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19/06/2007
Les clés pour manager un centre d'appels
Les centres de contacts sont, pour beaucoup d'entreprises, l'interface essentielle avec les clients. Paradoxalement, le rôle des téléopérateurs est encore trop peu pris en considération. Nos conseils pour bien les manager et valoriser une fonction qui tend à devenir stratégique.
Les limites du travail "à la chaîne" Travail répétitif, clients pas toujours très aimables, cadences de travail
accélérées, notamment en raison de l'usage de scripts qui dictent au téléopérateur,
presque mot à mot, le discours à tenir
Les centres d'appels sont bien
souvent présentés comme de véritables usines de services.
Pour Eric Stevens, professeur de marketing et de management des activités de services à l'Escem, cette image négative est en partie justifiée : "beaucoup de centres d'appels sont gérés dans une logique de productivité à très court-terme, par des managers qui se focalisent uniquement sur un ratio chiffre d'affaires sur taux horaire." Revers de la médaille, ces centres font face, de façon chronique, à des taux élevés de rotation du personnel et des absences pour maladies nettement plus fréquentes qu'ailleurs. Un turnover excessif qui finit par coûter cher et rendre les actions de formation de plus en plus difficiles à rentabiliser.
Développer l'esprit d'équipe Certaines initiatives mises en place dans plusieurs centres d'appels ont permis de redresser les courbes de fidélisation du personnel en impliquant mieux les téléopérateurs dans le travail d'équipe. "Ces centres ont obtenu de bons résultats en faisant travailler les téléopérateurs en petites groupes, de dix à quinze personnes, autour d'un manager opérationnel", explique Eric Stevens. Une telle organisation favorise la concertation et le dialogue lorsqu'il y a des problèmes, et rend les agents plus solidaires les uns des autres, en les intéressant financièrement aux résultats de l'équipe. C'est le choix qu'a fait un grand opérateur de téléphonie mobile, en mettant en place un système de rémunération variable hybride, qui panache les performances individuelles et collectives.
Autre avantage d'une telle approche, le management peut impliquer les équipes dans l'évaluation qualitative de la satisfaction client ou dans l'amélioration des procédures. En les considérant en véritables professionnels et comme des maillons de la réussite de l'entreprise, les téléopérateurs se sentent valorisés dans leur fonction, tandis que le management peut bénéficier en retour de précieux éléments pour mesurer la satisfaction client.
Passer d'une logique "produit" à une logique "client" Pour Eric Stevens, "La première vague basée sur la productivité et les délocalisations est désormais passée. A mesure que la qualité de la relation client devient un argument de vente, la profession de téléopérateur se structure." Cette évolution conduit un nombre croissant de centres d'appels à faire passer leur téléopérateur d'une spécialisation "produit" à une spécialisation "client". Dans le premier cas, le téléopérateur, expert sur un produit, prend en charge les requêtes et réclamations pour tous les types de clients. "Cette démarche, encore appliquée par de nombreux centres d'appels, est valable pour certains produits très techniques. Mais, dans la plupart des cas, elle s'avère dépassée car elle entraîne une trop forte déperdition en termes de responsabilisation des agents et de suivi des clients", constate Eric Stevens.
En adoptant une spécialisation "client", un centre d'appels oblige les téléopérateurs à une connaissance plus transversale et approfondie des produits et des métiers de la société. Cela accroît aussi leur responsabilité et leur implication. "Ils peuvent ainsi prendre en charge un portefeuille de clients, assurer un suivi ou encore réaliser des ventes croisées, grâce à une connaissance fine des besoins des clients" explique Eric Stevens. En outre, l'entreprise qui suit cette démarche peut assurer un traitement des réclamations dès le premier appel. Les clients sont identifiés à l'aide d'un code ou d'un numéro qui renseigne la catégorie à laquelle ils appartiennent : grands comptes, particuliers... Ils sont ensuite orientés automatiquement vers le bon interlocuteur. Dans une organisation "produits", le client doit nécessairement expliquer son problème à un interlocuteur "filtre" chargé de l'orienter ensuite vers le téléconseiller compétent. Une pratique que les clients acceptent de moins en moins.
Enfin la spécialisation "client" des téléopérateurs permet à l'entreprise de mieux intéresser ces derniers aux résultats. "Dans une spécialisation "produit", il est pratiquement impossible d'indexer les salaires sur les performances, tant le nombre d'indicateurs est pléthorique, prévient Eric Stevens : qualité de l'appel, temps de réponse, opinion du client au final, les critères sont, soit trop simples, donc partiaux et inefficaces, soit trop nombreux et du coup illisibles pour le téléopérateur." Dans une spécialisation client, au contraire, les performances sont plus facilement mesurables, en fonction de l'impact direct sur le portefeuille client : taux de fidélisation, nombre de ventes croisées, acquisition de nouveaux clients acquis
De nouvelles opportunités Les possibilités d'évolution professionnelle restent un point noir pour beaucoup de centres d'appels, qui n'ont pas grand-chose à offrir à leurs jeunes téléopérateurs, en dehors des postes de chefs d'équipes et de managers intermédiaires. Du coup, les agents de ces centres sont généralement très jeunes et l'ancienneté n'y dépasse pas deux ans en moyenne.
Toutefois, à mesure que la relation client prend une importance stratégique
croissante, les entreprises tendent à confier l'activité de contact à des forces
de vente sédentaires : "ces équipes travaillent au téléphone, exactement comme
en centre d'appels, mais elles sont composées de jeunes commerciaux BAC+5, qui
y font leur premières armes avant de passer sur le terrain, au bout d'un ou deux
ans au plus", souligne Eric Stevens, qui observe, d'une manière générale, une
valorisation croissante de ce métier.
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