Climat et digitalisation : les entreprises ont un rôle à jouer

Alors que la conférence annuelle des Nations Unies sur les changements climatiques vient de prendre fin avec un bilan mitigé, les questions environnementales, sociales et de gouvernance sont plus que jamais au cœur des préoccupations mondiales.

Le dernier rapport du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) publié en août dernier dresse un constat alarmant sur la vitesse du dérèglement climatique. Le constat est désastreux, et ce rapport sonne comme une alerte rouge pour l’humanité, et la gravité des signaux est sans précédents et la contribution de tous, à commencer celle des entreprises, est primordiale. Dans ce contexte, si la transformation digitale en marche ne constitue pas une solution à elle-seule, elle peut très certainement avoir un impact sociétal et environnemental durable. Il est indéniable aujourd’hui que négliger les efforts n’est plus une option.

Fonte accélérée au Groenland, inondations meurtrières en Allemagne et en Belgique, glissement de terrain au Japon, incendies ravageurs en Californie ou encore vagues de chaleur intenses dans de nombreuses régions du monde ne sont qu’un échantillon des exemples des nombreuses répercussions du réchauffement climatique sur le monde. Aujourd’hui, le sentiment d’urgence est plus que jamais renouvelé, car la pandémie a mis en lumière l’inefficacité de nombreuses pratiques commerciales antérieures à la crise. Selon l’étude « Technology Industry CEO Outlook » de KPMG (2020), 57 % des leaders mondiaux de la technologie estiment que la gestion des risques liés au climat sera un facteur déterminant pour le maintien de leur emploi. Dans ce contexte, il est évident que la durabilité doit être prise plus au sérieux, tant par les gouvernements que par les entreprises, et la technologie peut apporter la réponse adéquate. C’est notamment l’objet de la COP26 taxée de ne pas faire suffisamment en faveur du climat. Le sentiment général étant que les mots doivent laisser la place aux actes et les mesures concrètes doivent être mises en place au niveau mondial.

La transformation digitale et l’ESG sont intimement liées      

Face à la pandémie, la transformation digitale a offert aux dirigeants la possibilité de réinventer leur modèle opérationnel et d’apporter des changements fondamentaux à leurs pratiques quotidiennes. C’est ainsi que les organisations ont dû repenser les interactions élémentaires entre les personnes, les processus et la technologie dans le cadre de leur transition vers le travail à distance. Si la première étape a pu se révéler difficile, comme le suggère une étude de McKinsey, 95 % des dirigeants poursuivront leurs efforts de transformation jusqu’en 2022. Cette prochaine étape du parcours de transformation digitale des organisations est un moment crucial qui offre aux dirigeants la possibilité de tenir compte de l’impact environnemental et social de leurs opérations commerciales, et d’intégrer des solutions et des pratiques IT plus durables au sein de leur organisation.

À un niveau fondamental, la transformation digitale est un catalyseur de pratiques commerciales plus efficaces, voire durables. Par exemple, si une organisation transfère l’ensemble de sa chaîne d’approvisionnement vers un système de planification des ressources d’entreprise (ERP) basé sur le cloud, les dirigeants bénéficient d’une meilleure visibilité, ce qui leur permet d’optimiser pleinement les performances de la chaîne d’approvisionnement et d’améliorer l’efficacité globale. Ce faisant, les équipes sont en mesure de mieux coordonner la demande et l’offre, en limitant au minimum les pertes d’efficacité ou les rappels inutiles, ce qui permet de faire baisser la production globale d’énergie et d’aider les fournisseurs à suivre, à signaler et à réduire leur empreinte carbone globale.

Maintenant que la pandémie a provoqué une vague massive de transformation digitale, les entreprises utilisent des documents numériques et des signatures électroniques, réduisent leur consommation de papier et migrent presque toutes leurs opérations vers le cloud, qui est généralement plus économe en énergie que l’IT et le stockage de données sur site. Les dirigeants ont ainsi été contraints de repenser leurs opérations commerciales et, ce faisant, d’opter pour des solutions plus durables. Cela dit, dans leur empressement à définir les principes fondamentaux du travail à domicile pour leur personnel, de nombreuses organisations ont précipité leurs programmes de transformation, en se concentrant uniquement sur le maintien de l’activité. Ils ne se sont pas nécessairement penchés sur d’autres voies qui permettraient à leur entreprise de fonctionner plus efficacement ou, plus important encore, d’être plus respectueuse de l’environnement à long terme.

En effet, si les avantages de la transformation ESG (pour environmental, social and governance) sont bien connus, son adoption reste malheureusement plutôt lente dans la plupart des domaines, et les entreprises hésitent à procéder à des changements ou à prendre des engagements sérieux. Les entreprises sont encore trop nombreuses à s’appuyer sur des systèmes obsolètes et des processus essentiellement fondés sur le papier, qui entraînent une augmentation de la consommation d’énergie et des déchets. Il est essentiel que les entreprises poursuivent leurs efforts de transformation et recherchent des solutions plus durables. Cependant, il ne faut pas précipiter la transformation digitale, au même titre que l’ESG, et il peut se révéler difficile pour les entreprises de savoir par où commencer.

La durabilité est un cheminement

Pour la majorité des entreprises, la COVID-19 a constitué la raison la plus inattendue d’accélérer la transformation digitale. Par pure nécessité, les dirigeants ont opté pour des solutions à court terme, dans l’espoir de transformer leur entreprise le plus rapidement possible et, comme le suggère l’étude de Conga, seuls 36% de ces projets de transformation sont considérés comme des réussites. Les initiatives ont souvent été motivées par le désir de suivre la concurrence ou d’adopter les dernières technologies pour résoudre les problèmes de l’entreprise, sans pour autant fixer des objectifs clairs. La première étape de la formulation d’une stratégie efficace consiste à mesurer où en est actuellement l’entreprise dans son parcours de transformation digitale, c’est-à-dire ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.

Dans l’idéal, les dirigeants devraient veiller à simplifier ou à rationaliser un seul processus d’entreprise essentiel à la fois, c’est-à-dire étape par étape, plutôt que d’adopter une technologie entièrement transformatrice sans identifier les avantages qu’elle présente pour le cycle opérationnel. C’est également de cette manière que les dirigeants doivent aborder leurs programmes ESG. La durabilité, tout comme la transformation numérique, est un cheminement. Les dirigeants doivent examiner les différents secteurs de l’entreprise étape par étape, en identifiant les possibilités d’amélioration à mesure qu’ils progressent dans leur évolution ESG. De même, à mesure que les entreprises adoptent des canaux plus digitaux et cherchent à réduire leur empreinte carbone ou papier, elles pourraient découvrir un autre processus à traiter ou à peaufiner. Pour que l’ESG ou tout autre programme de transformation fonctionne, les dirigeants doivent prendre du recul et revoir leur mode de fonctionnement au quotidien. Ils doivent réfléchir à la manière dont ils peuvent intégrer les considérations environnementales dans leur logique commerciale de base et identifier les technologies numériques qui les aideront à atteindre ces objectifs.

L’IT durable et éthique est un impératif, et les connaissances acquises au cours de l’année écoulée devraient influencer les plans de contingence des entreprises pour les années à venir et déboucher sur des pratiques commerciales ESG plus durables. Comme l’indique le Global Risk Report 2021 du Forum économique mondial, les questions environnementales continuent de dominer les cinq principaux risques mondiaux en termes de probabilité et d’impact. Comme l’ont illustré de récents événements, la clé du succès pour mettre en place une entreprise numérique orientée vers un but précis est d’impliquer tous les employés, à tous les niveaux, dans la transformation de l’entreprise et son parcours ESG. De plus, les entreprises doivent divulguer les risques liés au climat, conformément aux recommandations du groupe de travail sur les informations financières liées au climat (Task force on Climate-related Financial Disclosures – TCFD), d'évaluer les impacts potentiels liés au climat à l'aide d'une analyse de scénarios ; un processus par lequel les organisations imaginent à quoi pourrait ressembler l'avenir si diverses trajectoires climatiques sont réalisées. La pandémie a induit un changement de priorités et encouragé les dirigeants à explorer d’autres manières de travailler et de faire des affaires. La transformation digitale ne disparaîtra pas de sitôt et nous donne l’occasion d’intensifier nos efforts en matière d’ESG et de durabilité.