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ENTREPRISE
 
21/11/2006

Jean de Corbière (Bruneau)
"L'enthousiasme des handicapés stimule les autres salariés"

Si beaucoup d'entreprises sont réticentes à employer des travailleurs handicapés, Bruneau y trouve bien des avantages. Rencontre avec un DRH convaincu.
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Si moins de la moitié des entreprises françaises respectent la législation qui impose d'employer au minimum 6% de travailleurs handicapés parmi ses effectifs, la société Bruneau peut se targuer d'un taux proche des 8%. Le numéro un de la vente à distance de matériel de bureau mène, depuis de longues années, une politique volontariste dans ce domaine et espère bientôt atteindre les 10 %. Rencontre avec son DRH.

Vos effectifs comptent 7,5% de travailleurs handicapés. Comment vous êtes-vous organisé pour atteindre cet objectif ?
Jean de Corbière. C'est d'abord le fruit d'une politique sociale qui existe depuis l'origine de la société. Nous avons donc acquis certains réflexes et aujourd'hui, nous tâchons de moderniser cette politique. Concernant les handicapés, nous faisons régulièrement appel à des organismes externes pour nous assister et nous effectuons un travail de veille sur les aides et financements que nous pouvons obtenir en matière de formation. De plus, tous les handicapés ne sont pas en fauteuil roulant, et beaucoup de travailleurs souffrent d'un handicap sans l'avoir jamais signalé. Nous les encourageons donc systématiquement à se faire reconnaître, à juste titre, comme handicapés par la COTOREP et la médecine du travail. Cela nous permet aussi d'améliorer leurs conditions de travail en réclamant par la suite des moyens particuliers : poste de travail et matériel adéquats, formation…

Hormis les pénalités à payer, qu'est-ce qui vous incite à mener une politique volontariste à l'égard des travailleurs handicapés ?
Il est important que la dimension éthique de notre projet d'entreprise, perceptible par nos clients, le soit aussi par nos salariés."

Notre démarche relève avant tout d'une culture d'entreprise qui intègre la dimension éthique à tous les niveaux. Nous proposons notamment des produits du commerce équitable et sommes certifié ISO 14001. Il est donc important que cet aspect de notre projet d'entreprise, perceptible par nos clients, le soit aussi par nos salariés. C'est alors que se crée une vraie dynamique d'adhésion des salariés à la politique de l'entreprise. Une fois acquise, cette culture nous procure un bénéfice non quantifiable mais bien réel.
J'ajouterai que les pénalités induites par les nouvelles dispositions qui seront en vigueur dès 2007, seront de toute façon beaucoup plus dissuasives et aucune entreprise ne pourra plus faire l'impasse sur cette question.

Avec qui travaillez-vous pour le recrutement des personnels handicapés ?

Il faut distinguer deux cas de figures. Lorsque nous embauchons un travailleur handicapé, nous passons généralement par les Centres d'aide par le travail (CAT). Les personnes viennent alors travailler dans l'entreprise, accompagnées d'un tuteur tout en restant salariés du CAT, avec qui nous fonctionnons à la manière d'un sous-traitant. Cela nous permet de nous assurer que la personne convient avant de l'embaucher. Mais il nous arrive aussi de recruter un travailleur handicapé, via une société d'intérim, comme pour tout autre travailleur.

Il arrive également que des travailleurs issus de l'entreprise se fassent reconnaître comme handicapés. Nous leur faisons alors faire un bilan de compétences spécifique, avec le PDITH ou le SAMETH et, si nécessaire, des formations qualifiantes, en externe, pour le reclassement.

Le taux d'absentéisme des travailleurs handicapés n'est pas plus élevé que celui des autres travailleurs."

Les relations avec ces organismes se font au coup par coup. Introduire un processus formalisé induirait des pesanteurs administratives inutiles. Cela aurait par contre un intérêt si nous souhaitions communiquer à ce sujet ou si la culture sociale de notre entreprise venait à se perdre et que nous voulions alors introduire un dispositif plus coercitif et systématique de recrutement des handicapés. Dans ces cas de figure, il nous faudrait mettre en place des partenariats formels avec certains organismes.

Comment avez-vous adapté l'organisation du travail à la présence de travailleurs handicapés ?
Ils sont dispersés dans les différents services et placés sous la responsabilité de leur chef d'équipe, qui fait la liaison avec une cellule dédiée au niveau des ressources humaines. De plus, chaque travailleur handicapé a un tuteur, un salarié de l'entreprise qui se porte volontaire pour l'accompagner et se faire l'écho des difficultés rencontrées. Les salariés qui les encadrent sont sensibilisés à la question, mais nous n'avons pas mis en place de dispositif de formation interne. Chaque handicap est différent et il n'y a pas une unique manière d'appréhender leur encadrement.

Quel impact a la présence de travailleurs handicapés sur les relations de travail ?
Et toujours
  L'entreprise paralysée face au handicap
  L'obligation d'emploi en faveur des trvailleurs handicapés
Je crois que l'on a souvent peur d'introduire des travailleurs handicapés dans les effectifs, parce qu'on ne les connaît pas. Or ce sont des gens souvent courageux, très consciencieux et qui se plaignent peu. Ils ont par ailleurs un enthousiasme et une joie à travailler qui stimulent beaucoup les autres salariés. Enfin, contrairement à ce que l'on pourrait penser, le taux d'absentéisme n'est pas plus élevé chez les travailleurs handicapés.

Quels sont les principaux obstacles au recrutement de travailleurs handicapés ?
Le plus difficile consiste à trouver les profils et les compétences recherchés. Or, l'automatisation croissante des chaînes de production, la sous-traitance de nombreuses fonctions administratives et de tout ce qui ne relève pas du cœur de métier de l'entreprise, tend à priver les entreprises de postes non qualifiés sur lesquels il est plus facile de placer un travailleur handicapé. Je pense qu'il est important, dans cette optique, que les entreprises n'externalisent pas tous les jobs d'appoint mais en conservent certains en interne.



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