Bonnes feuilles : "Quand Google défie le droit" Google se met à dos les photographes
France : SAIF c. Google
En France, les juridictions supérieures ne se sont pas encore prononcées. Pour le moment, seule une décision de première instance écarte toute responsabilité pour Google Images.
Dans l'affaire SAIF c. Google, une société de gestion des droits de photographes (SAIF) a, en 2005, assigné Google pour reproduction illicite des photographies de ses membres (dont les célèbres Doisneau, Cartier-Bresson, Depardon, etc.). Dans une décision du 20 mai 2008, le tribunal de grande instance de Paris a estimé que le droit applicable n'était pas le droit du pays où le dommage a lieu (le droit français) mais bien le droit du pays où les actes potentiellement illicites étaient commis (c'est-à-dire les États-Unis puisque les serveurs de Google y sont localisés).
Appliquant le droit américain, et en particulier l'exception dite d'" usage loyal" (évoquée ci-dessus), le tribunal de grande instance a considéré l'usage comme "loyal" en raison de son caractère non commercial et de l'absence de la preuve d'incidence négative sur l'exploitation des oeuvres. Pour le tribunal, l'activité de recherche "n'est pas lucrative en soi [...] Seule l'association de liens dit AdWords en parallèle à cette activité est génératrice de revenus". Cette dissociation entre le gratuit (l'outil de recherche) et le payant (les publicités AdWords) paraît un peu factice : les deux faces gratuites et payantes sont indissociablement liées puisque les résultats de recherches sont habituellement accompagnés des liens sponsorisés. Le tribunal discute aussi, mais de manière un peu confuse, la technique d'indexation utilisée par Google. En fait, le moteur de recherche ne stocke pas les images qu'il indexe, mais établit des hyperliens vers des sites qui mettent à disposition les images, parfois sans en avoir l'autorisation.
C'est donc la question de la responsabilité indirecte pour hyperliens automatiques vers des contenus illicites que pose cette pratique. Elle n'est pas du tout discutée dans la décision commentée. Du reste, on sait qu'en général l'établissement de liens automatiques vers de tels contenus n'a pas été considéré comme une forme d'atteinte indirecte au droit d'auteur, à l'inverse du placement de liens manuels vers des contenus que l'on sait illicites et que l'on fait "siens", par exemple en encourageant le téléchargement de ces contenus. Le moteur de recherche, toutefois, reproduit directement sur la page de résultats qu'il génère des images en format standardisé (les "vignettes"). Pratique qui, contrairement aux hyperliens, peut donner lieu à une atteinte directe au droit de reproduction. C'est apparemment cet usage des vignettes par le moteur de recherche que le tribunal considère comme un "usage loyal" à la lumière du droit américain..."