Sébastien Missoffe (Google) "L'IA va accélérer sur le secteur de la publicité cette année"
Le directeur général de Google en France livre au JDN sa vision d'une année 2025 rythmée par l'IA et revendique la place de "partenaire technologique des entreprises et des médias" en France.
JDN. Quelle est votre analyse sur les enjeux majeurs qui se présentent à l'économie en général et au marché de la publicité digitale en particulier cette année en France ?

Sébastien Missoffe. 2025 sera l'année de l'IA en action : on passe du "waouh" au "how", à son application concrète. En France cela démarre vite puisque le pays accueille le Sommet pour l'action sur l'intelligence artificielle, les 10 et 11 février prochains. Il s'agira d'un moment clé pour réfléchir aux avancées technologiques et à la place de la France et de l'Europe dans la gouvernance mondiale de l'IA. En 2025, les entreprises françaises devront continuer d'être accompagnées dans l'adoption et l'utilisation de l'IA. C'est ce qui leur permettra de devenir plus compétitives et de gagner des parts de marché. Cela suppose la structuration de leurs données dans le cloud, révolution préalable à celle de l'IA, mais également des compétences humaines.
L'IA va également accélérer sur le secteur de la publicité cette année. On verra émerger de plus en plus de formats "intelligents", notamment en vidéo, l'IA générative facilitant la création de vidéos publicitaires pour un nombre plus important d'annonceurs. On observera également de nouvelles avancées dans le domaine de la mesure pour que les marques tirent le meilleur parti de leurs données propriétaires. Je pense notamment aux nouveaux modèles de Marketing Mix Modeling (MMM), une des solutions surs lesquelles Google continuera d'investir.
Et concernant l'ambiance générale en ce début d'année ?
L'incertitude n'est certes pas favorable à l'optimisme. Plus vite les entreprises françaises connaitront les grandes décisions d'agenda économique et budgétaire plus vite elles pourront se projeter. Les chefs d'entreprises attendent cette visibilité. J'espère que 2025 sera une année offensive pour ces derniers avec l'incroyable champ des possibles que leur ouvre l'IA.
Quelles sont vos priorités pour Google en France en 2025 ?
Le premier enjeu pour Google est de continuer d'innover et d'apporter les meilleures réponses à ses utilisateurs. Nous avons connu beaucoup de progrès en 2024 notamment avec Gemini, le lancement de NotebookLM, disponible en France depuis l'été dernier, et les évolutions sur le Pixel 9. Nous allons cette année continuer de faire évoluer notre moteur de recherche, Google Docs et Gmail avec de nouvelles fonctionnalités afin que l'IA apporte des bénéfices concrets à nos utilisateurs. 2024 a également été marqué par le lancement d'AI Overviews, qui améliore de manière significative l'expérience de recherche de nos utilisateurs aux Etats-Unis et dans la centaine de pays où elle est live.
Ma deuxième priorité en France est de continuer de développer le travail que nous réalisons avec les annonceurs français. Cela inclura en 2025 plus de mesure, de contrôle de nos outils et de formats innovants grâce à l'IA générative. Aujourd'hui, dans le monde, 80% de nos utilisateurs utilisent au moins un produit de Google qui a de l'IA.
Enfin, nous voulons notamment continuer d'accompagner les entreprises françaises dans leur transformation à travers le cloud, la data et l'IA. C'est ce que nous faisons par exemple avec la CMA CGM sur l'identification des meilleures routes et sur la logistique, ou pour permettre à BFM et à La Tribune de gagner en productivité grâce à l'IA. Ou encore avec Air France, sur l'expérience client. Je regrette qu'on se serve du terme Gafam, qui mélange des réalités business et de modèles économiques très différentes. Aujourd'hui Google est aussi et de plus en plus un partenaire technologique des entreprises et des médias.
Quand comptez-vous lancer AI Overviews en France ?
Nous n'avons pas encore établi de date précise. Nous essayons au préalable d'apporter des réponses à toutes les questions et inquiétudes qui ont été formulées par les organismes de régulation (référence à l'évaluation de la conformité d'AI Overviews au Digital Markets Act, ndlr).
Comment analysez-vous, vu de France, l'actualité juridique de Google aux Etats-Unis sur le search et l'adtech ?
Les procédures étant en cours je n'ai pas le droit de les commenter. Mais concernant le moteur de recherche, il est important de préciser que le succès de Google dépend du choix qui est offert aux utilisateurs. En Europe nous pouvons le constater à travers les décisions que Google a prises, en conformité avec le DSA et le DMA : aujourd'hui, lorsque l'utilisateur achète un téléphone portable en Europe, il est invité à choisir le navigateur et le moteur de recherche. En 2024, nous avons réalisé 5 000 changements pour améliorer notre moteur de recherche au niveau mondial. Le fait que les utilisateurs choisissent Google parce que nous innovons et que nous proposons la meilleure solution est et restera au cœur de notre engagement en France et partout dans le monde (concernant le procès search, Google a déjà annoncé qu'il va faire appel de la décision de la Cour fédérale de le juger coupable de monopole dans la recherche en ligne, mais la procédure exige que l'entreprise dépose d'abord des propositions de mesures correctives, ce que l'entreprise a fait en décembre dernier, ndlr).
Quant à l'adtech, force est de constater qu'il n'y a jamais eu autant de concurrence. Il suffit de voir le nombre de nouveaux acteurs et de partenaires technologiques dans ce secteur où l'IA continue également à rebattre des cartes. Le marché de l'adtech n'a jamais été aussi concurrentiel partout dans le monde et cela a été au cœur de notre réponse (la décision de ce procès est attendue à tout moment en ce début d'année ; l'essentiel de la défense de Google est disponible sur ce lien, ndlr).