Le business du 7è art ou les bons comptes du cinéma français
Selon le rapport du CNC 2011 sur la production cinématographique, 118 films à majorité française pour plus de la moitié d’entre eux ont été coproduits en 2010 avec au moins un partenaire étranger (93 en 2009, 95 en 2008).
La coproduction internationale présente de nombreux avantages : bénéficier d’infrastructures locales nouvelles, de décors naturels uniques et de savoir-faire différents; réunir des fonds plus importants, alléger le budget; répartir le coût et les risques de production; accéder à des nouveaux marchés et développer un réseau professionnel à l’international. Cependant ces avantages ont pour pendant les contraintes liées au respect des accords de coproductions et les difficultés liées aux différentes cultures de travail, ainsi que les risques liées à la défaillance des coproducteurs.
Au total, 692,44 millions d’euros ont été consacrés en 2012 au financement de films français avec un ou des partenaires étrangers. Parmi ceux-ci, les alliés privilégiés de la France demeuraient en 2010 la Belgique, l’Italie et l’Allemagne.
1) Les accords de coproduction
Pour qu’une coproduction accède
aux divers avantages nationaux d’aide à la production, il est nécessaire qu’un
accord de coproduction entre les pays des coproducteurs aie été signé, et que
les producteurs respectent les dispositions de ces accords. Seul le respect des
accords de coproduction permet à la coproduction d’être officielle. Ces accords
existent entre de nombreux pays, et la France conclu chaque année de nouveaux
accords (dernièrement avec l’Inde, l’Uruguay, la Chine, l’Afrique du Sud). Une
liste des accords de coproduction français et leur texte est consultable sur le
site internet du CNC. La France est le pays ayant signé le plus
d’accords de coproductions au monde. Certains pays sont cependant signataires
de très peu d’accords. C’est le cas des États-Unis, pays avec lequel la France
ne dispose pas d’accord, ou encore de la Chine et du Royaume -Uni. Pour accéder
aux principaux avantages des coproductions, il faut compter sur l’existence d’un
accord de coproduction, mais également respecter les conditions de cet accord.
Ces conditions divergent d’un accord à l’autre et sont plus ou moins
restrictives, mais un certain nombre de contraintes reviennent régulièrement
comme des conditions d’agrément, de lieu de tournage ou de nationalité des
collaborateurs du film.
2) Les conditions des accords de coproduction
En effet, même si chaque accord
de coproduction est différent, plus ou moins contraignant, on retrouve
régulièrement les conditions suivantes :
- les producteurs doivent être ressortissants des pays parties à l’accord de coproduction, ou du moins résidents permanents
- les prises de vues, les tournages en studio, la postproduction doit être réalisé dans l’un des pays de l’accord
- les collaborateurs techniques et artistiques doivent être ressortissants d’un des deux pays, sauf demande exceptionnelle
- une répartition de la coproduction entre producteurs a minima de 20/80 %, parfois 10/90 %.
- un apport uniquement financier par un des coproducteurs n’est souvent pas accepté
- une approbation préalable par les administrations de chaque pays de la coproduction avant tournage.
- une approbation définitive après achèvement du film, et avant toute exploitation.
- la possibilité de conclure des coproductions tripartites ou multi-partites est prévue dans les accords quand elle est possible, et souvent soumise à approbation.
- la langue de tournage et/ou de la bande son est également souvent un critère
Une fois que l’ensemble des conditions de l’accord de coproduction sont remplies, le film coproduit peut bénéficier des avantages de la coproduction officielle.
3) Les avantages des coproductions officielles
Le premiers avantage est celui
du traitement national. En effet le film coproduit reçoit la double nationalité
et peut donc être considéré comme un film produit dans chacun des pays de
l’accord de coproduction. Cela a un nombre important de conséquences, puisque
la plupart des aides à la production sont conditionnées par la nationalité du
film. Ainsi, un film bénéficiant du traitement national pourra bénéficier des
aides nationales de deux pays voir plus en cas de coproductions mufti-partites. Les
aides disponibles ainsi sont soit accordées par des institutions nationales, ou
par des institutions régionales.
Attention, cependant, les organismes de
soutiens à la production différencient parfois entre coproduction majoritaires
et coproductions minoritaires.
Une coproduction majoritaire pourra alors prétendre
à des aides beaucoup plus importantes qu’une coproduction minoritaire. Outre
ces financements institutionnels, les coproductions officielles permettent aux
coproducteurs de faire des demandes de financement auprès des acteurs privés de
leurs pays respectifs comme si il s’agissait d’un film national. Ainsi, les
chaînes de télévision, pourront apporter un financement à un film qui sera
considéré comme national, plus aisément, car ce financement intégrera les
quotas d’obligations de production qu’ont un certain nombre de pays. Ces
avantages, ne sont cependant pas uniquement tributaires du statut de
coproduction officielle. Tout dépend en effet des critères de chaque organisme
financeur.
En sus de l’avantage du
traitement national, les coproductions officielles permettent aux coproducteurs
de faire des demandes d’aides à des guichets de financement régionaux tel que
le programme EURIMAGE (coproductions européennes), ou encore CARTOON
(coproductions de films d’animation), ou IBER MEDIA (coproductions hispaniques).
4) Et les coproductions non officielles ?
Certes, elles ne sont pas
tributaires des conditions parfois très strictes des accords de coproduction
(par exemple en Allemagne le film doit nécessairement sortir dans les salles
allemandes), mais ne peuvent pas prétendre au traitement national, et aux
différentes possibilités de financements y afférentes. Cependant, certains
dispositifs de financement restent ouverts aux productions étrangères, tel que
les crédits d’impôts ou certaines aides régionales.
En conclusion, les
coproductions internationales doivent passer par un cheminement administratif
assez complexe, et la satisfaction de critères d’éligibilité avant de pouvoir
accéder au statut de coproduction officielle. Ajoutez à cela, les différents
risques inhérents aux relations de travail à distance, et vous comprendrez que
la réussite d’une coproduction internationale tiens de la gageure et nécessite
une connaissance approfondie non seulement des accords de coproduction, mais
également de leur mise en œuvre et du sérieux des partenaires coproducteurs
étrangers. De préférence, un producteur se renseignera également sur le système
d’aide du pays de son coproducteur. Pour apporter un peu de sécurité dans
l’exercice périlleux que sont les coproductions internationales, il faut
commencer par conclure un contrat de coproduction le plus détaillé possible et
faire appel aux professionnels du droit compétents pour cela.