Journal du Net > Management >  Création de marque : les contraintes juridiques (Gérard Delile, Avocat à la Cour)
Expert 
 
avril 2005

Par Gérard Delile, Avocat à la Cour (Cabinet Salans)
Création de marque : les contraintes juridiques

Construire une marque n'est pas qu'une affaire de stratégie et de marketing. Le droit des marques instaure des règles strictes pour votre bien et celui des autres.
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Cinq principes pour
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Cinq principes pour positionner une marque

Les marques font rêver. Selon une enquête publiée en 2002 par BusinessWeek, la marque la plus chère du monde, Coca-Cola, était évaluée à 69, 64 milliards de dollars, et la centième marque citée dans la même enquête, Armani, valait encore… 1, 51 milliard de dollars.

Redescendons sur terre. La "marque de fabrique, de commerce ou de service" est un signe permettant de distinguer les produits ou services d'une entreprise de ceux d'une autre entreprise. Elle peut consister notamment en un ou plusieurs mots, un nom patronymique, des lettres, chiffres, sigles, un logo, et même des sons ou des hologrammes, ou une combinaison de plusieurs de ces éléments. Elle permet à l'entreprise de constituer, puis de fidéliser, une clientèle, en indiquant l'origine du produit et en constituant une garantie de qualité. La marque confère aussi à son titulaire un droit de propriété absolu qui l'autorisera ensuite à interdire l'usage, par un tiers, d'une marque identique ou similaire susceptible de créer un risque de confusion avec la sienne.

Pour agir en toute sécurité juridique, il est essentiel de :
Savoir choisir sa marque
Connaître les droits reconnus au titulaire
De prévoir une protection internationale

Savoir choisir sa marque
La propriété d'une marque s'acquiert par son dépôt et son enregistrement auprès de l'Institut national de la propriété industrielle (INPI). La marque n'est ainsi protégée que pour les produits et/ou services désignés dans l'enregistrement. Ainsi, les deux marques "Mont Blanc" peuvent coexister à la fois pour des crêmes desserts et des stylos haut de gamme. L'INPI vérifie si la marque n'est ni trompeuse, ni contraire à l'ordre public. Il contrôle aussi que la marque ne décrit pas, d'une manière nécessaire dans le langage, les produits et services qu'elle désigne, ou une qualité de ceux-ci. Par exemple, l'INPI rejettera une demande d'enregistrement de la marque "Chaise" pour désigner… des "chaises", ou même du "mobilier".


Deux mois pour faire opposition à l'enregistrement d'une marque"


La marque ne doit pas non plus être identique ou similaire à une marque antérieure désignant des produits similaires, ni à la dénomination sociale d'une entreprise agissant dans le même domaine d'activité. Les titulaires de droits antérieurs ont ainsi la possibilité de faire opposition à l'enregistrement d'une marque dans les deux mois suivant la publication de la demande au Bulletin officiel de la propriété intellectuelle. L'INPI, qui ne procède à aucune recherche d'antériorités, peut enregistrer deux marques identiques désignant les mêmes produits. Il est donc indispensable que le déposant ait procédé lui-même à des recherches parmi les marques en vigueur en France et aussi parmi les dénominations de sociétés inscrites au Registre du Commerce. Il se fera, de préférence, assister d'un professionnel, avocat ou conseil en propriété industriel, qui analysera les marques et les dénominations sociales antérieures retrouvées dans les listes fournies par l'INPI.

La marque sera alors enregistrée pour une période de dix ans, période renouvelable indéfiniment, moyennant le simple paiement d'une taxe. Néanmoins, pour conserver son droit de marque, le titulaire devra en faire une exploitation sérieuse pour tout ou partie des produits pour lesquels elle a été enregistrée. En effet, si la marque demeure inexploitée pendant une période de cinq ans, tout tiers intéressé peut demander en justice la déchéance des droits du titulaire, soit totale, soit pour certains produits seulement.

Connaître ses droits
L'enregistrement d'une marque donne des droits au titulaire. Une marque enregistrée permet, tout d'abord, d'agir en contrefaçon afin de faire cesser l'usage d'un signe identique ou similaire entrepris par un concurrent, d'obtenir des dommages et intérêts pour le préjudice subi, ainsi que la destruction des marchandises contrefaites. Cette action efficace est renforcée par une arme redoutable : la saisie contrefaçon, qui permet, sur autorisation d'un juge, d'envoyer un huissier chez le contrefacteur avant qu'il ne soit informé des soupçons pesant sur lui afin de recueillir les preuves (notamment comptables) de l'usage illicite. L'huissier pourra aussi saisir des échantillons de produits contrefaisants. Après avoir fait pratiquer une telle saisie, le titulaire est tenu de porter le litige devant un tribunal dans les quinze jours.


Une marque enregistrée en France ne sera protégée qu'en France"


Ensuite, le titulaire d'une marque peut valoriser celle-ci en concédant des licences et sous licences de marques, ou bien en créant une franchise autour de celle-ci. Une marque peut également être cédée pour l'ensemble des produits qu'elle désigne ou pour une partie seulement de ceux-ci. Dans tous les cas, ces transferts doivent être inscrits sur le Registre national des marques tenu à l'INPI pour être opposables aux tiers.

Etendre la protection à l'international
A l'heure de la globalisation et de l'Internet, il est important de souligner qu'une marque enregistrée en France ne sera protégée qu'en France. Aussi, afin d'optimiser la protection d'une marque, il est essentiel d'analyser le marché géographique sur lequel la marque a vocation à être exploitée. Etendre sa protection à l'étranger passe principalement par trois moyens :
le dépôt national direct dans un ou plusieurs pays étrangers
le dépôt d'une marque communautaire, qui couvre les 25 pays de l'Union européenne par un titre unique : l'enregistrement est délivré par l'Office d'harmonisation du marché intérieur (OHMI) à Alicante, après examen de la marque, en application d'un droit unifié dans tout le territoire de l'Union
une demande d'extension internationale d'une marque française ou communautaire : la demande s'effectue auprès de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), situé à Genève qui regroupe 77 pays dont les Etats-Unis, la Chine et le Japon.

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Certes, l'enregistrement et le maintien en vigueur d'une marque, voire d'un portefeuille de marques, ont un coût. Mais, il s'agit aussi d'un investissement indispensable à la conquête et au développement des marchés de l'entreprise ainsi qu'à leur protection. Ne pas procéder aux formalités d'enregistrement risque d'exposer l'entrepreneur à perdre le bénéfice de tous ses autres efforts au profit d'un concurrent peu scrupuleux qui déposera la marque avant lui. Car il faut savoir qu'en matière de marque, le premier arrivé est le premier servi. Le droit sur la marque est donc parfois le prix de la course.

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