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ECONOMIE
 
04/10/2006

Qui sont les champions... de la livraison de pizzas

Pizza Hut domine largement le marché. Derrière, l'Américain Domino's et le Français Speed Rabbit sont à l'affût. Mais les acteurs peinent à relancer leurs affaires sur ce marché atone.
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Les résultats des livreurs de pizzas se sont une fois de plus envolés cet été avec la Coupe du Monde de football. Entre 30 et 100 % de ventes supplémentaires selon les enseignes et les matchs joués. Mais une compétition tous les quatre ans ne suffit pas à faire vivre un marché. Et celui de la livraison de pizzas n'est pas florissant. Même s'il représente 80 % du marché total de la livraison à domicile qui s'élevait à 300 millions d'euros en 2003, ce dernier ne progresse pas et à même tendance à stagner, selon Bernard Boutboul, directeur général de Gira-Sic Conseil, cabinet de conseil spécialisé sur le secteur de la restauration.


Quatre acteurs au coude à coude

L'Américain Pizza Hut, filiale de la multinationale Yum Brands qui possède également l'enseigne de restauration rapide KFC, domine le marché en France comme à l'international. Pizza Hut revendique d'ailleurs 35 % de part de marché sur le segment de la livraison. Son chiffre d'affaires national avoisine les 115 millions d'euros en 2005. Mais seule la moitié de ses ventes sont imputables à la livraison et à la vente à emporter, le solde étant réalisé par la restauration sur place. De même, sur ses quelque 110 points de vente, seuls 88 sont uniquement consacrés à la vente à emporter et à la livraison.

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Dans le sillage de Pizza Hut, deux poursuivants sont au coude à coude. Le premier est également une enseigne américaine, arrivée sur le sol français à la fin des années 80 : Domino's Pizza. Elle a enregistré en 2005 un chiffre d'affaires de 44,2 millions d'euros grâce à ses 92 magasins. Le second, Speed Rabbit Pizza, est une entreprise française, créée en 1991 en région parisienne et cotée au marché libre de la bourse de Paris depuis 1996. Avec un chiffre d'affaires de 30 millions d'euros, elle se classe troisième du marché, même si elle devance légèrement Domino's Pizza en nombres de points de vente.

Derrière ces trois chaînes, un outsider est à l'affût : l'enseigne toulousaine La Boîte à Pizza. Fondé en 1986, le Français a progressivement étendu son aire d'influence, se renforce à Paris et en région parisienne et exporte même son concept en Chine depuis 2006. Avec 26 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2005 et 68 points de vente, l'enseigne revendique la meilleure marge bénéficiaire du secteur. Elle vient d'ailleurs d'être sélectionnée pour le programme "Gazelle" récompensant les PME les plus performantes.

Les acteurs de la livraison de pizzas en 2005
(sources : enseignes, Fédération Française de la Franchise, AC Franchise)
Les acteurs de la livraison de pizzas en 2005


Un secteur malmené
Qu'ils soient organisés en chaînes ou intervenants locaux, tous les acteurs de ce marché souffrent de son atonie. Les grandes enseignes de rayonnement national ont ainsi beaucoup souffert à la fin des années 90. Les importantes pertes d'exploitation de Speed Rabbit Pizza ont par exemple conduit le fondateur à quitter la direction de l'enseigne au profit d'un nouvel actionnaire ayant renfloué la société en 1999.

En France, la livraison de pizzas à domicile est considérée comme un dépannage luxueux."

Bernard Boutboul, Gira-Sic Conseil
La santé des acteurs américains n'était pas non plus des meilleures : mise en redressement judiciaire, la filiale française du groupe Domino's Pizza a ainsi été reprise en 1998 par l'Espagnol Telepizza. Le marché hexagonal ne lui ayant pas beaucoup plus réussi, ce dernier s'est d'ailleurs désengagé six ans après, permettant au groupe américain de reprendre sa place. Quant à Pizza Hut, il tâtonne à la recherche d'un nouvel élan mais la maison mère ne mise plus guère sur le marché français et poursuit un plan de transformation en franchise de ses nombreux magasins détenus en propre. Les fonds ainsi libérés devraient alimenter le développement de l'enseigne sur les marchés chinois et asiatiques.


Des spécificités françaises sous-estimées
Parmi les explications de ces difficultés financières et commerciales : la mauvaise prise en compte des spécificités du marché français. Ainsi, les chaînes, tout particulièrement les Américaines, n'ont pas suffisamment adapté leur offre au marché et aux goûts français. En arrivant, Pizza Hut a ainsi essayé d'imposer les pizzas à pâte épaisse plébiscitées par les consommateurs américains, quand les Français étaient plutôt friands de pâte fine. Les acteurs hexagonaux comme Speed Rabbit ont alors commis la même erreur. Laissant ainsi de la marge aux pizzerias indépendantes et à la grande distribution qui restaient ciblés sur la pâte fine. D'un point de vue commercial, l'offre des acteurs est également uniforme : le principe "une pizza achetée, une pizza offerte" s'est en effet généralisée sur le marché au point de ne plus être un critère de différenciation. De même, la gratuité de la boisson pour un certain niveau de commande fait des émules. Difficile donc pour le consommateur de faire son choix sur autre chose que la proximité des enseignes.

Consommation annuelle de pizzas
(par personne, en Kg, source : Domino's Pizza)
Consommation annuelle de pizzas
Mais au centre du problème reste la question de la surévaluation du marché. Avec 10 kg de pizzas par an et par personne, nous consommons un tiers de moins que les Américains. Au-delà de la consommation globale, le problème est essentiellement culturel : "la livraison de pizzas à domicile est considérée par les Français comme un dépannage luxueux, note Bernard Boutboul. Aux Etats-Unis, le livreur est un peu considéré comme un 'ami de la famille' alors qu'en France, il est prié de repartir au plus vite." La livraison est donc le parent pauvre du marché de la pizza.


Une diversification vers la restauration sur place
Les différents réseaux tentent évidemment de redresser la barre en adaptant leur offre. C'est notamment le cas de La Boîte à Pizza qui a décidé de jouer la carte franco-française et de se positionner sur le haut de gamme : pizzas magret-cèpes et thon basquaise côtoient sur la carte les grands classiques du genre. Une différenciation qui vise explicitement à fidéliser la clientèle et qui explique en grande partie la meilleure résistance de l'enseigne toulousaine.

Evolution plus fondamentale, les acteurs se diversifient en développant la consommation sur place. C'est historiquement le cas de Pizza Hut mais le modèle est également retenu par Speed Rabbit et La Boîte à Pizza. Les enseignes aménagent leurs locaux pour qu'ils puissent accueillir quelques tables. Si l'impact sur le chiffre d'affaires semble positif, cette réorganisation entraîne des frais supplémentaires comme le surcoût du loyer, l'emplacement du point de vente devenant un critère stratégique là il constituait avant un point d'économie.

Les acteurs continuent en tous cas d'afficher leur foi dans le marché français. Les challengers sont tout particulièrement à l'affût : quand Speed Rabbit annonce 200 points de vente supplémentaires d'ici 2011, Domino's renchérit avec 500 ou 600 ouvertures sans préciser les délais. Pizza Hut, qui a enregistré des pertes jusqu'en 2004, reste quant à lui plus en retrait et se désengage même de sa vingtaine de restaurants détenus en propre au profit de la franchise. L'occasion pour ses poursuivants de combler l'écart, déjà faible, qui les sépare du leader mondial.

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