Pour gagner la bataille digitale : rêve et risque

En matière de digital et de start up, la France n'a rien à envier à l'Oncle Sam. Elle possède bien des atouts pour occuper les premières places d'une économie mondialisée et digitalisée. A condition de prendre des risques.

Il est toujours impressionnant d’en avoir un plus grand. De le voir se faire caresser, toujours dans le bon sens. Et contrairement aux apparences de devoir être aussi protégé de temps à autre, pour le bonheur et la sécurité de tous. Oui c’est vrai. Mais la nature à horreur du vide et adore la diversité. C’est pourquoi en avoir un petit, vigoureux, créatif et opportuniste peut être un atout majeur. Il suffit de faire autrement !

Néanmoins 2 conditions sont indispensables pour que la chance profite au petit. Il faut faire rêver malgré le fantasme qui attribue plus de vertu au grand et pour cela prendre des risques. Calculés.

C’est ainsi que le petit Français pourrait résister largement au grand américain. Ou en tous cas se faire une place tricolore à côté d’un drapeau emplit de bandes et d’étoiles. Ces bandes qui signifient une capacité à dérouler mondialement des process qui aboutissent au plaisir économique et des étoiles plein les yeux. Rêve et Risque, les "mamelles" de cet obscur objet du désir qu’est la croissance. Un petit marché peut être un grand tremplin pour nager dans la piscine des grands. Car la preuve du concept et la reconnaissance du consommateur, sont les préliminaires indispensables au plaisir économique.

Les USA ont l’avantage du grand. Et toutes ses faiblesses. Mais à l’heure du digital, la souplesse et la créativité, qui ne sont pas ses atouts principaux (les USA inventent des process duplicables sans limite, et sont souvent déroutés quand il faut les adapter), se révèlent de faibles désavantages, tant le monde tend à l’uniformité de ses usages, comportements, et modèles de développement. L’uniformité donne un avantage certains à la capacité de répliquer et d’industrialiser. Ce qui est la caractéristique principale des modèles américains. Le même hamburger partout dans le monde, le même réseau social, les mêmes outils pour la logistique pour un consommateur qui tend à acheter la même chose partout dans le monde. Les USA ont un marché mondial, non pas naturellement, mais parcequ’ils l’ont décidé. C’est culturel et naturel. Ils veulent dominer. C’est la raison pour laquelle les USA, malgré ses 65 millions de personnes sous le seuil de pauvreté et son endettement massif, est le seul pays du monde qui continue à faire rêver. Le marché envie la Chine, mais personne n’envisage de devenir Chinois !

Ils ont fait du rêve le carburant de l’économie. L’américain qui naît aux USA, ou le migrant qui s’y installe rêve de faire partie de ce pays, et de s’offrir une part du rêve et non de s’opposer au système, qui commence par l’acquisition d’une carte de crédit permettant de s’endetter comme tout le monde. On s’endette quand on croit que l’avenir sera meilleur que le jour présent, on s’endette (souvent) quand on pense que sa situation sera meilleure demain qu’aujourd’hui et que le remboursement sera facile. C’est vrai pour le particulier. C’est vrai pour l’investisseur. Il croit au futur et prend le risque nécessaire pour se l’offrir. C’est le corollaire indispensable. Le risque de s’offrir un avenir.

Face à ces 2 atouts majeurs, nous avons la France. Une France qui a fait du risque un ennemi. Qui a érigé la précaution en principe. Nous savons maintenant en comparant les statistiques économiques des pays développés, que ceux qui font de la précaution un principe, font de la réussite une exception. Nous devons sortir de cette spirale. Nous devons élever au rang ultime de l’utilité publique la prise de risque, l’accompagner, la dorloter, la cajoler, la récompenser et même la compenser quand nécessaire. C’est le doudou de notre enfance, nous devons dormir avec et devrions pleurer quand nous le perdons. Nous l’avons perdu. Nous devons enfourcher le risque comme notre première bicyclette. Nous savons que nous tomberons, mais l’objectif est plus important que le chemin pour l’atteindre. Il mérite quelques sacrifices et quelques égratignures. Quand nous pensons que nous pourrons parader devant nos parents, amis et famille, en lâchant les mains du guidon, nous prenons un risque en poursuivant un rêve. C’est ce que la France doit reprendre en main.

Vive le risque ! 

L’économie est financée par le risque, par le privé, et à 20% seulement par les banques. Et les USA appliquent avec une forte légèreté les principes de Solvency qui ont mis un boulet aux pieds de nos banques dont nous dépendons dans nos entreprises à près de 80% ! Du suicide. L’Europe veut jouer les bons élèves, les USA veut être le premier de la classe. L’Europe respecte les règles à la lettre même quand ces règles sont une véritable balle dans nos pieds d’entrepreneurs. Les USA font ce qui les arrange. Tant que nous n’aurons pas compris cela et décidé d’être un peu plus égoïstes, nous serons les Poulidor de l’économie mondiale.

Même New York qui brillait par son investissement dans la finance et cette économie du trading qui fait son beurre sur le dos des entreprises a compris que les métiers à faible valeur ajoutée et forte valeur volée, n’appartenait plus à l’avenir. New York, Boston, ont pris le train des start-up et du risque et font rêver à nouveau. Les USA ont Uber et l’argent du beurre dirait un Normand comme moi ! Ils attribuent plus de vertu (sauf encore pour l’immobilier) à l’argent produit par ceux qui transpirent que par ceux qui dorment.

Le risque amène le rêve et réciproquement. C’est pourquoi les USA rêvent au maintien et au développement de leur suprématie par le digital. Tout est misé sur le rouge et pair. Un jeton sur chaque bande du drapeau et toujours des étoiles plein les yeux. 76% de la capitalisation boursière est ainsi concentrée sur les GAFAM. Bezos a été quelques instants la semaine passée l’homme le plus riche du monde à la place de Bill Gates. Et ces réussites font rêver des générations d’Indiens, de Chinois, d’Européens, qui viennent chercher ici, ce que l’Europe ne leur donne pas. L’Europe ne fait plus rêver, elle désespère.

Alors quel chemin devrait suivre le petit français pour devenir grand ? En quelques lignes :

Déclarer que la France va devenir, avec l’Europe dans son sillage, le pays d’avenir que tout le monde enviera. C’est de la communication. Macron s’y emploie. Trouver 50 milliards à investir sur l’avenir. Gagner les JO (mais surtout gagner des médailles). Parler de réussite à chaque instant et dire au Français du matin au soir que nous pouvons gagner. Nous devons produire du foi gras économique. De qualité. Gaver les esprits de l’envie de réussite comme on gave de belles oies qui produiront un met que tout le monde nous envie.

Osons récompenser le risque

Tout d’abord en enlevant la burqa que nous lui avons imposé pour lui voiler la face. Commencer par supprimer le principe de précaution. Puis par une politique fiscale appropriée, faire du français un actionnaire de ses entreprises, par tous moyens possible (actionnariat salarié, crowdfunding et lending…) à la fois en l’y incitant fiscalement, en compensant ses pertes ou sa mise, et en rendant moins attractifs les investissements qui dorment. L’observatoire de l’Ubérisation avait proposé un fonds evergreen, un fonds sans fin, qui permettrait de prendre plus de 10 milliard par an à l’assurance vie, la plaie de notre économie, qui aspire et retient dans les marécages de la rente 1 600 milliards d’euros qui ferait de la France un potentiel champion de l’économie mondiale.

Miser sur les projets à envergure mondiale

Israël l’a compris, c’est le monde ou rien. Les investisseurs qui misent le paquet sur les start-up israéliennes, ne retiennent que les projets mondiaux. Sinon rien. Et cela marche. Il y a plus d’entreprises israéliennes côtées au Nasdacq que tous les pays d’Europe réunis ! Et remettre une médaille d’or à toutes celles qui  réussissent à redresser ainsi notre terrifiante balance du commerce extérieur. Car il faut donner envie. Ici les entrepreneurs et entreprises qui réussissent sont encensées, récompensées, adulées et dans un marché présumé libéral, protégées. Malgré quelques procès et attaques, personne ne souhaite ici la disparition des pépites américaines. C’est une pyramide infernale, dans laquelle toutes les plateformes dépendent des systèmes mis en place par quelques uns (les GAFAM à nouveau) et dans laquelle chacun investit dans l’autre. Microsoft reste l’un des plus gros actionnaires de Apple, et est actionnaire de Uber aux côtés de Google !

Accompagner nos projets mondiaux

Comme pour nos enfants, nous devons les protéger un temps. Non en fermant le marché à leurs concurrents mais en leur donnant pour un temps, une préférence. Du consommateur à l’Etat en passant par les grandes entreprises, chacun doit être incité à donner la préférence à nos pépites. Afin que leur réussite soit un peu la nôtre.

C’est ainsi, que ce mouvement mystérieux qui créée l’attraction se mettra indiciblement en marche. La France deviendrait alors progressivement, le pays où il faut être. En développant des modèles plus centrés sur l’humain et plus socialement compatibles avec notre culture, nous devons financer massivement, des modèles alternatifs, digitaux, les protéger un temps et en rendre les français fiers et actionnaires. C’est par ce risque, que l’on s’offrira le rêve.

Comme les USA nous devons faire en sorte qu’une seule ville ou région n’ait pas le monopole du risque et de l’attractivité. C’est pourquoi, si Paris se doit de donner l’exemple, il faudra très vite y entraîner les autres métropoles. Un pays centré sur moins d’un tiers de sa population ne créera pas une dynamique de rêve homogène, mais un sentiment de frustration destructeur. Lyon, Marseille et les autres devront voir se pencher les mêmes petites fées sur leurs berceaux. Formation, investissement, communication, incitation et accompagnement. Partout, tout le temps.

Le petit ne regardera plus le grand d’en bas, en enviant sa taille, mais en vantant son agilité, qui fera de lui l’objet clarifié d’un désir retrouvé. Nous devons nous inspirer des USA, d’Israël, mais en nous réappropriant les modèles pour les ramener dans notre monde et notre culture. Nos cultures Européennes. Et ainsi ré enchanter un continent qui a les atouts, mais pas la vista. La taille mais pas la dynamique. Montons sur le vélo, donnons lui un rythme et retrouvons la magie de la vitesse et la griserie de la fierté.