Sébastien Borget (The Sandbox) "Dans le métaverse, les joueurs participent à la réinvention numérique des marques"

Le Journal du Net est partenaire du Mastercard Innovation Forum 2022, prévu le 8 décembre à Paris. Cofondateur de la plateforme métaverse Web3 The Sandbox et invité du MIF 2022, Sébastien Borget dévoile au JDN les clefs de la relation entre les marques et joueurs du métaverse.

JDN. Vous interviendrez le 8 décembre lors d'une table ronde intitulée "Métaverse, phénomène de mode ou vraie opportunité pour les marques ?". Je pense connaître votre avis en tant que cofondateur de The Sandbox. Expliquez-nous pourquoi le métaverse ne serait pas qu'un phénomène de mode ?

Sébastien Borget, cofondateur et CEO de The Sandbox. © Cyril Bruneau - The Sandbox

Sébastien Borget. Le métaverse est une révolution technologique et sociale qui est là pour durer, qui n'est pas lié à des cycles économiques et qui démontre qu'utilisateurs comme marques cherchent de nouveaux moyens d'avoir une relation plus engagée et différente de ce à quoi le Web2 nous a habitué : dans le Web2, les gens regardent une vidéo sur Instagram ou Tik Tok durant deux à cinq secondes avant de passer à la suivante. Le taux d'engagement est très faible. Quelle est la valeur réelle d'un like, d'un partage ou retweet pour une marque ? Le métaverse apporte une relation plus personnalisée avec le client.

Par quels moyens le métaverse parvient-il à stimuler l'engagement de l'utilisateur ?

Sur Sandbox, les gens passent en moyenne vingt à trente minutes au sein d'une expérience en étant engagés par la complétion de quêtes, d'activations. De plus, une plateforme comme Sandbox est ouverte : les utilisateurs participent à la réinvention numérique de la marque dans cette espace, ils ont accès aux outils officiels de la marque et grâce à des outils no code, ils peuvent les placer dans leur propre land, ce qui vient étendre la présence la marque et la positionne comme encore plus créative et ouverte. En utilisant les possibilités de la technologie et en s'ouvrant à la communauté, la marque se réinvente dans le métaverse. C'est notamment le cas avec les opérations d'Adidas, Gucci, Nike avec RTFKT, Warner Music avec Snoop Dogg ou Steve Aoki, les Schtroumpfs, les Lapins Crétins.

Les utilisateurs restent-ils dans le métaverse ?

Dans la saison 1, 60% des gens qui ont démarré ont complété toute la saison Alpha (phase d'essai public du jeu, ndlr). Dans la saison 3, nous sommes à 40% de rétention avec des personnes qui reviennent quasiment tous les jours, donc on crée le comportement voulu pour éduquer les gens à rentrer dans le métaverse. On veut que ces espaces soient vivants et il est possible de croiser en permanence des joueurs. Selon nos dernières métriques concernant la saison 3 alpha, nous sommes à 39 000 joueurs quotidiens et 201 000 joueurs mensuels. Nous comptabilisons un total de plus de 1,6 million d'heures jouées et plus de 4,1 millions de messages échangés entre les joueurs. Les joueurs ressentent des émotions à travers leur avatar : il y a des moments de fun à plusieurs, une intimité sociale et ça, sans avoir besoin de la VR ou de graphisme haute résolution.

Le no code est-il l'une des clefs pour attirer l'utilisateur ?

À l'origine, le métaverse est vide, c'est un ensemble d'espaces qu'il faut bâtir et pour rendre la création accessible à tous, ce n'est pas en générant un métaverse sous Unreal (moteur graphique, ndlr), déjà très compliqué pour les développeurs de jeu vidéo et qui requiert des formations spécifiques, que l'on y parviendra. Nous voulons un métaverse fun et non élitiste. Je pense que le no code le permet. Les champions de la création fun, c'est Lego. Il n'y a pas plus simple que de créer avec des Legos. Il existe le Lego numérique : le Voxel. C'est une forme d'art. Il peut prendre la forme de blocs comme dans Minecraft ou d'autres plus poussées et ainsi offrir de la granularité à des artistes, c'est très bien et c'est que nous développons avec Sandbox.

En juillet dernier, vous nous déclariez que "les gens ne viennent pas faire du shopping dans le métaverse". Comment une marque doit-elle se positionner dans ces univers ?

Une grande marque a récemment communiqué ses premiers résultats sur ses ventes dans Roblox, c'est très discret, d'autant plus par rapport au chiffres d'affaires qu'elle réalise sur n'importe quelle autre plateforme traditionnelle. La raison est très simple : avant de vouloir inciter l'utilisateur à faire des achats dans le métaverse, apprenons-lui déjà à y venir et les comportements d'achat viendront naturellement. Le métaverse commercial n'est pas encore défini, pas plus que le business model qui sera prédominant. Il faut qu'il y ait une audience. Sandbox a un rôle important car nous sommes l'une des seules plateformes créatives UGC (user generated content, ndlr) dans un monde 3D virtuel et interopérable, or l'UGC et la créativité sont des bonnes pistes pour des marques qui cherchent à se réinventer. Rentrer dans le métaverse pour une marque, ce ne doit pas être qu'une stratégie basée sur des KPI et des revenus. Cela s'affinera plus tard lorsque les modèles seront trouvés.

Sébastien Borget est le cofondateur et COO du métaverse décentralisé The Sandbox, un monde virtuel où les joueurs peuvent créer, jouer, posséder, gouverner et monétiser leurs expériences en utilisant les NFTs & SAND, le principal jeton utilitaire de la plateforme. Il est également devenu le président de la Blockchain Game Alliance en 2020, une organisation à but non lucratif regroupant 300 membres clés de l'industrie. Avant de cofonder l'éditeur de jeux mobiles Pixowl, il avait travaillé chez Ipercast et Wixi.com. Il est diplômé de Télécom SudParis.