J'ajoute : "A quoi bon prendre le risque d'une guerre de tranchées ? Carrefour n'a pas besoin de ça ! Pourquoi ne pas trouver un accord avec Daniel Bernard, qui lui laisserait un an de plus, le temps de bien préparer José Luis à son nouveau poste ?" Une transition en douceur, juste quelques mois à attendre. La physionomie de Luc se transforme instantanément, son visage devient dur, son regard froid. Manifestement, ce que je viens de lui dire ne lui plaît pas.

Il me répond, d'une voix pourtant neutre : "J'ai bien pris la mesure de tout cela, mais nous avons perdu suffisamment de temps." En fait, certains administrateurs seraient déjà venus lui demander de décaler ses projets, le temps de trouver avec Daniel Bernard les conditions d'une transition paisible à la tête de Carrefour. Ils l'auraient mis en garde sur le fait que, s'il ne trouvait pas un accord, "ce serait un bain de sang !". Mais Luc n'est pas sensible à ces arguments. Il me dit, sur un ton qui ne laisse planer aucun doute quant à sa détermination : "Jacques, nous sommes allés trop loin pour reculer, j'ai pris ma décision et maintenant je suis bien." "  

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