Henri Bong (Unabiz) "Unabiz a été créée par deux entrepreneurs français pour et par Sigfox"

Le repreneur de Sigfox doit être annoncé ce jeudi 14 avril. Soutenue par le CSE, Unabiz pourrait souffrir de son immatriculation à Singapour. Henri Bong, le cofondateur, détaille au JDN sa stratégie si son offre est validée.

Henri Bong, CEO et cofondateur d'Unabiz. © Unabiz

JDN. Selon nos sources, Unabiz est favori à la reprise de Sigfox. Vous êtes notamment soutenu par le CSE de l'entreprise. Mais votre immatriculation à Singapour requiert l'accord de Bercy. Etes-vous inquiet sur ce point ?

Henri Bong. Unabiz a été créée par deux entrepreneurs français pour et par Sigfox. Il ne s'agit pas d'une multinationale asiatique. Nous avons toujours cru en l'innovation française, que nous avons promue toute notre carrière en tant qu'ambassadeurs de la French Tech en Asie, et que l'on veut aujourd'hui sauver. Notre siège est à Singapour, nous relevons donc du droit singapourien, mais nous sommes considérés comme une entreprise française. Notre ADN, notre culture et le management sont français, ainsi que l'actionnariat - à 38% du capital, dont Engie fait partie. Avec Sigfox, nous voulons mettre en avant une technologie française sur un marché global.

Pourquoi cet intérêt pour Sigfox ?

J'ai fait mes études à l'ISEP, l'école d'ingénieurs du numérique à Paris. Après trois années d'expérience en France au début de ma carrière, j'ai décidé de partir en Asie en 2005 pour y promouvoir les technologies françaises. J'ai travaillé en tant que conseiller commercial senior dans le commerce français, avant d'être responsable régional du bureau de Business France. C'est comme cela que j'ai découvert Sigfox, où j'ai été embauché en 2013 en tant qu'apporteur d'affaires à Singapour. J'ai été leur premier employé en Asie. Avec Ludovic le Moan, cofondateur de Sigfox, nous nous sommes rendus compte que l'Asie représentait un marché stratégique pour l'avenir du groupe. J'ai donc démissionné en 2016 pour créer Unabiz, opérateur Sigfox en Asie, avec Philippe Chiu, camarade de classe au lycée à Paris devenu dirigeant de la sécurité informatique du groupe français Accor. Ensemble, nous voulions développer cette belle technologie française à Singapour. Nous avons déployé depuis 1,4 million de capteurs en Asie. Quand nous avons appris que Sigfox était en redressement judiciaire, nous nous sommes proposés comme repreneurs.

"Au niveau social, Unabiz est le candidat gardant le plus d'employés"

Quels sont vos atouts dans cette reprise ?

Nous connaissons la technologie depuis le début et nous savons comment l'améliorer. Nous avons levé 40 millions de dollars et nous avons démontré que l'on pouvait être profitable avec la technologie Sigfox. Notre plus gros client au Japon, l'énergéticien Nicigas, a connecté plus d'un million de compteurs de gaz, et prévoit d'en déployer encore 10 millions dans les cinq ans, assurant une partie de notre business. Nous avons également des projets en Australie et en Asie du Sud-Est. Nous voulons appliquer notre recette dans les 75 pays où opère Sigfox.

Quelles sont vos propositions dans les critères du dossier ?

Notre proposition a été reconnue comme l'offre la plus complète sur la trentaine de critères étudiés par le CSE. Au niveau social, Unabiz est le candidat gardant le plus d'employés : nous conserverons tous les employés de Sigfox en France et, au niveau de Sigfox Corp, 110 salariés sur les 160 en poste. Nous garantirons aussi leurs intérêts (le PSE sera abondé et le télétravail sans limite sera conservé, ce que n'assurent pas les autres candidats, a indiqué au JDN Antoine Maïer, élu au CSE de Sigfox et représentant des salariés le temps de la procédure judiciaire, soucieux de la reprise des droits). Concernant le prix de cession, nous ne le communiquons pas mais il est deux fois plus élevé que celui des autres candidats. Cela représente un gros investissement mais les compétences chez Sigfox sont uniques. Au niveau industriel, nous prévoyons d'investir en R&D en France car Sigfox doit poursuivre ses travaux dans le protocole radio, l'énergie et la simplicité du système, pour lesquels elle est la meilleure.

"Notre prix de rachat est deux fois plus élevé que celui des autres candidats"

Nous avons depuis le début de la procédure de nombreux soutiens : des employés de Sigfox, des ambassadeurs Sigfox, des opérateurs Sigfox, de nos clients, comme le distributeur d'eau français Sogedo, etc. Le Groupe ZeKat, qui s'est retiré de la procédure, s'est montré positif sur la solidité de notre offre.

Si vous reprenez Sigfox, quelle sera votre stratégie à court, moyen et long terme ?

A court terme, nous nous emploierons à sécuriser les services et à nous assurer que les offres soient maintenues dans leur prix et qualité de service.

"La priorité sera donnée à l'ouverture du protocole"

A moyen terme, la priorité sera donnée à l'ouverture du protocole. Je crois en la convergence des LPWAN. J'échange avec des membres des écosystèmes LoRa, LTE-M et NB-IoT, Weightless, etc. Unabiz a déjà déployé 200 000 objets sur d'autres technologies et a annoncé des partenariats avec Kinéis et Astrocast pour que la technologie soit compatible avec l'IoT satellitaire. Nous voulons construire des ponts entre les technologies. La technologie Sigfox ne doit plus être vue comme concurrente à LoRa mais complémentaire, selon les usages, pour fournir le meilleur aux clients selon leurs besoins.

A long terme, nous voulons aller au-delà de la connectivité en proposant des solutions complètes. C'est une erreur de ne proposer qu'un réseau aux clients finaux. Mais cela ne veut pas dire que ce sera des solutions d'Unabiz, on ne peut pas tout faire et je crois en l'écosystème IoT.

Henri Bong est PDG d'Unabiz, fournisseur de services IoT dont le siège est à Singapour. Il dirige une équipe de 90 employés de Singapour, de Taïwan, de France et du Japon. Avant de fonder Unabiz, Henri Bong était directeur du développement commercial et des ventes chez Sigfox en Asie.