26/12/01
Techno
Flop 2001 : Les places de marché publiques
Début 2001, les
chiffres prévisionnels diffusés par les
analystes à propos des places de marché
et de leur poids dans le commerce B to B étaient
quelque peu indécents. Pas plus tard qu'en
mai dernier, le cabinet Ovum estimait encore que
le montant total des transactions assurées par
ce biais se monterait à 16,9 milliards de
dollars en 2001, générant au passage quelque
1,6 milliard de dollars pour leurs opérateurs,
les MSP (Marketplace service providers). Aujourd'hui,
le marché déchante puisque seulement 0,8 milliard
de dollars de revenus ont été annoncés
début décembre par IDC, à moins
d'un mois de la fin de l'année.
Places publiques : beaucoup
de perdants, peu d'élus
Avec des revenus dans l'ensemble divisés par
deux, le nombre de cadavres parmi ces MSP n'a cessé
d'augmenter
depuis
le début de l'année. Rien qu'en France
dans l'observatoire du JDNet sur les
start-up en difficulté au deuxième trimestre 2001,
trois échecs cinglants sont cités.
Objet d'un article d'expérience en octobre 2000,
IndustrySuppliers
(industrie lourde) était en cessation de paiement
le 2 avril 2001. En juin, l'arrêt des activités
de b2build
(construction) a succédé au dépot
de bilan d'Etexx
(textile). Dans la construction aussi, on ne peut oublier
le rachat en juillet dernier de Constructeo,
opérée alors par le groupe Vinci, qui
fait aujourd'hui partie du pool d'actionnaires de l'acquéreur
britannique Bricsnet. Et dans l'échange de bande
passante, Band-X
a stoppé en octobre ses activités dans
cinq
pays dont la France.
D'autres secteurs, comme celui des métaux, ont
encore plus souffert. La disparition de MetalSpectrum,
pourtant soutenue par des grands comptes, et de Aluminium.com
n'a pas empêché celle du français
AluminiumFirst
qui comptait sur nos colonnes pour attirer d'éventuels
investisseurs de dernière minute. Peine perdue,
le marché étant littéralement "gelé"...
Le site n'est même plus en ligne, tout comme pour
TradeMatch.com,
l'un des premiers échecs en France. Avec la crise
qui s'annonçait sur les marchés boursiers,
les premiers MSP à souffrir ont été
américains. Il y a juste un an, Ventro - sujet
à une dévaluation record - déplorait
la fermeture simultanée de deux places de marché
publiques : Chemdex (biotechnologies) et Promedix
(matériel médical), préfigurant
la tendance qui allait dominer en 2001.
Parfois, aussi, des leçons ont été
tirées de ces échecs, qui ont évité
aux derniers arrivants en date de reproduire les même
erreurs. Tel a été, par exemple le discours
que AXSMarine
nous a tenu sur son positionnement métier lors
de son lancement à la mi-2001 : "tous ceux
qui se sont basés uniquement sur le modèle transactionnel
ont fait faillite", nous a affirmé son P-D.G.
Mais nous y reviendrons plus tard.
Places
de marché privées : un air de déjà
vu...
D'aucuns, certes, auront aussi à coeur de rappeler
que tout marché immature qui se respecte tend
inévitablement vers la consolidation, avec des
morts sur le bord de la route.
Et
l'on ne manquera pas d'évoquer les succès
du poids lourd Covisint (équipementiers automobiles),
puis de WWRE (Worldwide Retail Exchange) et Transora
(produits emballés pour la grande consommation)
qui ont répliqué l'idée de la première.
Des succès basés sur une mutation de l'activité :
la reprise du modèle public sous une forme privée.
En clair, la plate-forme coûteuse mise en place
propose un accès à toutes les entreprises
du secteur, mais de grands clients de Covisint comme
Ford et Delphi Automotive s'en servent aussi de support
pour leurs places de marché privatives. Et ce
modèle mixte procure les avantages des deux options,
tout en évitant que les géants ne s'observent
sans participer aux transactions.
La disparition de nombreuses places de marché
publiques a donc sonné la retraite des multinationales
vers leurs propres espaces de confiance. L'américain
de la grande distribution Wal-Mart, par exemple, n'a
pris part à aucun projet public. Sans trop polémiquer,
il est possible de dire que ces places de marché
privées n'existent pas. Ou plutôt, le terme
semble surfait, puisqu'il s'agit ni plus ni moins d'extranets
étendus à une collaboration avec de nombreux
partenaires. Tant chez Legrand
que Danel,
c'est bien le terme d'extranet qui qualifie des applications
intégrant ou remplaçant les traditionnels
échanges de données informatisés
(EDI), combinées avec des fonctions de gestion
de la chaîne logistique. Quelle que soit leur
qualification, ces plates-formes offrent des avantages
clairs, tant sur le plan de la sécurité,
que d'une collaboration plus étroite avec des
partenaires (clients, fournisseurs, logisticiens...)
triés sur le volet. Et le grand compte devient
son propre opérateur, maître de ses choix
technologiques liés par exemple à la standardisation
des échanges.
L'eProcurement échoue
dans sa forme primitive
Une collaboration plus étroite... le mot est
lancé. Et pourtant, au départ, c'est l'eProcurement
(la gestion des approvisionnements) qui était
censé générer des économies
importantes au niveau de la fonction Achats des grandes
entreprises. L'enquête
de Deloitte & Touche publiée en
début d'année ne faisait que réfléchir
les discours des grands acteurs du domaine. Aujourd'hui,
HP économiserait 1 % sur ses dépenses
avec l'eProcurement... contre 20 % grâce
à cette collaboration en deux étapes :
au niveau de la conception entre ses équipes
d'ingénieurs, et avec ses fournisseurs dans le
cadre de la chaîne de valeur étendue (lire
interview
récente de I2). CPGMarket,
le concurrent européen de Transora, dévoile
des chiffres intéressants : l'optimisation des
relations avec les fournisseurs à l'aide de processus
collaboratifs génère en moyenne 12 % d'économies
sur les transactions, voire parfois 40 à
65 %.
En attendant l'eProcurement n'est pas mort, ni même
le modèle des places de marché à
100% publiques. Les PME, en effet, n'ont pas vraiment
les moyens de se payer des plates-formes composées
de progiciels dépassant le million de dollars,
sans compter l'intégration et la maintenance.
Ici, l'existence de la zone d'échanges publique
se justifie pleinement, et le
cabinet AT Kearney, filiale de EDS, ne s'y serait pas
trompé. Une orientation sur laquelle compte
beaucoup Seliance,
la "place d'affaires" du Crédit Lyonnais
dédiée aux achats hors production. Mise
en compétition à tort ou à
raison avec Answork
portée de son côté par trois autres
banques, celle-ci a décidé d'accroître
son ciblage des PME... non sans difficultés.
En plus d'une pénétration moins importante
d'Internet dans certains corps de métier, le
modèle doit être clair : faire payer,
par exemple, des services proposés en mode ASP
mais sans trop attendre, sinon les entreprises s'habituent
à la gratuité.
En attendant, pour les grands comptes, les principales
économies sont ailleurs, dans la refonte optimisée
de leurs relations avec leurs partenaires. Cette position
est largement soutenue par le cabinet AMR Research qui
dresse l'état des lieux cruel des dépenses
2001 sur les applications B to B, et prévoit
un redémarrage
plus pragmatique de l'e-business en 2002.
Ça s'est
passé en 2001...
80%
votent pour l'e-procurement (Deloitte/Ariba)
Ovum
déchiffre les tendances de l'immaturité
AluminiumFirst,
de la genèse à l'apocalypse
Pari
difficile de Seliance sur les PME/PMI
Datamonitor
confiant dans le modèle public
I2
et la chaîne de valeur dynamique
Ça devrait se
passer en 2002...
Applications
e-business: moins dure sera la chute (AMR)
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