Virginie Caubet (Transdev) "Nous vendons 2 000 tickets de transport par sms par jour"

Alors que la Nuit du Directeur Digital se rapproche, la directrice numérique de Transdev Rouen présente au JDN le chantier majeur qu'elle conduit pour transformer l'entreprise.

JDN. Quelle fut votre principale action en tant que nouvelle directrice Numérique de Transdev Rouen ?

Virginie Caubet est directrice numérique de Transdev Rouen © Transdev

Virginie Caubet. J'ai pris mes fonctions le 2 janvier 2017 pour devenir la première directrice numérique d'une filiale opérationnelle du groupe Transdev. Les transports en commun restent un métier avec encore beaucoup de processus "à l'ancienne", c'est à dire avec encore beaucoup de papier. L'enjeu pour moi était de mettre en place des outils et des process numériques pour nos clients voyageurs, pour nos clients institutionnels mais aussi et surtout en interne. Dans notre métier, la masse salariale représente 80% des charges. Mon chantier numéro 1 est de moderniser et numériser tous les processus internes dans une entreprise qui n'en a pas du tout l'habitude.

C'est un enjeu fort car le budget dont je dispose représente moins de 2% du chiffre d'affaires, c'est peu face à l'ampleur de la tâche à réaliser, mais avant mon arrivée ce budget n'existait même pas. Nous avons défini avec l'ensemble des directeurs de service de Transdev Rouen une feuille de route numérique dont l'objectif n'est pas simplement de déployer de nouveaux outils numériques mais bien de redéfinir les processus internes, travailler différemment au quotidien. Le champ d'action à engager est énorme !

En quoi consistait ce plan d'action ?

Les premiers volets qui ont été mis en œuvre ont porté sur les conducteurs. Sur les 1 150 collaborateurs de l'entreprise, 700 sont des conducteurs. Nous leur avons fourni des outils qui leur permettent de déposer leurs congés, consulter leur planning de travail, depuis leur smartphone ou leur tablette, en remplacement des formulaires et livrets papier utilisés jusqu'à présent.

Quand nous avons l'idée d'une nouvelle application, je la présente au siège afin de savoir s'il existe déjà des initiatives en cours dans ce domaine. Dans l'affirmative, nous mutualisons nos moyens, sinon, nous consultons les fournisseurs capables de répondre à notre besoin ou parfois nous lançons nous-mêmes un développement car il existe peu d'applications sur étagère dans le monde du transport public.

"Le budget dont je dispose représente moins de 2% du chiffre d'affaires"

Quels ont été vos rapports avec la DSI dans ces projets ?

Les rapports avec la DSI sont assez simples puisqu'elle a été intégrée dans cette nouvelle direction numérique. J'ai intégré les effectifs de la DSI dans mes équipes ce qui a simplifié les choses. Ce fut bien évidement un gros changement culturel pour les équipes qui ne doivent plus penser à l'outil pour l'outil, au seul support aux métiers, mais penser en premier lieu "service utilisateur".

Quelle furent les premières réalisations issues de ce plan ?

Il est compliqué pour les métiers de se projeter dans de nouvelles façons de travailler en partant d'une page blanche. Nous avons initié ce processus en leur soumettant des premières idées. Nous avons ainsi proposé la numérisation des feuilles de paie, la gestion des congés, la réalisation d'élections syndicales via le portail Web, etc. Ces premiers projets en ont entrainé d'autres sous l'impulsion des métiers cette fois. L'idée, c'était de commencer par automatiser les tâches à faible valeur ajoutée, faire disparaitre le papier autant que possible, avec une analyse du ROI des projets. Enfin, le troisième grand chantier est d'apporter de l'agilité, donner accès aux informations et aux services aux collaborateurs quand ils le souhaitent, sans devoir passer par un intermédiaire ou devoir repasser dans les bâtiments de la direction. Nous avons mis en place des supports d'information numérique dans notre dizaine de lieux de vie pour les conducteurs et misons beaucoup sur le mobile pour créer un lien direct avec eux. Une douzaine de services ont été créés pour eux sur notre portail mobile et nous comptons étendre les usages aux autres collaborateurs de l'entreprise en 2018/2019.

Votre action initiale a été clairement centrée sur l'interne en 2017 mais qu'en est-il est usagers ?

Beaucoup avait déjà été fait dans ce domaine avant mon arrivée. Le site Internet et les applications mobiles des voyageurs avaient été refaits. Nous avons enrichi ces dispositifs numériques en 2017 avec notamment la mise en place du ticket de transport par SMS Un service qui a immédiatement rencontré le succès : nous en vendons aujourd'hui 2 000 par jour, 1 toutes les 20 secondes, soit déjà 20% des tickets unitaires ! En 2018, l'application mobile sera enrichie de la fonction MTickets pour remplacer les carnets de 10 tickets. Un autre projet emblématique pour Transdev Rouen est la mise en place d'un service de transport à la demande par véhicules autonomes. Comme nous avons pu dégager du temps pour nos collaborateurs grâce à l'automatisation des processus, ce sont eux qui vont gérer ce projet innovant, c'est l'un des effets accélérateurs du numérique chez Transdev !

Résumé du projet :

Pourquoi il est innovant :

"Le secteur du transport public reste encore très traditionnel dans son fonctionnement interne, les processus étaient encore très manuels et basés sur le papier. Dématérialiser les processus permet à la fois de réaliser des économies et dégager un ROI rapide mais aussi redonner du temps au personnel pour des tâches à plus forte valeur ajoutée."

Pourquoi il est stratégique :

"Bien plus de la moitié du personnel de Transdev est composé de conducteurs qui n'ont pas à passer au siège de l'entreprise. La stratégie digitale permet de rapprocher ces collaborateurs de l'entreprise via leurs terminaux mobiles non seulement en leur procurant des informations mais aussi de multiples services employés."

Pourquoi il est transformateur :

"La création d'une direction du numérique a permis de faire passer les directions métiers non plus dans une logique de demandes adressées à la DSI mais dans une approche de co-innovation afin d'imaginer de nouveaux services numériques et d'aller dans le sens d'une plus grande agilité."

Pourquoi il est accélérateur : 

"Dégagé des tâches administratives, le personnel peut reprendre des initiatives, qu'il s'agisse des équipes commerciales qui peuvent mener des actions dans les écoles les universités ou encore l'équipe en charge du projet de véhicules autonomes en cours de test à Rouen."

Le JDN propose pour la quatrième année consécutive le 19 juin prochain un événement destiné à récompenser les meilleurs chief digital officers de France. Pour en savoir plus : la Nuit du Directeur Digital.