Monocloud plutôt que multicloud ? Gare à la simplicité

Monocloud plutôt que multicloud ? Gare à la simplicité Comme dans l'informatique traditionnelle, mieux vaut éviter de multiplier les fournisseurs au moment de s'orienter vers l'informatique dans les nuages. Mais l'exercice peut se révéler ardu.

Il y a quelques années, le débat faisait rage entre les défenseurs des systèmes d'information "tout intégrés" et les partisans du "best of breed" promoteurs d'une informatique découpée en applications. Prônée par les éditeurs d'ERP, au premier rang desquels Oracle et SAP, la première voie se voulait plus simple à appréhender, en tout cas sur le papier. Beaucoup plus complexe, la seconde impliquait de gérer plusieurs briques logicielles en parallèle, mais aussi de lancer des chantiers d'intégration pour les connecter entre elles. Au final, un grand nombre de DSI se sont orientés vers des stratégies combinant les deux logiques. Avec à la clé la mise en œuvre d'un ERP central (intégrant les processus métier les plus standards) associé à des systèmes métier périphériques pour répondre aux spécificités du business.

A l'heure du cloud, on se retrouve plongé dans un débat assez similaire. Il est en effet plus que tentant pour une entreprise de rationaliser ses choix autour d'un ou quelques fournisseurs de cloud. Comme dans l'ancien monde, la démarche simplifie l'intégration applicative et évite d'avoir à former les équipes IT à de multiples environnements. Limitant le nombre de providers de cloud, cette logique permet dans le même temps d'optimiser les coûts en favorisant l'achat de ressources informatiques en gros volumes (lire l'article : Comment anticiper les coûts sur un cloud public).

Dans le cas d'une start-up dont l'activité est par définition encore peu diversifiée et les besoins informatiques assez homogènes, une politique monocloud peut se révéler de ce point de vue des plus intéressantes. A l'heure de faire ses preuves en termes de business model, elle permet d'éviter de se disperser sur de multiples plateformes. Jeune pousse française spécialisée dans les apps musicales, MWM est l'un des derniers cas d'école sur ce terrain. Tous ses développements sont en effet concentrés sur un cloud unique : Google Cloud Platform (lire l'article : Cette start-up française se déploie sur le Containers as a Service de Google).

PSA et Société Générale, en faveur du multicloud

Dans le cas de grands groupes, l'approche sera forcément différente. Pour ce type d'acteur, "le monocloud n'existe pas. Ces entreprises ont besoin de développer des catalogues de services cloud riches, pour répondre à une variété de contextes, ce qui implique par conséquent de recourir à plusieurs fournisseurs, de IaaS, PaaS et SaaS", estime Thomas Sarrazin, directeur technique et responsable de la communauté des architectes de services d'infrastructure cloud chez Capgemini. Mais là encore à l'instar du best of breed d'antan, l'architecture à mettre en place pour ce type de chantier peut vite se complexifier. "Pour orchestrer un tel catalogue, une cloud management platform se révélera nécessaire, tout comme une infrastructure de sécurité et d'interconnexion réseau", précise Thomas Sarrazin.

En France, la piste du multicloud (et plus précisément du multi-IaaS/PaaS) a notamment été retenue par le groupe PSA ou encore la banque d'investissement de la Société Générale (GBIS). Tous deux sont en train de bâtir des infrastructures de cloud hybride à base de containers Docker, qui doivent permettre, à terme, de lancer des passerelles vers plusieurs IaaS publics.

Des approches différentes chez Veolia et Auchan

Mais pour Thomas Sarrazin, mieux vaudra "quand cela est possible" définir une politique de groupe coordonnée avec, pour chaque catégorie de cloud (IaaS, PaaS, SaaS...), le choix d'un fournisseur unique de référence. Objectif : aller dans le sens d'une harmonisation technologique et d'une rationalisation des achats. Et ce, quelle que soit l'activité. C'est précisément la stratégie retenue par Veolia Global Entreprises, l'une des principales entités du groupe Veolia (spécialisée dans les systèmes de traitement d'eau et de déchets spéciaux). Aux côtés des applications G Suite de Google pour la bureautique, cette entreprise de 30 000 salariés a retenu Amazon Web Services comme IaaS unique dans l'optique d'y migrer ses principaux progiciels métier (hormis la gestion de la relation client pour laquelle l'offre SaaS de Salesforce a été retenue, lire l'article : Veolia Global Entreprises bascule 30 000 salariés dans le cloud).

Même approche chez Auchan Retail France qui a aussi fait le choix d'un IaaS unique. L'activité de commerce alimentaire d'Auchan dans l'Hexagone s'est tournée vers l'offre de cloud dédié d'OVH (Dedicated Cloud), basée sur la technologie VMware, pour venir compléter une plateforme de virtualisation interne reposant sur l'offre du même éditeur (lire l'article : Auchan Retail France gagne en compétitivité grâce à un broker de cloud).

Et les sociétés de taille moyenne ?

"Dans le cas des sociétés de taille moyenne, nous recommandons également de recourir à plusieurs fournisseurs de cloud public. Ce n'est pas bon de mettre tous ses œufs dans le même panier. Mieux vaut faire jouer la concurrence, et ainsi engendrer une émulation commerciale et technologique sur le marché", estime Franck Lecaillon, directeur technique d'Econocom. Pour accompagner ses clients vers le nuage, l'ESN belge est en train de construire un environnement de cloud hybride embarquant un broker capable de piloter des architectures aussi bien sur des IaaS/PaaS privés que publics.

Chez Capgemini, on préfère orienter les clients vers des offres de brokering de cloud du marché, commercialisées par exemple par HP ou Dell. Le géant français des services IT s'est par ailleurs doté d'outils de migration maison pour gérer le replatforming d'applications existantes, quels que soient les clouds ciblés par ses clients (AWS, Microsoft Azure, Google Cloud Platform…).